1 00:00:04,850 --> 00:00:09,830 Voyons maintenant quels sont les articles, les textes consacrés 2 00:00:11,070 --> 00:00:15,420 à la responsabilité du fait d’autrui, que deviennent les principes actuels 3 00:00:15,690 --> 00:00:20,400 de la responsabilité du fait d’autrui dans le projet de réforme du droit 4 00:00:20,600 --> 00:00:21,810 de la responsabilité civile. 5 00:00:22,010 --> 00:00:25,650 À cette responsabilité du fait d’autrui, sont consacrés plusieurs 6 00:00:25,850 --> 00:00:33,240 textes dans le projet de réforme, les articles 1245 à 1249 du projet. 7 00:00:33,440 --> 00:00:39,120 L’article 1245 met fin à une 8 00:00:39,320 --> 00:00:42,030 controverse doctrinale, à un débat doctrinal dont on a 9 00:00:42,230 --> 00:00:47,430 parlé puisqu’on peut comprendre, de l’article 1245, qu’il n’existe 10 00:00:47,630 --> 00:00:51,930 pas de principe général de responsabilité du fait d’autrui. 11 00:00:52,410 --> 00:00:55,560 On a vu qu’en jurisprudence, après l’arrêt Blieck, 12 00:00:55,760 --> 00:01:00,390 le débat s’était installé en doctrine, certains auteurs estimant qu’il 13 00:01:00,590 --> 00:01:03,150 y avait un principe général, d’autres auteurs estimant qu’il 14 00:01:03,350 --> 00:01:04,920 n’y avait pas de principe général. 15 00:01:05,120 --> 00:01:11,490 L’article 1245 limite les cas de responsabilité du fait d’autrui 16 00:01:11,910 --> 00:01:14,010 aux cas prévus par les textes. 17 00:01:14,880 --> 00:01:18,300 Le texte précise bien qu’il y a cette responsabilité dans les cas 18 00:01:18,500 --> 00:01:20,550 et conditions posées par les textes. 19 00:01:20,750 --> 00:01:22,830 Ça veut dire qu’il y a bien une énumération. 20 00:01:23,030 --> 00:01:27,870 Il y a bien des cas limitativement prévus et non pas un principe général 21 00:01:28,380 --> 00:01:33,360 de responsabilité du fait d’autrui, contrairement à ce qui existe pour 22 00:01:33,660 --> 00:01:38,100 les choses avec le principe général de responsabilité du fait des choses. 23 00:01:38,300 --> 00:01:42,660 C’est la première chose, pas de principe général affirmé 24 00:01:42,960 --> 00:01:47,280 dans la réforme, donc distinction entre le fait des choses et le 25 00:01:47,480 --> 00:01:48,240 fait d’autrui. 26 00:01:48,440 --> 00:01:53,850 L’article 1245 alinéa 2 précise par ailleurs, là aussi en mettant 27 00:01:54,050 --> 00:01:59,160 fin aux critiques suscitées par la jurisprudence Levert relativement 28 00:01:59,360 --> 00:02:01,940 à la responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur. 29 00:02:02,140 --> 00:02:07,710 C’est un texte qui va réaffirmer que pour la responsabilité du fait 30 00:02:07,910 --> 00:02:13,590 d’autrui, il faut la démonstration d’un fait de nature à engager la 31 00:02:13,790 --> 00:02:16,560 responsabilité de l’auteur direct d’un dommage. 32 00:02:17,280 --> 00:02:21,960 Cette preuve, qui doit être rapportée, d’un fait de nature à engager la 33 00:02:22,160 --> 00:02:26,190 responsabilité de l’auteur direct d’un dommage, c’est bien un texte 34 00:02:26,390 --> 00:02:29,340 qui vient ici briser la jurisprudence Levert. 35 00:02:30,450 --> 00:02:34,080 On se souvient que d’après les dernières évolutions de la 36 00:02:34,280 --> 00:02:40,230 jurisprudence de la Cour de cassation, pour la responsabilité des parents 37 00:02:40,430 --> 00:02:44,850 du fait de leur enfant mineur, un simple fait causal suffisait, 38 00:02:45,060 --> 00:02:49,590 non plus une faute ou le fait de la chose, mais un simple fait causal. 