1 00:00:04,820 --> 00:00:09,620 Bonjour à tous et bienvenue à ce cours sur les orientations 2 00:00:09,819 --> 00:00:12,080 de l’économie politique. 3 00:00:12,280 --> 00:00:15,820 Partie 4 : le développement durable. 4 00:00:17,360 --> 00:00:20,680 Il n’est pas possible de finir cette petite synthèse 5 00:00:20,880 --> 00:00:22,860 des grands courants de la pensée économique des 6 00:00:23,060 --> 00:00:25,620 origines jusqu’à nos jours sans parler d’un concept 7 00:00:25,820 --> 00:00:29,100 devenu fondamental aujourd’hui, le développement durable. 8 00:00:29,760 --> 00:00:34,140 Nous commencerons, dans cette section, par définir le développement durable. 9 00:00:34,580 --> 00:00:39,540 En deuxième partie, nous nous intéresserons à la 10 00:00:39,740 --> 00:00:41,260 soutenabilité faible. 11 00:00:41,460 --> 00:00:44,860 En troisième partie, nous nous intéresserons à la 12 00:00:45,060 --> 00:00:48,540 soutenabilité forte, puis en dernière partie, 13 00:00:48,740 --> 00:00:53,320 nous aurons une réflexion un peu plus générale sur les 14 00:00:53,520 --> 00:00:54,300 termes du débat. 15 00:00:54,940 --> 00:00:59,220 I. Définition du développement durable. 16 00:00:59,820 --> 00:01:03,380 La prise en compte de l’environnement dans les 17 00:01:03,580 --> 00:01:07,840 études économiques apparaît très tôt avec les 18 00:01:08,040 --> 00:01:10,980 physiocrates pour qui la nature était source de richesses, 19 00:01:11,260 --> 00:01:14,960 via, je vous le rappelle, son don gratuit, puis avec 20 00:01:15,160 --> 00:01:19,140 les classiques qui mettent au contraire en évidence son avarice. 21 00:01:20,980 --> 00:01:25,460 C’est en raison de cette avarice de la terre que la 22 00:01:25,660 --> 00:01:27,060 croissance est limitée. 23 00:01:27,260 --> 00:01:29,820 C’était, je vous le rappelle, ce qu’on appelait la loi des 24 00:01:30,020 --> 00:01:34,779 rendements décroissants de Ricardo, ou les théories 25 00:01:35,340 --> 00:01:40,180 démographiques de Malthus qui nous disait que la population 26 00:01:40,380 --> 00:01:42,460 croît plus vite que les ressources. 27 00:01:44,120 --> 00:01:47,620 Cependant, avec la révolution industrielle, l’homme semble 28 00:01:47,820 --> 00:01:51,640 s’affranchir de l’avarice de la nature grâce à toutes les 29 00:01:51,840 --> 00:01:53,780 innovations industrielles et 30 00:01:53,980 --> 00:01:57,440 agricoles. Famine, épidémie, 31 00:01:57,740 --> 00:02:02,340 tout recule, le progrès technique semble ouvrir la 32 00:02:02,540 --> 00:02:04,900 voie d’une croissance soutenue. 33 00:02:06,700 --> 00:02:09,919 Aucune théorie économie dominante n’intègre alors la 34 00:02:10,119 --> 00:02:13,180 question environnementale, seul peut-être le 35 00:02:13,380 --> 00:02:16,340 néoclassique Stanley Jevons qui s’inquiète de 36 00:02:16,540 --> 00:02:19,800 l’épuisement du charbon qui engendrerait un effondrement 37 00:02:20,000 --> 00:02:20,840 de la production. 38 00:02:22,740 --> 00:02:27,700 Ce n’est que dans les années 1970, avec la crise pétrolière et 39 00:02:28,180 --> 00:02:29,880 la stagflation qui s’ensuit, 40 00:02:30,180 --> 00:02:35,140 l’accroissement démographique et l’utilisation de plus en 41 00:02:35,840 --> 00:02:40,740 plus importante de ressources naturelles par les pays riches, 42 00:02:41,180 --> 00:02:45,480 que la question environnementale ressurgit. 