1 00:00:05,380 --> 00:00:09,400 Voyons, après les principes qui régissent l’attribution des compétences 2 00:00:09,600 --> 00:00:14,110 de police, les principes qui régissent l’exercice de ces compétences par 3 00:00:14,310 --> 00:00:16,180 les autorités qui en sont investies. 4 00:00:16,380 --> 00:00:17,140 B. 5 00:00:17,410 --> 00:00:20,260 Les principes d’exercice des compétences. 6 00:00:20,950 --> 00:00:23,770 Il y a deux grands principes sur lesquels je voudrais revenir, 7 00:00:23,970 --> 00:00:28,180 deux grands principes qui gouvernent l’exercice des compétences de police. 8 00:00:28,380 --> 00:00:32,620 D’une part, les autorités de police doivent mettre en œuvre leur 9 00:00:32,820 --> 00:00:36,820 compétence, et d’autre part, les autorités de police doivent 10 00:00:37,020 --> 00:00:40,810 mettre en œuvre leurs compétences sans porter atteinte aux libertés 11 00:00:41,010 --> 00:00:45,970 des administrés, en tout cas porter des atteintes les moins importantes 12 00:00:46,170 --> 00:00:50,490 possibles pour ce qui est nécessaire pour atteindre leur but. 13 00:00:50,690 --> 00:00:53,620 Je reviendrai sur cet élément dans la prochaine vidéo. 14 00:00:53,820 --> 00:00:59,380 D’abord, voyons dans cette vidéo l’obligation des autorités de police 15 00:00:59,580 --> 00:01:01,530 de mettre en œuvre leurs compétences. 16 00:01:01,730 --> 00:01:02,490 1. 17 00:01:03,010 --> 00:01:05,110 Une compétence obligatoire. 18 00:01:05,310 --> 00:01:09,430 L’une des missions essentielles de l’administration, c’est d’assurer 19 00:01:10,240 --> 00:01:12,390 la sauvegarde de l’ordre public. 20 00:01:12,590 --> 00:01:14,260 Cette mission est une obligation. 21 00:01:14,460 --> 00:01:18,130 C’est une charge qui pèse sur les autorités administratives. 22 00:01:18,610 --> 00:01:23,380 Toute loi qui investit un organe d’un pouvoir de police lui impose 23 00:01:23,580 --> 00:01:26,830 corrélativement d’en faire usage lorsque cela est nécessaire, 24 00:01:27,030 --> 00:01:27,790 bien évidemment. 25 00:01:27,990 --> 00:01:31,120 C’est par exemple le cas de l’article L. 26 00:01:31,320 --> 00:01:36,760 2212-1 du CGCT, dont je vous ai déjà parlé, le maire est chargé 27 00:01:36,960 --> 00:01:38,080 de la police municipale. 28 00:01:38,920 --> 00:01:42,400 Il en va de même d’ailleurs en matière de police spéciale. 29 00:01:42,670 --> 00:01:47,350 Si un pouvoir de police est confié à l’administration par le législateur, 30 00:01:47,550 --> 00:01:50,350 c’est qu’il est nécessaire, ce pouvoir de police, 31 00:01:50,550 --> 00:01:53,680 à la sauvegarde de l’ordre public, donc l’administration doit le mettre 32 00:01:53,880 --> 00:01:54,640 en œuvre. 33 00:01:54,840 --> 00:01:59,020 Mais pour qu’il y ait véritablement une obligation, il faut qu’il y 34 00:01:59,220 --> 00:01:59,980 ait une sanction. 35 00:02:00,180 --> 00:02:07,420 Voyons surtout les sanctions de cette obligation d’exercer les 36 00:02:07,620 --> 00:02:08,680 compétences de police. 37 00:02:10,450 --> 00:02:11,280 Nous en verrons trois. 38 00:02:11,480 --> 00:02:15,370 Première sanction : l’intervention du supérieur hiérarchique. 