39 00:02:50,130 --> 00:02:54,180 Il y avait ainsi une distorsion entre les règles applicables selon 40 00:02:54,380 --> 00:02:57,540 le régime de responsabilité du fait d’autrui, ce qui avait été 41 00:02:57,740 --> 00:03:01,410 critiqué d’un point de vue technique, la distorsion n’était pas justifiée. 42 00:03:01,890 --> 00:03:05,580 Et d’un point de vue pratique aussi, on avait considéré que l’enfant 43 00:03:05,780 --> 00:03:10,110 était maltraité par la jurisprudence Levert, et les parents par ricochet 44 00:03:10,310 --> 00:03:11,070 évidemment. 45 00:03:11,340 --> 00:03:13,320 Cette jurisprudence avait été critiquée. 46 00:03:13,520 --> 00:03:15,660 Elle serait abandonnée dans le projet de réforme. 47 00:03:16,200 --> 00:03:19,560 On en revient à une solution plus orthodoxe, à une solution plus logique. 48 00:03:20,160 --> 00:03:24,540 La responsabilité du fait d’autrui suppose qu’autrui soit dans la 49 00:03:24,740 --> 00:03:27,000 situation d’engager sa propre responsabilité. 50 00:03:27,330 --> 00:03:31,260 À ce moment-là, on va répondre de son fait, du fait générateur. 51 00:03:31,980 --> 00:03:36,170 En revanche, un simple rapport de causalité n’est pas suffisant, 52 00:03:36,370 --> 00:03:42,750 donc on retombe sur une unification des régimes de responsabilité du 53 00:03:42,950 --> 00:03:43,710 fait d’autrui. 54 00:03:43,950 --> 00:03:47,790 Les textes suivants vont reprendre un certain nombre d’hypothèses 55 00:03:48,180 --> 00:03:50,670 de responsabilité du fait d’autrui. 56 00:03:50,870 --> 00:03:54,120 L’article 1246 s’attache aux mineurs. 57 00:03:55,140 --> 00:03:59,280 Pour les mineurs, le texte va retenir une responsabilité de plein droit, 58 00:03:59,480 --> 00:04:03,180 c’est-à-dire une responsabilité sans faute pour les parents, 59 00:04:03,660 --> 00:04:07,710 pour les tuteurs et pour les personnes qui sont chargées du mineur. 60 00:04:08,830 --> 00:04:13,330 En ce qui concerne les parents, le critère qui va être utilisé 61 00:04:13,530 --> 00:04:17,050 dans les nouveaux textes, c’est le critère de l’autorité 62 00:04:17,250 --> 00:04:18,010 parentale. 63 00:04:18,210 --> 00:04:21,100 Critère de l’autorité parentale qui devient le critère central, 64 00:04:21,300 --> 00:04:24,970 c’est un élément très important puisque ça veut dire qu’on va supprimer 65 00:04:25,480 --> 00:04:26,830 la notion de cohabitation. 66 00:04:27,130 --> 00:04:30,610 La notion de cohabitation, on avait vu que c’était une notion 67 00:04:30,810 --> 00:04:34,810 qui était très discutée, qui était contestée parce qu’au départ, 68 00:04:35,200 --> 00:04:39,760 la cohabitation matérielle s’expliquait par le régime de responsabilité 69 00:04:39,960 --> 00:04:41,470 qui était une présomption de faute. 70 00:04:41,800 --> 00:04:44,380 Les parents, on estimait qu’ils avaient mal surveillé et mal éduqué 71 00:04:44,580 --> 00:04:47,050 l’enfant, donc la notion de cohabitation s’expliquait. 72 00:04:47,620 --> 00:04:51,490 Mais dès lors qu’on est passé à une responsabilité de plein droit, 73 00:04:51,790 --> 00:04:56,580 le critère de la cohabitation n’était plus un critère essentiel. 74 00:04:56,780 --> 00:05:01,660 Donc ici, on prend acte, dans la réforme, du fait que le 75 00:05:01,860 --> 00:05:03,160 critère essentiel, c’est l’autorité parentale. 76 00:05:03,770 --> 00:05:07,620 La notion de cohabitation cesse d’être utilisée. 77 00:05:08,380 --> 00:05:11,260 Les tuteurs vont voir leur responsabilité engagée, 78 00:05:11,460 --> 00:05:15,730 d’après le texte, lorsqu’ils sont chargés de la personne du mineur. 