43 00:02:46,020 --> 00:02:49,960 Le rapport Meadows, "Les limites à la croissance", 44 00:02:50,280 --> 00:02:55,240 souligne en 1972 le risque de l’épuisement des ressources 45 00:02:55,600 --> 00:03:00,240 et devient un précurseur en termes de développement durable, 46 00:03:01,280 --> 00:03:06,240 mais il faut attendre 1987 et le rapport Brundtland pour 47 00:03:06,440 --> 00:03:10,040 que ce thème soit officiellement défini. 48 00:03:11,140 --> 00:03:14,640 Le développement durable c’est le développement qui 49 00:03:14,839 --> 00:03:19,140 répond aux besoins du présent sans compromettre la possibilité, 50 00:03:19,339 --> 00:03:24,020 pour les générations futures, de répondre à leurs propres besoins. 51 00:03:24,640 --> 00:03:27,800 Le développement durable comporte trois dimensions : 52 00:03:28,260 --> 00:03:32,640 une dimension économique, la croissance doit être durable ; 53 00:03:32,839 --> 00:03:37,600 une dimension environnementale, il faut préserver l’environnement ; 54 00:03:38,880 --> 00:03:43,100 une dimension sociale, il faut une juste répartition 55 00:03:43,299 --> 00:03:48,060 de la croissance entre les pays mais aussi au sein des pays. 56 00:03:49,280 --> 00:03:54,240 À cela, s’ajoutent des objectifs de développement durable, 57 00:03:54,440 --> 00:03:58,400 ODD, adoptés par l’ONU en 58 00:03:58,600 --> 00:04:03,360 2015 qui visent à concilier ces trois dimensions d’ici 2030. 59 00:04:04,760 --> 00:04:09,560 On peut aussi parler des limites planétaires qui sont 60 00:04:09,760 --> 00:04:14,520 définies par Rockström en 2009, qui montre qu’au-delà de 61 00:04:15,220 --> 00:04:18,440 certains seuils écologiques, comme le changement 62 00:04:18,640 --> 00:04:23,400 climatique ou la perte de biodiversité, l’équilibre de 63 00:04:23,740 --> 00:04:24,880 la terre est compromis. 64 00:04:25,520 --> 00:04:30,300 Il met alors en évidence neuf limites planétaires 65 00:04:30,500 --> 00:04:33,440 indispensables pour maintenir 66 00:04:33,640 --> 00:04:36,880 un espace opérationnel pour 67 00:04:37,080 --> 00:04:41,840 l’humanité. Si la définition 68 00:04:42,100 --> 00:04:45,160 du développement durable est unanimement reconnue, 69 00:04:45,360 --> 00:04:49,440 son application en économie engendre des orientations 70 00:04:49,640 --> 00:04:50,520 très différentes. 71 00:04:51,320 --> 00:04:56,280 En particulier, un clivage apparaît entre les tenants de 72 00:04:56,479 --> 00:05:01,239 la soutenabilité faible et les tenants de la soutenabilité forte. 73 00:05:02,320 --> 00:05:06,080 II. La soutenabilité faible. 74 00:05:07,520 --> 00:05:11,000 Ce concept est développé principalement par les 75 00:05:11,200 --> 00:05:12,740 économistes néoclassiques. 76 00:05:14,140 --> 00:05:18,640 Pour rappel, nous avions vu, avec Robert Solow et la 77 00:05:18,840 --> 00:05:22,180 nouvelle économie classique, qu’il est possible, sous un 78 00:05:22,380 --> 00:05:25,180 certain nombre de conditions, d’aboutir à une croissance 79 00:05:25,380 --> 00:05:29,820 économique durable, notamment, pour la nouvelle économie classique, 80 00:05:30,020 --> 00:05:33,620 si l’État fait les bons choix d’investissement, 81 00:05:34,860 --> 00:05:38,120 investissement en capital humain, investissement en recherche 82 00:05:38,320 --> 00:05:39,080 et développement. 