39 00:02:16,300 --> 00:02:20,230 En matière de police administrative générale, le maire est en principe 40 00:02:20,430 --> 00:02:25,060 compétent, je vous en ai déjà parlé, mais le maire exerce cette mission 41 00:02:25,260 --> 00:02:28,870 de police sous le contrôle du préfet, je vous en ai parlé aussi et je 42 00:02:29,070 --> 00:02:31,780 vous ai parlé également de l’article L. 43 00:02:31,980 --> 00:02:37,570 2215-1 du CGCT qui prévoit que le préfet, je cite, "peut prendre 44 00:02:37,770 --> 00:02:40,840 pour toutes les communes du département ou plusieurs d’entre elles, 45 00:02:41,350 --> 00:02:44,920 et dans tous les cas où il n’y aurait pas été pourvu par les autorités 46 00:02:45,120 --> 00:02:49,210 municipales, toutes les mesures relatives au maintien de la salubrité, 47 00:02:49,410 --> 00:02:52,060 de la sûreté et de la tranquillité publique". 48 00:02:52,260 --> 00:02:59,260 J’insiste ici sur le passage suivant : "Dans tous les cas où il n’y aurait 49 00:02:59,460 --> 00:03:01,930 pas été pourvu par les autorités municipales". 50 00:03:02,130 --> 00:03:07,000 Autrement dit, le préfet dispose d’un pouvoir de substitution en 51 00:03:07,200 --> 00:03:11,650 cas de carence du maire, c’est-à-dire lorsque le maire n’exerce 52 00:03:11,850 --> 00:03:15,220 pas le pouvoir de police dont il est pourtant investi. 53 00:03:15,420 --> 00:03:20,550 C’est donc un pouvoir de substitution qui est conditionné, 54 00:03:20,850 --> 00:03:24,720 conditionné d’abord à l’existence d’une carence, le préfet ne peut 55 00:03:24,920 --> 00:03:29,550 pas agir à la place du maire sans que le maire n’ait commis une carence. 56 00:03:29,750 --> 00:03:35,070 Deuxièmement, une condition est fixée à l’exercice de ce pouvoir 57 00:03:35,270 --> 00:03:39,450 de substitution, la mise en demeure préalable du maire. 58 00:03:40,650 --> 00:03:48,030 Le préfet ne peut se substituer au maire que s’il a demandé au 59 00:03:48,230 --> 00:03:54,240 maire d’intervenir, de prendre les mesures que requièrent les 60 00:03:54,440 --> 00:03:55,200 circonstances. 61 00:03:55,400 --> 00:04:01,260 Ce n’est que si le maire ne défère pas à l’obligation que lui rappelle 62 00:04:04,620 --> 00:04:08,670 le préfet, que ce dernier, le préfet, peut se substituer au maire. 63 00:04:09,510 --> 00:04:14,280 Le préfet doit mettre en demeure le maire d’intervenir par un courrier. 64 00:04:14,910 --> 00:04:21,690 Il doit lui donner un délai dans lequel il doit agir et rappeler 65 00:04:21,890 --> 00:04:29,820 au maire que s’il ne respecte pas le délai indiqué, il pourra se 66 00:04:30,020 --> 00:04:30,990 substituer à lui. 67 00:04:32,160 --> 00:04:33,570 Il existe des cas particuliers. 68 00:04:34,350 --> 00:04:39,000 Il existe des cas d’urgence particuliers dans lesquels le préfet 69 00:04:39,200 --> 00:04:43,020 n’a pas besoin de mettre en demeure le maire d’agir. 70 00:04:43,950 --> 00:04:47,950 En cas de situation d’urgence, en cas de péril imminent, 71 00:04:48,150 --> 00:04:51,000 le préfet peut se substituer immédiatement au maire, 72 00:04:51,270 --> 00:04:56,400 agir à sa place pour remédier à 73 00:04:56,600 --> 00:04:57,720 un trouble à l’ordre public. 74 00:04:58,890 --> 00:05:03,720 Cela a notamment été indiqué par le Conseil d’État dans une décision 75 00:05:03,920 --> 00:05:07,710 du 25 novembre 1994, ministre de l’Intérieur et de 76 00:05:07,910 --> 00:05:10,650 l’aménagement du territoire contre Grégoire. 