79 00:05:16,390 --> 00:05:19,990 Et justement, la troisième catégorie de personnes responsables sur les 80 00:05:20,190 --> 00:05:24,430 personnes qui sont chargées du mineur, vise de manière générale, 81 00:05:24,630 --> 00:05:27,640 cette catégorie, à la fois les personnes physiques et les personnes 82 00:05:27,840 --> 00:05:28,600 morales. 83 00:05:28,990 --> 00:05:32,350 Mais ce qui est important ici, c’est que le texte vise une 84 00:05:32,550 --> 00:05:36,400 surveillance qui a pour origine une décision administrative ou 85 00:05:36,600 --> 00:05:40,780 une décision judiciaire, et non pas une source contractuelle. 86 00:05:40,980 --> 00:05:43,540 Ici, les seules sources, c’est une décision administrative 87 00:05:43,900 --> 00:05:45,560 ou une décision judiciaire. 88 00:05:45,760 --> 00:05:50,410 Le critère qui va justifier cette responsabilité du fait du mineur, 89 00:05:50,610 --> 00:05:55,630 c’est lorsque ces personnes vont être chargées d’un contrôle sur 90 00:05:55,830 --> 00:05:59,740 le mineur à titre permanent de leur mode de vie, contrôle à titre 91 00:05:59,940 --> 00:06:01,960 permanent du mode de vie des mineurs. 92 00:06:02,500 --> 00:06:06,400 Et à ce moment-là, c’est important de le noter aussi, les parents 93 00:06:06,600 --> 00:06:07,930 ne seront plus responsables. 94 00:06:08,320 --> 00:06:13,760 Il y a un transfert de responsabilité, une substitution de la responsabilité 95 00:06:13,960 --> 00:06:16,600 et non pas un cumul qui serait ici possible. 96 00:06:16,800 --> 00:06:21,490 L’article 1247, donc l’article suivant, traite des majeurs. 97 00:06:21,690 --> 00:06:26,860 Pareil, lorsqu’il y a un contrôle qui va être exercé, la surveillance 98 00:06:27,060 --> 00:06:29,200 de la personne qui sera responsable. 99 00:06:29,620 --> 00:06:34,270 Là encore, on a comme critère de cette responsabilité une mission 100 00:06:34,660 --> 00:06:39,400 d’organisation et de contrôle à titre permanent du mode de vie 101 00:06:39,600 --> 00:06:40,360 des majeurs. 102 00:06:40,560 --> 00:06:45,400 Souvenez-vous, on reprend les critères qui avaient été posés en 1991 dans 103 00:06:45,600 --> 00:06:48,400 la jurisprudence Blieck par la Cour de cassation. 104 00:06:49,270 --> 00:06:51,340 Et là, pour les majeurs, c’est la même chose. 105 00:06:51,540 --> 00:06:53,230 C’est une responsabilité de plein droit. 106 00:06:53,830 --> 00:06:55,720 Il n’y a donc pas de faute à prouver. 107 00:06:56,860 --> 00:06:59,320 C’est une responsabilité qui vise des personnes physiques ou des 108 00:06:59,520 --> 00:07:00,280 personnes morales. 109 00:07:01,210 --> 00:07:05,830 Le majeur doit avoir été placé par une décision administrative 110 00:07:06,030 --> 00:07:10,780 ou judiciaire sous la surveillance de la personne qui sera ensuite 111 00:07:10,980 --> 00:07:11,740 responsable. 112 00:07:11,940 --> 00:07:19,360 1246, 1247, ce sont des dispositions qui visent la responsabilité de 113 00:07:19,560 --> 00:07:22,810 personnes chargées de contrôler le mode de vie d’un mineur ou d’un 114 00:07:23,010 --> 00:07:27,790 majeur lorsque la source de ce pouvoir de contrôle est judiciaire 115 00:07:28,180 --> 00:07:29,200 ou administrative. 116 00:07:29,400 --> 00:07:32,980 En revanche, quand la source de ce contrôle est une source 117 00:07:33,180 --> 00:07:37,150 contractuelle, que ce soit pour les majeurs ou pour les mineurs, 118 00:07:37,350 --> 00:07:41,860 c’est alors l’article 1248 qui a vocation à s’appliquer, 119 00:07:42,580 --> 00:07:45,670 qui vise la source contractuelle et non plus administrative ou 120 00:07:45,870 --> 00:07:46,630 judiciaire. 