83 00:05:39,280 --> 00:05:42,760 Progressivement, les 84 00:05:42,960 --> 00:05:46,280 économistes néoclassiques ont cherché à intégrer 85 00:05:46,479 --> 00:05:50,480 l’environnement dans leur modélisation. Ils traduisent 86 00:05:50,680 --> 00:05:53,980 l’objectif de croissance soutenable par la 87 00:05:54,180 --> 00:05:57,240 non-décroissance dans le temps du bien-être individuel 88 00:05:57,440 --> 00:06:00,060 qui est mesurée par le niveau 89 00:06:00,260 --> 00:06:04,840 d’utilité, le niveau de revenus ou de consommation 90 00:06:05,039 --> 00:06:06,700 des agents économiques. 91 00:06:07,640 --> 00:06:11,440 Le bien-être économique des générations futures doit être 92 00:06:11,640 --> 00:06:15,960 au minimum égal à celui des générations présentes. 93 00:06:16,620 --> 00:06:20,400 Pour ce faire, il faut transmettre, aux générations futures, 94 00:06:20,599 --> 00:06:24,440 une capacité de production de biens et services répondant à 95 00:06:24,640 --> 00:06:25,400 leurs besoins. 96 00:06:25,820 --> 00:06:29,840 La quantité totale de capital doit demeurer constante à 97 00:06:30,039 --> 00:06:31,100 travers le temps. 98 00:06:32,160 --> 00:06:36,180 Cependant, cela repose sur une hypothèse, si les 99 00:06:36,380 --> 00:06:41,140 différents types de capitaux, capital physique, capital humain, 100 00:06:41,820 --> 00:06:45,960 capital naturel et capital social, sont parfaitement 101 00:06:46,159 --> 00:06:47,600 substituables entre eux. 102 00:06:48,240 --> 00:06:52,760 L’idée est qu’un échange s’effectue dans le temps 103 00:06:52,960 --> 00:06:56,940 entre ces différents types de capitaux. La génération 104 00:06:57,140 --> 00:07:01,380 présente consomme certes du capital naturel, mais, 105 00:07:01,580 --> 00:07:05,920 en contrepartie, lègue aux générations futures davantage 106 00:07:06,120 --> 00:07:09,100 de capacité de production sous forme de stocks d’équipements, 107 00:07:09,300 --> 00:07:11,580 de connaissances et de compétences. 108 00:07:12,200 --> 00:07:17,159 Ce raisonnement constitue la conception faible de la soutenabilité. 109 00:07:18,740 --> 00:07:22,300 Dans cette logique, se développent les travaux de 110 00:07:22,500 --> 00:07:27,260 William Nordhaus, il a fait sa thèse avec Robert Solow et 111 00:07:27,460 --> 00:07:30,700 il obtient le prix Nobel d’économie en 2018 pour ses 112 00:07:30,900 --> 00:07:34,240 travaux qui intègrent le réchauffement climatique dans 113 00:07:34,440 --> 00:07:39,200 les modèles macroéconomiques de long terme, modèles qui 114 00:07:39,400 --> 00:07:40,740 sont d’inspiration néoclassique. 115 00:07:42,200 --> 00:07:45,700 William Nordhaus s’intéresse principalement aux effets de 116 00:07:45,900 --> 00:07:49,460 la concentration des gaz à effet de serre sur l’économie 117 00:07:49,659 --> 00:07:53,200 et à l’intégration, dans le modèle de croissance de Solow, 118 00:07:53,400 --> 00:07:54,660 du changement climatique. 