1 00:00:05,160 --> 00:00:06,080 Bonjour à tous. 2 00:00:06,120 --> 00:00:09,520 Nous abordons à présent la Deuxième Partie de ce cours, 3 00:00:09,680 --> 00:00:13,340 après l’étude des principes directeurs qui couvrent l’ensemble de la procédure 4 00:00:13,460 --> 00:00:16,340 que nous allons étudier en entrant dans le vif du sujet. 5 00:00:17,120 --> 00:00:19,920 Nous commençons cette partie consacrée linéairement 6 00:00:19,960 --> 00:00:22,300 au procès pénal au sens large, 7 00:00:22,360 --> 00:00:24,560 c’est-à-dire comprenant l’avant-procès ici 8 00:00:24,620 --> 00:00:31,490 et en commençant par l’enquête de police judiciaire au sens juridique. 9 00:00:31,540 --> 00:00:34,490 Effectivement, lorsque l’on oppose enquête et instruction, 10 00:00:34,540 --> 00:00:39,700 instruction qui fera l’objet d’une troisième partie, 11 00:00:40,360 --> 00:00:43,460 l’enquête, stricto sensu, vise l’enquête de police judiciaire. 12 00:00:43,760 --> 00:00:45,580 L’instruction, nous le verrons, je l’avais dit, 13 00:00:45,620 --> 00:00:47,180 est aussi une phase d’investigation, 14 00:00:47,240 --> 00:00:48,940 donc une enquête dans le langage courant. 15 00:00:49,000 --> 00:00:53,450 Mais juridiquement, l’enquête vise cette première phase, 16 00:00:54,320 --> 00:00:58,640 enquête de police judiciaire qui peut être de différentes formes. 17 00:01:01,000 --> 00:01:09,060 À titre préliminaire, je rappellerai la confusion qui s’opère aujourd’hui 18 00:01:09,120 --> 00:01:10,360 entre les cadres d’investigation. 19 00:01:10,530 --> 00:01:13,440 C’est une idée importante qui va vraiment 20 00:01:13,660 --> 00:01:16,160 donner un fil directeur à tous nos développements. 21 00:01:18,860 --> 00:01:25,180 Aujourd’hui, il existe de plus en plus de pouvoir des enquêteurs communs 22 00:01:27,500 --> 00:01:30,240 à l’enquête de police et à l’instruction préparatoire. 23 00:01:31,310 --> 00:01:33,560 Et au sein même de l’enquête de police, 24 00:01:33,620 --> 00:01:37,720 il existe de plus en plus de pouvoirs communs aux enquêteurs 25 00:01:37,780 --> 00:01:40,440 en enquête de flagrance et en enquête préliminaire. 26 00:01:40,870 --> 00:01:44,340 C’est-à-dire concrètement, que vous aviez autrefois, par le passé, 27 00:01:44,580 --> 00:01:47,960 des pouvoirs coercitifs qui étaient offerts aux enquêteurs 28 00:01:48,020 --> 00:01:51,920 et réservés simplement à ceux-ci dans le cadre de l’instruction préparatoire. 29 00:01:52,020 --> 00:01:53,540 Je prends l’exemple des écoutes téléphoniques 30 00:01:53,620 --> 00:01:56,390 qui ont été instaurées en droit français en 1991. 31 00:01:56,780 --> 00:02:00,480 L’on considérait qu’il s’agissait d’une telle atteinte à la vie privée 32 00:02:00,600 --> 00:02:03,460 qu’il fallait les limiter au maximum 33 00:02:03,500 --> 00:02:06,440 et les réserver au cadre réduit de l’instruction préparatoire. 34 00:02:07,070 --> 00:02:08,840 Le tournant majeur s’opère en 2004 35 00:02:08,880 --> 00:02:13,520 avec la nécessaire lutte contre la criminalité organisée. 36 00:02:13,580 --> 00:02:15,980 C’est la loi du 9 mars 2004 qui, progressivement, 37 00:02:16,780 --> 00:02:21,040 va introduire, en enquête, 38 00:02:21,080 --> 00:02:23,940 des pouvoirs coercitifs réservés jusqu’alors à l’instruction. 