121 00:07:47,200 --> 00:07:51,100 Il doit s’agir d’une mission qui est exercée à titre professionnel. 122 00:07:52,060 --> 00:07:53,410 Le régime est différent. 123 00:07:53,610 --> 00:07:58,510 C’est un régime qui est plus favorable ici pour la personne contractuellement 124 00:07:58,710 --> 00:08:02,080 chargée de cette mission de contrôle à titre professionnel. 125 00:08:02,500 --> 00:08:04,540 Pourquoi c’est un régime plus favorable ? 126 00:08:04,740 --> 00:08:08,650 Parce qu’il repose sur une présomption simple de faute. 127 00:08:08,850 --> 00:08:16,000 Conséquence, la démonstration de l’absence de faute aura un caractère 128 00:08:16,300 --> 00:08:17,060 exonératoire. 129 00:08:18,460 --> 00:08:22,420 Dernier texte sur la responsabilité du fait d’autrui, c’est l’article 130 00:08:22,780 --> 00:08:29,200 1249 qui reprend, pour l’essentiel, les solutions qu’on a développées 131 00:08:29,590 --> 00:08:33,580 dans la responsabilité du commettant du fait des préposés. 132 00:08:34,150 --> 00:08:37,360 Le régime est une responsabilité de plein droit. 133 00:08:38,080 --> 00:08:41,620 La définition du commettant est reprise comme celui qui a le pouvoir 134 00:08:41,820 --> 00:08:45,460 de donner des ordres ou des instructions au préposé. 135 00:08:46,450 --> 00:08:51,940 La notion de transfert du lien de préposition aussi suppose qu’à 136 00:08:52,140 --> 00:08:57,250 ce moment-là, la responsabilité pèsera sur le bénéficiaire de ce 137 00:08:57,450 --> 00:08:58,210 transfert. 138 00:08:58,410 --> 00:09:04,090 De même, le texte reprend la notion d’abus de fonction avec les critères 139 00:09:04,570 --> 00:09:07,750 posés par la Cour de cassation dans l’arrêt de l’assemblée plénière 140 00:09:07,950 --> 00:09:08,710 de 1988. 141 00:09:09,460 --> 00:09:14,290 Il faut un agissement hors des fonctions, sans autorisation et 142 00:09:14,490 --> 00:09:18,280 à des fins étrangères aux attributions du préposé. 143 00:09:19,330 --> 00:09:23,410 Le texte précise que le commettant ne sera pas responsable en cas 144 00:09:23,610 --> 00:09:27,070 de collusion entre le préposé et la victime. 145 00:09:27,270 --> 00:09:30,220 On retrouve ici une notion qui avait été mise en avant par la 146 00:09:30,420 --> 00:09:31,180 jurisprudence. 147 00:09:31,380 --> 00:09:33,940 On tient compte de la bonne ou de la mauvaise foi de la victime 148 00:09:34,270 --> 00:09:37,960 et on tient compte de l’apparence, ce que la victime a légitimement 149 00:09:38,200 --> 00:09:41,800 pu ignorer ou qu’elle devait connaître, qu’elle ne pouvait pas ignorer, 150 00:09:42,000 --> 00:09:46,780 au contraire, dans la situation, dans l’agissement réalisé par le 151 00:09:46,980 --> 00:09:47,740 préposé. 152 00:09:47,940 --> 00:09:54,430 Enfin, le texte consacre l’immunité du préposé posé par la jurisprudence 153 00:09:54,630 --> 00:09:55,570 Costedoat en 2000. 154 00:09:56,320 --> 00:10:01,270 Le préposé ne sera pas responsable, en effet, sauf s’il commet une 155 00:10:01,470 --> 00:10:04,840 faute intentionnelle ou un abus de fonction. 156 00:10:05,040 --> 00:10:09,670 C’est pour l’essentiel ici, la reprise des avancées 157 00:10:09,870 --> 00:10:13,600 jurisprudentielles sur la responsabilité du commettant du 158 00:10:13,800 --> 00:10:15,220 fait des préposés.