119 00:07:55,400 --> 00:07:58,160 C’est ce qu’on appellera le modèle DICE, Dynamic 120 00:07:58,360 --> 00:08:00,240 Integrated Climate Economy. 121 00:08:02,380 --> 00:08:05,940 Il effectue une analyse coût-avantage. 122 00:08:07,220 --> 00:08:11,060 Il compare les dommages induits par le changement 123 00:08:11,260 --> 00:08:14,720 climatique et les coûts liés à la lutte contre le 124 00:08:14,920 --> 00:08:15,860 changement climatique. 125 00:08:17,040 --> 00:08:21,360 Parmi ses conclusions, il faudrait faire des efforts 126 00:08:21,560 --> 00:08:24,620 modestes à court terme pour réduire les émissions de gaz 127 00:08:24,820 --> 00:08:25,700 à effet de serre. 128 00:08:26,740 --> 00:08:30,820 Réduire le changement climatique à 3 degrés coûte 129 00:08:31,020 --> 00:08:33,620 plus cher en termes de croissance que ses dommages. 130 00:08:34,340 --> 00:08:39,039 Au contraire, la croissance de l’économie engendre de la richesse. 131 00:08:39,240 --> 00:08:43,280 Le progrès technique permettra de faire face au 132 00:08:43,480 --> 00:08:44,460 changement climatique. 133 00:08:44,740 --> 00:08:46,640 Voilà l’ensemble de ses conclusions. 134 00:08:47,380 --> 00:08:51,020 Il faut bien dire que ses conclusions font aujourd’hui 135 00:08:51,220 --> 00:08:55,760 l’objet de très nombreuses critiques, notamment par des économistes de renom, 136 00:08:55,960 --> 00:08:57,220 comme Joseph Stiglitz. 137 00:08:58,040 --> 00:09:01,520 Ils estiment qu’il y a de très fortes incertitudes sur 138 00:09:01,720 --> 00:09:06,380 les nombreux paramètres du modèle utilisé par William Nordhaus. 139 00:09:07,540 --> 00:09:10,060 Du coup, ce modèle serait peu fiable. 140 00:09:11,460 --> 00:09:15,380 En plus, il sous-évaluerait très fortement les risques à 141 00:09:15,580 --> 00:09:16,340 long terme. 142 00:09:18,200 --> 00:09:22,340 Voyons à présent la thèse de 143 00:09:22,540 --> 00:09:24,560 la soutenabilité forte. 144 00:09:26,120 --> 00:09:30,760 À côté de la soutenabilité faible, d’autres économistes à 145 00:09:30,960 --> 00:09:34,180 orientation plus écologique développent l’idée que le 146 00:09:34,380 --> 00:09:36,640 capital créé par les hommes n’est pas parfaitement 147 00:09:36,840 --> 00:09:39,440 substituable au capital naturel. 148 00:09:40,180 --> 00:09:43,720 Le plus souvent, ces capitaux sont complémentaires. 149 00:09:44,680 --> 00:09:48,520 Ils pensent qu’il est nécessaire de maintenir, 150 00:09:48,720 --> 00:09:51,700 à travers le temps, un certain stock de capital 151 00:09:51,900 --> 00:09:56,260 naturel critique dont les générations futures ne 152 00:09:56,460 --> 00:09:57,220 sauraient se passer. 153 00:09:57,860 --> 00:10:01,640 C’est sur cette conception que repose la thèse de la 154 00:10:01,840 --> 00:10:03,360 substituabilité forte. 155 00:10:05,020 --> 00:10:08,960 Dans ce cadre, il faut adopter des règles de 156 00:10:09,160 --> 00:10:10,300 prudence a minima. 157 00:10:11,020 --> 00:10:14,160 Les taux d’exploitation des ressources naturelles 158 00:10:14,360 --> 00:10:18,760 renouvelables devraient être égaux à leur taux de régénération. 