39 00:02:24,890 --> 00:02:28,340 Les écoutes téléphoniques en font partie, les perquisitions de nuit également, 40 00:02:28,620 --> 00:02:32,960 avec, attention, un objectif bien précis, 41 00:02:33,020 --> 00:02:36,160 à savoir lutter contre une certaine forme de criminalité organisée, 42 00:02:36,250 --> 00:02:38,990 la question étant de savoir ce que cela recouvre, ce que nous verrons. 43 00:02:40,060 --> 00:02:42,280 En tous les cas, à titre liminaire, bien comprendre cette logique-là, 44 00:02:42,340 --> 00:02:43,280 c’est qu’effectivement, 45 00:02:47,800 --> 00:02:50,120 en transposant des pouvoirs existants en instruction 46 00:02:50,180 --> 00:02:51,540 à l’enquête de police judiciaire, 47 00:02:51,600 --> 00:02:52,340 mécaniquement, 48 00:02:52,400 --> 00:02:54,720 c’est quelque chose que j’avais un petit peu relevé par le passé, 49 00:02:55,120 --> 00:02:58,120 mécaniquement, l’instruction se résorbe et est réduite à peau de chagrin 50 00:02:58,240 --> 00:02:59,600 puisqu’aujourd’hui, concrètement, 51 00:02:59,660 --> 00:03:02,400 le procureur de la République, qui souhaite mettre en œuvre, par exemple, 52 00:03:02,460 --> 00:03:04,240 un dispositif de géolocalisation, 53 00:03:04,600 --> 00:03:07,840 n’a plus à ouvrir une instruction, n’a plus à ouvrir une instruction. 54 00:03:08,990 --> 00:03:10,820 Il veut mettre en œuvre des écoutes téléphoniques. 55 00:03:10,860 --> 00:03:12,900 Attention, en matière de criminalité organisée, 56 00:03:13,080 --> 00:03:14,420 il n’a plus à ouvrir une instruction, 57 00:03:14,800 --> 00:03:18,000 ce qui d’ailleurs, je l’avais dit, à se poser la question 58 00:03:18,060 --> 00:03:20,920 de la fusion des cadres d’investigations entre enquête et instruction. 59 00:03:21,400 --> 00:03:23,340 C’est ce qui avait été proposé en 2010 60 00:03:23,420 --> 00:03:25,910 dans le cadre de l’avant-projet de réforme du Code de procédure pénale. 61 00:03:26,510 --> 00:03:30,500 Libre à vous d’avoir un avis critique sur le sujet. 62 00:03:31,100 --> 00:03:32,000 Bien sûr, c’est recommandé. 63 00:03:32,060 --> 00:03:35,620 Libre à vous, en tout cas, d’être pour ou contre la suppression de l’instruction. 64 00:03:36,050 --> 00:03:40,260 On peut considérer qu’effectivement, au regard de l’ensemble de ces pouvoirs, 65 00:03:40,300 --> 00:03:41,620 la distinction n’a plus lieu d’être, 66 00:03:41,940 --> 00:03:45,860 mais on peut aussi se réjouir de ce qu’il existe encore, 67 00:03:45,940 --> 00:03:47,160 en droit procédural français, 68 00:03:47,220 --> 00:03:50,480 un cadre, même restreint, d’investigations, d’instruction, 69 00:03:50,720 --> 00:03:54,650 menées sous la direction d’un juge, d’un juge du siège indépendant. 70 00:03:54,890 --> 00:03:58,000 On a vu en effet que dans 96 à 97 % des cas, 71 00:03:58,240 --> 00:04:01,040 les affaires ne font l’objet que d’une enquête qui est réalisée 72 00:04:01,140 --> 00:04:04,440 sous le contrôle d’un procureur de la République qui n’est pas indépendant, 73 00:04:04,480 --> 00:04:06,800 qui ne répond pas aux exigences d’indépendance, 74 00:04:06,840 --> 00:04:08,840 en tous les cas aux yeux de la Cour européenne des droits de l’homme 75 00:04:08,900 --> 00:04:10,940 et de la Cour de cassation française. 