77 00:05:10,980 --> 00:05:14,460 En l’espèce, le préfet des Vosges avait prononcé la fermeture d’une 78 00:05:14,660 --> 00:05:17,320 boucherie charcuterie pour des raisons sanitaires. 79 00:05:17,520 --> 00:05:21,520 Il y avait des souches de listériose dans des produits. 80 00:05:21,960 --> 00:05:26,610 Le préfet s’était immédiatement substitué au maire sans le mettre 81 00:05:26,810 --> 00:05:30,510 en demeure d’intervenir car en l’espèce, il y avait une situation 82 00:05:30,710 --> 00:05:34,740 d’urgence qui justifiait une intervention rapide des services 83 00:05:34,940 --> 00:05:35,700 de l’État. 84 00:05:35,900 --> 00:05:40,010 C’était la première sanction au sens le plus large, c’est-à-dire 85 00:05:41,000 --> 00:05:44,090 mécanisme qui permet de s’assurer du respect d’une obligation. 86 00:05:44,290 --> 00:05:50,750 C’était la première sanction de l’obligation d’utiliser les compétences 87 00:05:50,950 --> 00:05:51,710 de police. 88 00:05:51,920 --> 00:05:58,340 Deuxième sanction : l’intervention du juge, juge qui peut annuler 89 00:05:58,540 --> 00:06:03,620 le refus d’intervenir d’une autorité administrative et qui peut prononcer 90 00:06:03,820 --> 00:06:09,560 une injonction à son encontre, à son endroit, une injonction à 91 00:06:09,760 --> 00:06:10,550 prendre des mesures. 92 00:06:11,450 --> 00:06:13,400 Je vous expose rapidement le cas. 93 00:06:14,120 --> 00:06:19,220 Imaginons qu’un administré estime que l’ordre public est menacé pour 94 00:06:19,420 --> 00:06:22,760 une raison ou une autre ou que l’ordre public est rompu pour une 95 00:06:22,960 --> 00:06:26,120 raison ou une autre, il peut demander à une autorité 96 00:06:26,320 --> 00:06:34,490 de police qu’elle devrait prendre 97 00:06:34,690 --> 00:06:39,200 les mesures nécessaires pour éviter ou faire cesser le trouble à l’ordre 98 00:06:39,400 --> 00:06:42,170 public que cet administré a constaté. 99 00:06:43,520 --> 00:06:48,920 Si l’autorité de police refuse d’agir ou ne répond pas, 100 00:06:49,120 --> 00:06:51,320 ce qui vaut refus d’agir, nous en parlerons plus loin, 101 00:06:51,980 --> 00:06:55,730 si l’autorité de police refuse d’agir ou n’agit pas, 102 00:06:56,600 --> 00:07:02,210 le justiciable peut saisir le juge pour qu’il annule la décision de 103 00:07:02,410 --> 00:07:03,170 non-intervention. 104 00:07:05,150 --> 00:07:12,140 Si le juge est saisi, celui-ci pourra annuler le refus 105 00:07:12,340 --> 00:07:16,520 d’agir et il pourra même éventuellement prendre une décision particulière 106 00:07:16,720 --> 00:07:19,910 que l’on appelle une décision d’injonction, c’est-à-dire que 107 00:07:20,110 --> 00:07:24,740 pour assurer l’exécution de sa décision qui découle de l’illégalité, 108 00:07:24,940 --> 00:07:28,430 du refus d’agir de l’administration, du refus d’utiliser des pouvoirs 109 00:07:28,630 --> 00:07:34,760 de police dont l’administration est investie, pour s’assurer de 110 00:07:34,960 --> 00:07:38,420 l’exécution de cette décision, l’administration doit agir. 111 00:07:38,620 --> 00:07:42,860 Elle doit prendre une mesure pour éviter la survenance d’un trouble 112 00:07:43,060 --> 00:07:47,330 à l’ordre public ou pour remédier à la survenance d’un trouble à 113 00:07:47,530 --> 00:07:48,290 l’ordre public. 