159 00:10:18,960 --> 00:10:22,700 Les taux d’émission des déchets devraient 160 00:10:22,900 --> 00:10:26,020 correspondre aux capacités d’assimilation et de 161 00:10:26,220 --> 00:10:29,260 recyclage des milieux dans lesquels ils sont rejetés. 162 00:10:30,140 --> 00:10:34,080 L’exploitation des ressources naturelles non renouvelables 163 00:10:34,280 --> 00:10:37,220 devrait se faire à un rythme égal à celui de leur 164 00:10:37,420 --> 00:10:40,440 substitution par des ressources renouvelables. 165 00:10:42,040 --> 00:10:45,140 Une modélisation très connue de ces idées est donnée par 166 00:10:45,340 --> 00:10:46,140 l’équation de Kaya. 167 00:10:46,580 --> 00:10:50,000 L’économiste japonais Kaya propose cette équation en 168 00:10:50,200 --> 00:10:54,960 1993 dans son ouvrage Environment, Energy and Economy. 169 00:10:55,700 --> 00:10:59,740 Il montre comment essayer de réduire les émissions de gaz 170 00:10:59,940 --> 00:11:00,740 à effet de serre. 171 00:11:02,420 --> 00:11:07,000 Cela peut essayer de se modéliser par une formule 172 00:11:07,200 --> 00:11:07,960 extrêmement simple. 173 00:11:08,600 --> 00:11:12,360 Cette formule permet de comprendre les liens entre 174 00:11:12,560 --> 00:11:17,020 climat et économie et elle sert à mieux définir les 175 00:11:17,220 --> 00:11:18,920 politiques climatiques à mettre en place. 176 00:11:21,000 --> 00:11:25,960 On part de l’égalité gaz à effet de serre égal gaz à 177 00:11:26,160 --> 00:11:26,920 effet de serre. 178 00:11:27,800 --> 00:11:32,180 On multiplie ou on divise gaz à effet de serre à droite par TEP, 179 00:11:32,380 --> 00:11:34,600 c’est-à-dire la tonne équivalent pétrole. 180 00:11:36,060 --> 00:11:39,520 Donc, on a gaz à effet de serre égale gaz à effet de 181 00:11:39,720 --> 00:11:44,480 serre fois TEP sur TEP, puis je multiplie et je 182 00:11:44,680 --> 00:11:48,960 divise cette équation par le PIB, puis je multiplie et je 183 00:11:49,160 --> 00:11:52,320 divise cette équation par la population. C’est ainsi que 184 00:11:52,520 --> 00:11:55,020 j’obtiens la fameuse équation 185 00:11:55,220 --> 00:11:58,100 de Kaya qui apparaît ci-dessous. 186 00:12:00,500 --> 00:12:02,230 Que signifie cette équation ? 187 00:12:04,000 --> 00:12:08,740 Cette équation permet de montrer que la quantité de 188 00:12:08,940 --> 00:12:11,020 gaz à effet de serre dépend 189 00:12:11,220 --> 00:12:15,020 de la population, POP, 190 00:12:15,260 --> 00:12:19,740 de la richesse de cette population, la richesse par tête de cette 191 00:12:19,940 --> 00:12:24,700 population, PIB sur POP, de l’énergie nécessaire pour 192 00:12:24,920 --> 00:12:27,680 produire une unité de PIB, 193 00:12:28,820 --> 00:12:33,780 TEP sur TEP sur PIB, et du gaz à effet de serre 194 00:12:34,160 --> 00:12:39,120 dégagé par cette énergie, gaz à effet de serre divisé par TEP. 195 00:12:39,780 --> 00:12:43,420 Cette équation simple permet d’effectuer un calcul simple. 196 00:12:44,720 --> 00:12:48,400 Si je veux réduire le réchauffement climatique à 2 197 00:12:48,600 --> 00:12:51,280 degrés d’ici 2050 et diviser 198 00:12:51,480 --> 00:12:56,220 par trois les gaz à effet de serre, que dois-je faire ? 