76 00:04:12,260 --> 00:04:14,400 C’est une réflexion générale 77 00:04:14,488 --> 00:04:19,120 qui va se concrétiser au fil de l’étude des différents actes 78 00:04:22,660 --> 00:04:25,490 que peuvent mettre en œuvre les enquêteurs. 79 00:04:27,600 --> 00:04:29,460 Envisageons dans un premier temps, Première Section, 80 00:04:29,520 --> 00:04:30,320 les formes de l’enquête, 81 00:04:30,420 --> 00:04:33,380 pour ensuite s’interroger sur les pouvoirs des enquêteurs. 82 00:04:33,740 --> 00:04:36,140 D’abord, première section, les formes de l’enquête. 83 00:04:36,560 --> 00:04:38,680 Malgré le débat qui s’engage autour d’une refonte 84 00:04:38,720 --> 00:04:41,540 du cadre de l’enquête lato sensu, si je puis dire, 85 00:04:41,920 --> 00:04:44,400 la distinction demeure et les critères sont à connaître. 86 00:04:44,580 --> 00:04:45,620 Je vous rappelle qu’en 2010, 87 00:04:45,680 --> 00:04:47,860 on proposait de créer un cadre unique d’investigation 88 00:04:48,100 --> 00:04:49,420 sous la direction du procureur, 89 00:04:49,700 --> 00:04:52,240 lequel serait contrôlé par un juge qui aurait été 90 00:04:52,460 --> 00:04:54,280 le juge de l’enquête et des libertés, 91 00:04:54,340 --> 00:04:59,030 une espèce de transmutations du juge des libertés et de la détention actuel. 92 00:05:00,500 --> 00:05:02,200 Les critères sont à connaître, 93 00:05:02,240 --> 00:05:06,520 la distinction aujourd’hui de différentes formes d’enquête 94 00:05:06,580 --> 00:05:08,200 et j’envisage, dans un premier paragraphe 95 00:05:08,260 --> 00:05:10,740 l’enquête, sur infraction flagrante. 96 00:05:12,740 --> 00:05:18,240 Il y a, tout d’abord A, des critères d’ouverture d’une enquête de flagrance. 97 00:05:19,940 --> 00:05:21,200 Concrètement, dans un cas pratique, 98 00:05:21,240 --> 00:05:23,880 il faut vous demander en regard des faits, 99 00:05:23,940 --> 00:05:27,760 s’ils relèvent de la flagrance, une enquête de flagrance peut s’ouvrir. 100 00:05:28,730 --> 00:05:31,640 La procédure d’enquête de flagrance est prévue aux articles 53 101 00:05:31,700 --> 00:05:33,530 et suivants du Code de procédure pénale. 102 00:05:34,840 --> 00:05:36,500 L’enquête de flagrance, tout d’abord, 103 00:05:36,560 --> 00:05:38,960 ne peut être ouverte qu’en présence d’une infraction grave, 104 00:05:39,220 --> 00:05:42,460 à savoir un crime ou un délit punissable d’une peine d’emprisonnement, 105 00:05:42,500 --> 00:05:46,070 c’est l’article 67 du Code de procédure pénale. 106 00:05:46,820 --> 00:05:50,740 La jurisprudence a recours à la théorie de l’apparence. 107 00:05:51,350 --> 00:05:54,020 Ce qui compte, c’est que l’infraction ait l’air grave. 108 00:05:54,620 --> 00:05:55,720 Peu importe donc 109 00:05:56,100 --> 00:06:00,460 que l’infraction se révèle moins grave que l’enquêteur ne le pensait, 110 00:06:00,760 --> 00:06:05,700 dès lors que la qualification lui est apparue comme étant vraisemblable. 111 00:06:07,080 --> 00:06:11,080 L’article 53, ensuite, envisage quatre cas de flagrance 112 00:06:11,140 --> 00:06:12,560 permettant l’ouverture d’une telle enquête. 113 00:06:12,640 --> 00:06:14,750 Je vous invite à le lire avec moi. 114 00:06:15,440 --> 00:06:20,920 On nous dit : "Vise l’infraction, crime ou délit est en train de se commettre", 115 00:06:21,180 --> 00:06:22,540 se commet actuellement, 116 00:06:23,700 --> 00:06:26,940 ou encore "l’infraction, crime ou délit vient de se commettre", 117 00:06:28,000 --> 00:06:31,220 ou encore "l’infraction, crime ou délit venant de se commettre. 