114 00:07:49,370 --> 00:07:54,620 Je résume, le juge pourra considérer l’inaction de l’administration, 115 00:07:54,820 --> 00:08:00,200 la carence de l’administration comme illégale et prononcer envers 116 00:08:00,400 --> 00:08:05,480 l’administration une injonction, c’est-à-dire que le juge peut lui 117 00:08:05,680 --> 00:08:10,460 ordonner d’agir, peut lui ordonner de prendre une mesure de police. 118 00:08:11,420 --> 00:08:15,590 Ce principe, c’est-à-dire l’obligation d’agir de l’administration qui 119 00:08:15,790 --> 00:08:19,430 entraîne l’illégalité de son refus d’agir en cas de trouble à l’ordre 120 00:08:19,630 --> 00:08:22,490 public, cette règle est très ancienne. 121 00:08:22,820 --> 00:08:28,970 Elle découle d’une décision Sieur Doublet du Conseil d’État que celui-ci 122 00:08:29,170 --> 00:08:32,480 a rendu le 23 octobre 1959. 123 00:08:32,960 --> 00:08:36,890 Je cite cette décision : "Le refus opposé par un maire à 124 00:08:37,090 --> 00:08:40,760 une demande tendant à ce qu’il fasse usage des pouvoirs de police 125 00:08:40,960 --> 00:08:47,210 à lui conférés par la loi de 1884 n’est entaché d’illégalité que 126 00:08:47,410 --> 00:08:51,890 dans le cas où, à raison de la gravité du péril résultant d’une 127 00:08:52,090 --> 00:08:55,640 situation particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité 128 00:08:55,840 --> 00:09:00,410 ou la salubrité, cette autorité » – le maire en l’occurrence – "en 129 00:09:00,610 --> 00:09:04,220 n’ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser 130 00:09:04,420 --> 00:09:07,250 ce péril grave, méconnaît ses obligations légales". 131 00:09:07,450 --> 00:09:11,840 Je conviens que cette formulation est un peu compliquée, 132 00:09:12,040 --> 00:09:12,890 alors reprenons-la. 133 00:09:14,270 --> 00:09:15,680 Deux remarques sur ce point. 134 00:09:15,880 --> 00:09:20,780 Premièrement, le Conseil d’État précise bien qu’il y a une obligation 135 00:09:20,980 --> 00:09:21,740 d’agir. 136 00:09:21,940 --> 00:09:27,830 Le maire doit prendre des mesures de police si la sauvegarde de l’ordre 137 00:09:28,030 --> 00:09:29,510 public le requiert. 138 00:09:30,350 --> 00:09:34,970 Le Conseil d’État le précise bien, "méconnaît ses obligations légales", 139 00:09:35,170 --> 00:09:39,800 le maire qui ne prend pas une mesure de police lorsque cela est nécessaire. 140 00:09:40,000 --> 00:09:42,020 C’était la première remarque. 141 00:09:42,220 --> 00:09:43,850 Il existe bien une obligation d’agir. 142 00:09:44,050 --> 00:09:49,940 Deuxièmement, le manquement à cette obligation d’agir n’est pas toujours 143 00:09:50,140 --> 00:09:50,900 illégal. 144 00:09:51,100 --> 00:09:56,390 Pour qu’il soit illégal, le Conseil d’État exige qu’il y 145 00:09:56,590 --> 00:10:02,180 ait en l’espèce un, je cite, "péril grave résultant d’une situation 146 00:10:02,380 --> 00:10:05,390 particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la 147 00:10:05,590 --> 00:10:06,350 salubrité publique". 148 00:10:06,550 --> 00:10:10,310 Autrement dit, s’il existe un risque de trouble à l’ordre public, 149 00:10:11,270 --> 00:10:16,160 il faut que ce trouble soit d’une particulière gravité pour que le 150 00:10:16,360 --> 00:10:20,960 maire ou une autorité de police en général soit tenu d’agir, 151 00:10:21,160 --> 00:10:27,400 pour que le refus d’agir soit illégal. 