199 00:12:57,460 --> 00:13:00,760 Comme la population va augmenter, ainsi que le PIB par habitant, 200 00:13:01,000 --> 00:13:04,320 on ne peut agir que sur les deux premiers facteurs. 201 00:13:04,600 --> 00:13:08,260 En d’autres termes, il faut diviser par 10 les deux 202 00:13:08,460 --> 00:13:12,200 premiers facteurs, ce qui signifie réduire l’énergie 203 00:13:12,400 --> 00:13:17,160 nécessaire pour produire et les gaz à effet de serre qui 204 00:13:17,360 --> 00:13:18,120 en découlent. 205 00:13:19,820 --> 00:13:22,280 IV. Les termes du débat. 206 00:13:24,420 --> 00:13:27,600 Le clivage substituabilité 207 00:13:27,800 --> 00:13:32,100 faible et forte souligne les divergences de conception 208 00:13:32,300 --> 00:13:33,460 entre les économistes. 209 00:13:34,560 --> 00:13:37,900 Les tenants de l’économie standard à orientation 210 00:13:38,100 --> 00:13:41,480 néoclassique considèrent l’environnement comme un bien 211 00:13:41,680 --> 00:13:45,760 économique qu’ils essaient d’intégrer au modèle traditionnel. 212 00:13:46,480 --> 00:13:49,860 C’est le cas du modèle de Nordhaus, mais aussi d’autres études 213 00:13:50,060 --> 00:13:53,620 qui montrent par exemple que la pollution constitue une 214 00:13:53,820 --> 00:13:57,820 externalité négative qu’il faut internaliser au moyen de 215 00:13:58,020 --> 00:14:00,900 taxes à faire payer pour les entreprises polluantes. 216 00:14:01,440 --> 00:14:03,880 D’autres études soulignent que les biens 217 00:14:04,080 --> 00:14:08,680 environnementaux sont des biens communs qui sont surutilisés. 218 00:14:10,440 --> 00:14:15,300 On peut essayer de les privatiser ou de mettre en 219 00:14:15,500 --> 00:14:19,720 place des droits d’utilisation, comme le marché des droits à 220 00:14:19,920 --> 00:14:23,020 polluer qui a été mis en place par le protocole de 221 00:14:23,220 --> 00:14:24,440 Kyoto en 1995. 222 00:14:26,540 --> 00:14:29,560 Au contraire, les économistes à orientation davantage 223 00:14:29,760 --> 00:14:32,620 écologique soulignent qu’il n’est pas possible 224 00:14:32,820 --> 00:14:36,100 d’effectuer un raisonnement purement économique sans 225 00:14:36,300 --> 00:14:41,020 tenir compte des aspects physiques, chimiques et biologiques de 226 00:14:41,220 --> 00:14:41,980 la question. 227 00:14:42,700 --> 00:14:45,260 Cette orientation conduit à des conclusions beaucoup plus 228 00:14:45,460 --> 00:14:47,080 radicales que la première approche. 229 00:14:47,680 --> 00:14:52,640 Il apparaît que les seuls mécanismes de marché peuvent 230 00:14:52,840 --> 00:14:57,420 difficilement préserver le capital naturel qui ne peut 231 00:14:57,620 --> 00:14:58,580 être remplacé. 232 00:14:59,160 --> 00:15:01,100 L’État doit donc intervenir. 233 00:15:01,560 --> 00:15:06,380 Des politiques concrètes de soutenabilité forte incluent 234 00:15:06,580 --> 00:15:09,960 la transition vers les énergies renouvelables ou des 235 00:15:10,160 --> 00:15:12,600 quotas d’exploitation des ressources naturelles. 236 00:15:15,020 --> 00:15:17,740 Même cela risque de ne pas suffire, 237 00:15:17,940 --> 00:15:22,700 même si on a d’importantes innovations qui apparaissent. 238 00:15:24,200 --> 00:15:28,140 Le développement durable pourrait alors devenir impossible. 