118 00:06:31,490 --> 00:06:33,620 La personne est poursuivie par la clameur publique". 119 00:06:33,820 --> 00:06:36,830 Par exemple : "au voleur, au voleur", on est en pleine flagrance. 120 00:06:37,100 --> 00:06:38,750 La clameur publique, c’est en deux mots. 121 00:06:38,990 --> 00:06:42,220 Non pas comme j’ai pu le voir à diverses reprises la clameur, 122 00:06:42,280 --> 00:06:45,140 l’acclameur, celui qui acclame. 123 00:06:45,540 --> 00:06:47,890 C’est en deux mots, clameur et public. 124 00:06:48,950 --> 00:06:51,890 Et puis enfin, dernière hypothèse l’infraction venant de se commettre, 125 00:06:51,920 --> 00:06:55,220 la personne se trouve en possession d’objets ou d’indices 126 00:06:55,440 --> 00:06:59,480 laissant à penser qu’il est auteur ou complice de l’infraction. 127 00:07:01,320 --> 00:07:04,620 Si l’on veut trouver des critères communs à ces hypothèses, 128 00:07:04,880 --> 00:07:07,880 il est possible d’identifier deux critères cumulatifs. 129 00:07:07,940 --> 00:07:11,080 Et ça, effectivement, ce serait bien, dans des copies, 130 00:07:11,140 --> 00:07:12,500 si vous êtes confronté à un cas pratique, 131 00:07:12,560 --> 00:07:16,420 de faire ressortir effectivement les lignes directrices, 132 00:07:16,480 --> 00:07:19,420 les critères au regard de ces quatre cas décrits par l’article 53 : 133 00:07:19,960 --> 00:07:22,300 - Premier critère, c’est un critère temporel. 134 00:07:22,960 --> 00:07:25,790 L’infraction, on nous dit, est en train ou vient de se commettre. 135 00:07:26,480 --> 00:07:30,840 La difficulté consiste, à ce stade, à apprécier le délai de flagrance. 136 00:07:32,270 --> 00:07:34,320 Surtout s’agissant du second cas 137 00:07:34,360 --> 00:07:37,280 visé par l’article 53 du Code de procédure pénale, 138 00:07:37,340 --> 00:07:39,000 on nous dit l’infraction venant de se commettre, 139 00:07:39,420 --> 00:07:40,490 qu’est-ce que ça veut dire. 140 00:07:41,240 --> 00:07:45,720 La Chambre criminelle a d’abord considéré que cette durée devait être brève, 141 00:07:46,120 --> 00:07:47,460 de l’ordre de quelques heures, 142 00:07:47,780 --> 00:07:50,870 en raison du fondement qui réside dans l’urgence à agir. 143 00:07:51,740 --> 00:07:56,820 Et elle a admis que l’écoulement d’un délai de 28 heures 144 00:07:57,180 --> 00:07:59,380 pouvait laisser subsister l’état de flagrance, 145 00:07:59,440 --> 00:08:02,680 par exemple dans un arrêt du 26 février 1991. 146 00:08:03,140 --> 00:08:05,440 En revanche, un délai de six jours apparaît trop long, 147 00:08:05,500 --> 00:08:09,320 nous dit la Cour de cassation le 11 février 1998. 148 00:08:09,920 --> 00:08:12,360 Donc il faut ici se poser la question, 149 00:08:12,440 --> 00:08:16,580 relever la question si la difficulté se pose 150 00:08:17,060 --> 00:08:19,200 ou relever la difficulté si la question se pose 151 00:08:19,480 --> 00:08:22,100 en soulignant le fait que la solution est casuistique. 152 00:08:23,120 --> 00:08:26,520 Il y a un critère temporel et essayer de se fonder sur ce que dit la loi 153 00:08:26,560 --> 00:08:28,840 et surtout vérifier aussi au regard de la jurisprudence 154 00:08:28,900 --> 00:08:31,520 qui figure sous l’article 53 dans vos codes. 155 00:08:32,220 --> 00:08:34,720 - Ensuite, le second critère est un critère de vraisemblance, 156 00:08:35,160 --> 00:08:37,960 issue dégagée par la Cour de cassation 157 00:08:38,020 --> 00:08:44,888 dans un célèbre arrêt du 22 janvier 1953, l’arrêt Isnard. 158 00:08:46,110 --> 00:08:50,180 Ce critère de vraisemblance est celui des indices apparents 159 00:08:50,320 --> 00:08:51,780 d’un comportement délictueux. 160 00:08:52,260 --> 00:08:55,420 L’infraction doit être révélée par des indices apparents 161 00:08:55,480 --> 00:08:57,160 d’un comportement délictueux. 162 00:08:57,590 --> 00:09:00,080 Les faits doivent donc apparaître, aux yeux de tous, 163 00:09:00,420 --> 00:09:02,420 comme étant certainement délictueux. 164 00:09:03,410 --> 00:09:06,740 Ce critère est assez subtil et conduit à considérer 165 00:09:06,780 --> 00:09:10,240 que même si l’infraction se commet actuellement, 166 00:09:10,660 --> 00:09:12,960 dès lors que les indices ne sont pas apparents, 167 00:09:13,160 --> 00:09:15,040 alors cette infraction n’est pas flagrante. 168 00:09:15,580 --> 00:09:18,380 Ainsi, par exemple, d’une perquisition sans indices 169 00:09:18,680 --> 00:09:22,500 réalisée à la suite d’un renseignement confidentiel ou une déclaration anonyme. 170 00:09:23,030 --> 00:09:24,260 La perquisition serait nulle. 171 00:09:24,340 --> 00:09:30,160 C’est ce que la Cour de cassation a affirmé dans un arrêt le 23 octobre 1991. 172 00:09:31,610 --> 00:09:32,460 En réalité, ce qu’il faut noter, 173 00:09:32,500 --> 00:09:35,920 c’est que la notion d’indices apparents d’un comportement délictueux 174 00:09:35,960 --> 00:09:37,880 est entendue largement par la jurisprudence, 175 00:09:38,280 --> 00:09:41,280 de sorte que l’enquête de flagrance est ouverte assez facilement. 176 00:09:42,080 --> 00:09:49,270 Par exemple, l’hésitation marquée par un individu à la vue des policiers, 177 00:09:49,360 --> 00:09:49,740 par exemple 178 00:09:49,800 --> 00:09:53,560 un mouvement de bras vers le caniveau juste avant un contrôle de police, 179 00:09:54,260 --> 00:09:56,720 peut justifier l’ouverture d’une enquête de flagrance, 180 00:09:57,230 --> 00:10:01,210 dès lors qu’une telle attitude se trouve par d’autres indices. 181 00:10:01,280 --> 00:10:03,030 Encore une fois, c’est l’apparence qui compte. 182 00:10:03,480 --> 00:10:05,440 Peu importe que la qualification retenue 183 00:10:05,480 --> 00:10:07,780 ne corresponde finalement pas à la vérité, 184 00:10:07,840 --> 00:10:13,360 la Cour de cassation l’a réaffirmé dans un arrêt du 9 janvier 1990. 185 00:10:14,080 --> 00:10:16,340 Voilà donc pour cette définition même de la flagrance 186 00:10:16,380 --> 00:10:19,560 et des critères d’ouverture qui sont un préalable 187 00:10:20,640 --> 00:10:24,950 de façon à bien savoir finalement quel sera le régime applicable. 188 00:10:25,890 --> 00:10:27,810 Précisément, B, quel est ce régime ? 189 00:10:28,010 --> 00:10:29,640 B, le régime de l’enquête. 190 00:10:29,940 --> 00:10:33,780 Il faut revenir d’abord sur 1, les caractéristiques de l’enquête. 191 00:10:35,320 --> 00:10:37,510 C’est la grande différence avec l’enquête préliminaire. 