239 00:15:29,220 --> 00:15:33,040 Il faudrait peut-être davantage se tourner vers une 240 00:15:33,240 --> 00:15:37,700 décroissance soutenable avec une révision radicale de nos 241 00:15:37,900 --> 00:15:42,460 modes de consommation et de production. Le débat soulève 242 00:15:42,660 --> 00:15:44,000 aussi des questions géopolitiques. 243 00:15:44,200 --> 00:15:47,620 Comment concilier les besoins des pays en développement 244 00:15:47,820 --> 00:15:51,280 avec l’urgence climatique imposée aux pays riches ? 245 00:15:51,480 --> 00:15:55,380 Une avancée majeure a été obtenue à la COP 27 en Égypte 246 00:15:55,580 --> 00:15:58,700 avec la création d’un fonds pertes et dommages pour 247 00:15:58,900 --> 00:16:01,380 indemniser les pays en voie de développement des impacts 248 00:16:01,580 --> 00:16:04,660 climatiques auxquels ils ne peuvent s’adapter, 249 00:16:05,040 --> 00:16:08,100 catastrophes naturelles, élévation du niveau de la mer, 250 00:16:08,940 --> 00:16:11,880 dont les pays riches polluants sont indirectement 251 00:16:12,080 --> 00:16:14,600 responsables. Cependant, 252 00:16:14,800 --> 00:16:18,220 les modalités de financement restent à définir et 253 00:16:18,420 --> 00:16:22,140 l’objectif des 100 milliards de dollars par an que les 254 00:16:22,340 --> 00:16:25,160 pays en développement cherchent à obtenir est loin 255 00:16:25,360 --> 00:16:26,200 d’être atteint. 256 00:16:28,640 --> 00:16:33,420 En conclusion, les premiers penseurs en économie avaient 257 00:16:33,620 --> 00:16:36,380 intégré la dimension environnementale à leurs études. 258 00:16:37,060 --> 00:16:41,860 Cependant, avec la révolution industrielle et les croyances 259 00:16:42,060 --> 00:16:46,640 dans une croissance soutenue, l’environnement n’intéresse 260 00:16:46,840 --> 00:16:49,060 plus guère les économistes pendant de longues années. 261 00:16:49,920 --> 00:16:54,880 Il faut attendre la crise des années 70 pour que, progressivement, 262 00:16:55,080 --> 00:16:59,020 les modèles économiques intègrent l’environnement, 263 00:16:59,220 --> 00:17:03,900 faisant apparaître des divergences de conception 264 00:17:04,099 --> 00:17:08,160 entre les économistes à orientation néoclassique qui 265 00:17:08,360 --> 00:17:12,380 développent le concept de soutenabilité faible et ceux 266 00:17:12,580 --> 00:17:15,180 davantage écologiques dont les travaux reposent sur la 267 00:17:15,380 --> 00:17:16,900 notion de soutenabilité forte. 268 00:17:17,740 --> 00:17:20,440 Pour ces derniers, le développement durable 269 00:17:20,640 --> 00:17:24,700 pourrait devenir impossible et il faudrait davantage se 270 00:17:24,900 --> 00:17:29,660 tourner vers une décroissance soutenable. Ainsi, une 271 00:17:30,120 --> 00:17:33,920 question qu’on peut être amené à se poser pour notre avenir, 272 00:17:34,120 --> 00:17:37,640 est de savoir si la transition énergétique et le 273 00:17:37,840 --> 00:17:41,840 progrès technique seront suffisants ou s’il faut 274 00:17:42,040 --> 00:17:46,040 repenser profondément l’entièreté de notre modèle 275 00:17:46,240 --> 00:17:50,740 économique pour assurer la survie des générations futures. 276 00:17:51,800 --> 00:17:53,060 Merci de votre attention.