192 00:10:37,560 --> 00:10:41,920 L’enquête de flagrance se distingue par son caractère contraignant, coercitif. 193 00:10:41,980 --> 00:10:43,820 On dit que c’est une enquête de police coercitive. 194 00:10:44,180 --> 00:10:46,720 On dit que c’est le royaume par ailleurs des OPJ 195 00:10:46,780 --> 00:10:48,660 qui disposent davantage de pouvoirs ici 196 00:10:48,720 --> 00:10:54,240 dans le cadre de cette flagrance de pouvoir coercitif. 197 00:10:54,300 --> 00:10:59,070 Ça veut dire que les enquêteurs peuvent imposer, à l’intéressé, 198 00:10:59,610 --> 00:11:03,980 tous les actes d’investigation sans avoir à recueillir leur consentement. 199 00:11:04,940 --> 00:11:05,560 Par exemple, 200 00:11:05,620 --> 00:11:08,180 une perquisition réalisée dans le cadre d’une enquête de flagrance 201 00:11:08,480 --> 00:11:10,740 ne nécessite pas le consentement de la personne concernée. 202 00:11:11,540 --> 00:11:12,320 Nous verrons, néanmoins, 203 00:11:12,400 --> 00:11:15,100 que ces actes demeurent sous le contrôle du procureur de la République 204 00:11:15,180 --> 00:11:16,320 qui est le directeur de l’enquête. 205 00:11:17,120 --> 00:11:19,760 Ainsi, l’officier de police judiciaire, 206 00:11:19,820 --> 00:11:22,040 qui a visé d’un crime ou d’un délit flagrant, 207 00:11:22,500 --> 00:11:25,260 en informe immédiatement le procureur de la République, 208 00:11:25,830 --> 00:11:29,300 tout en veillant à la conservation des indices et des éléments 209 00:11:29,960 --> 00:11:33,180 qui peuvent servir à la manifestation de la vérité. 210 00:11:33,900 --> 00:11:36,900 Le procureur de la République peut dessaisir l’OPJ 211 00:11:37,100 --> 00:11:40,180 de la conduite de l’enquête en se transportant sur les lieux. 212 00:11:40,890 --> 00:11:43,100 Il peut aussi requérir l’ouverture d’une instruction, 213 00:11:43,140 --> 00:11:45,510 c’est l’article 68 du Code de procédure pénale. 214 00:11:45,900 --> 00:11:50,430 Lorsque les actes contiennent des atteintes importantes à la liberté, 215 00:11:50,760 --> 00:11:53,070 alors le JLD doit les autoriser. 216 00:11:53,270 --> 00:11:54,520 C’est important de bien comprendre cela, 217 00:11:54,580 --> 00:11:57,220 on va le voir après quand on étudiera au cas par cas les actes en question, 218 00:11:57,280 --> 00:12:02,780 mais le contrôle des actes est gradué en fonction de la gravité de ces derniers. 219 00:12:09,480 --> 00:12:13,180 On va voir un pouvoir important des OPJ en la matière avec une graduation 220 00:12:13,520 --> 00:12:17,310 en fonction de l’atteinte portée ici aux libertés de l’individu, 221 00:12:17,340 --> 00:12:19,740 une gradation qui suppose tantôt de faire appel au procureur, 222 00:12:19,800 --> 00:12:22,590 tantôt, quand l’attente est plus grande, au JLD. 223 00:12:23,460 --> 00:12:25,360 Quant à la durée de l’enquête, 2.  224 00:12:26,180 --> 00:12:30,060 Afin de compenser ce caractère coercitif, 225 00:12:31,040 --> 00:12:33,380 la durée de l’enquête est limitée à huit jours 226 00:12:33,720 --> 00:12:36,380 à compter de la découverte de l’infraction. 227 00:12:36,650 --> 00:12:38,820 C’est l’article 53 du Code de procédure pénale. 228 00:12:40,320 --> 00:12:43,380 Depuis la loi du 9 mars 2004 que j’ai déjà évoquée, 229 00:12:43,440 --> 00:12:46,460 une prolongation supplémentaire de huit jours est possible 230 00:12:48,500 --> 00:12:52,060 lorsque des investigations nécessaires ne peuvent être différées 231 00:12:52,400 --> 00:12:55,880 et si l’infraction en cause est un crime ou un délit punissable 232 00:12:56,120 --> 00:12:58,680 d’une peine minimale de cinq ans d’emprisonnement. 233 00:12:59,190 --> 00:13:01,140 À l’expiration du délai prévu, 234 00:13:01,280 --> 00:13:03,360 on bascule vers l’origine de l’enquête préliminaire 235 00:13:03,480 --> 00:13:05,500 qui correspond à l’enquête de droit commun. 236 00:13:06,180 --> 00:13:07,280 C’est très court, 237 00:13:07,300 --> 00:13:09,920 ce qui correspond encore une fois à la flagrance de la situation, 238 00:13:10,240 --> 00:13:14,480 un délai d’une durée de huit jours, renouvelable une fois sous conditions. 239 00:13:15,180 --> 00:13:18,600 Et à l’expiration de ce délai, on bascule, on continue, 240 00:13:18,800 --> 00:13:21,930 si les choses ne sont pas élucidées, elles les sont rarement, 241 00:13:22,230 --> 00:13:24,330 on continue vers l’enquête préliminaire. 242 00:13:25,950 --> 00:13:29,040 Le projet de réforme de la justice précédant l’adoption 243 00:13:29,080 --> 00:13:30,900 de la loi du 23 mars 2019 244 00:13:31,220 --> 00:13:35,520 avait envisagé d’étendre la durée de l’enquête de flagrance à 16 jours 245 00:13:35,860 --> 00:13:38,430 en matière de criminalité organisée. 246 00:13:39,360 --> 00:13:44,420 Là, vous me direz, on est à 16, mais on prévoyait justement 16 renouvelables. 247 00:13:45,900 --> 00:13:48,750 En outre, s’agissant des infractions punies de trois ans d’emprisonnement, 248 00:13:48,800 --> 00:13:49,420 il était prévu 249 00:13:49,480 --> 00:13:53,490 que l’enquête puisse être étendue de huit à 16 jours sous conditions. 250 00:13:53,970 --> 00:13:55,240 Et finalement, 251 00:13:55,320 --> 00:13:58,240 ça n’a pas abouti puisque l’allongement de la durée de l’enquête de flagrance 252 00:13:58,280 --> 00:14:02,720 a été censuré par le Conseil constitutionnel le 21 mars 2019, 253 00:14:03,520 --> 00:14:06,560 lequel a considéré, a jugé que les pouvoirs coercitifs, 254 00:14:06,620 --> 00:14:08,340 tels que prévus dans le cadre de cette enquête, 255 00:14:08,660 --> 00:14:11,880 ne sont justifiés que par la proximité avec la commission de l’infraction. 256 00:14:11,940 --> 00:14:12,960 C’est assez intéressant. 257 00:14:13,020 --> 00:14:16,220 Effectivement, nous verrons que cette enquête est coercitive 258 00:14:16,360 --> 00:14:21,090 et que cette coercition ne se justifie que par cette condition de flagrance. 259 00:14:21,500 --> 00:14:24,820 Donc allonger la durée aurait perturbé l’équilibre entre, 260 00:14:25,520 --> 00:14:27,740 d’une part, l’objectif de valeur constitutionnelle 261 00:14:27,780 --> 00:14:29,240 de recherche des auteurs d’infractions 262 00:14:29,580 --> 00:14:30,620 et, d’autre part, 263 00:14:31,400 --> 00:14:36,720 le droit au respect de la vie privée et l’inviolabilité du domicile. 264 00:14:37,340 --> 00:14:42,800 Voilà ce que je pouvais dire s’agissant de l’enquête de flagrance 265 00:14:43,160 --> 00:14:45,060 correspondant à ce premier paragraphe. 266 00:14:45,120 --> 00:14:46,260 Nous verrons, la prochaine fois, 267 00:14:47,420 --> 00:14:49,840 la définition même de l’enquête préliminaire.