152 00:10:27,640 --> 00:10:32,830 Je répète, il faut nécessairement que le trouble à l’ordre public 153 00:10:33,030 --> 00:10:36,970 soit particulièrement grave pour que le refus d’agir de l’autorité 154 00:10:37,170 --> 00:10:39,430 administrative soit considéré comme illégal. 155 00:10:40,510 --> 00:10:45,250 En l’espèce, il s’agissait de Monsieur Doublet qui demandait au maire 156 00:10:45,450 --> 00:10:49,060 de Saint-Jean-de-Monts de prendre une mesure contre le camping et 157 00:10:49,260 --> 00:10:53,560 en l’espèce, le Conseil d’État a jugé que le maire de la commune 158 00:10:53,760 --> 00:10:57,130 n’avait pas commis d’illégalité en refusant d’intervenir car il 159 00:10:57,330 --> 00:10:59,560 n’y avait pas de danger d’une particulière gravité. 160 00:11:00,460 --> 00:11:03,730 Mais la rigueur de l’arrêt Doublet, c’est-à-dire la rigueur vis-à-vis 161 00:11:04,090 --> 00:11:07,270 des justiciables, de ceux qui demandent à l’administration d’intervenir, 162 00:11:07,470 --> 00:11:11,410 la rigueur de cet arrêt Doublet a progressivement été atténuée. 163 00:11:12,100 --> 00:11:17,860 Je citerai en particulier un arrêt Texerot rendu par le Conseil d’État 164 00:11:18,060 --> 00:11:20,410 le 7 juin 1989. 165 00:11:21,250 --> 00:11:25,060 En l’occurrence, le Conseil d’État a jugé que le maire devait intervenir, 166 00:11:25,990 --> 00:11:31,000 je cite, "même si la situation dénoncée par le requérant ne comportait 167 00:11:31,200 --> 00:11:33,310 aucun péril grave pour le bon ordre". 168 00:11:33,510 --> 00:11:37,000 Ici, les choses sont très claires, le e Conseil d’État revient sur 169 00:11:37,200 --> 00:11:38,230 sa jurisprudence Doublet. 170 00:11:38,430 --> 00:11:42,130 Il n’est pas nécessaire qu’il y ait un trouble d’une particulière 171 00:11:42,330 --> 00:11:45,010 gravité pour que l’administration soit tenue d’agir. 172 00:11:45,850 --> 00:11:50,260 Le refus d’intervenir de l’administration est illégal dès 173 00:11:50,460 --> 00:11:53,470 lors qu’il y a un risque de trouble à l’ordre public qui nécessite 174 00:11:53,670 --> 00:11:55,750 l’intervention de l’administration. 175 00:11:57,100 --> 00:12:02,200 Une fois que le juge a annulé le refus d’intervention de 176 00:12:02,400 --> 00:12:05,950 l’administration, il peut prononcer une injonction et éventuellement 177 00:12:06,150 --> 00:12:09,670 même prononcer une astreinte, c’est-à-dire qu’il peut demander 178 00:12:09,870 --> 00:12:12,040 à l’administration d’agir, c’est une injonction, 179 00:12:12,280 --> 00:12:19,480 et lui ordonner de payer des pénalités 180 00:12:19,680 --> 00:12:25,360 par jour de retard, c’est-à-dire par jour de non-intervention contre 181 00:12:25,560 --> 00:12:26,680 le trouble à l’ordre public. 182 00:12:28,150 --> 00:12:31,780 En plus de cela, toujours dans ce domaine du refus d’agir qui 183 00:12:31,980 --> 00:12:35,380 serait contesté devant le juge, ce refus d’agir peut également 184 00:12:35,580 --> 00:12:40,510 être contesté devant le juge du référé, c’est-à-dire qu’il peut être contesté 185 00:12:40,710 --> 00:12:41,470 en urgence. 186 00:12:41,670 --> 00:12:46,540 Si le justiciable estime que la situation requiert une intervention 187 00:12:46,740 --> 00:12:52,390 rapide de l’administration, l’administré peut éventuellement 188 00:12:52,590 --> 00:12:57,880 saisir le juge d’un référé-suspension en référé, suspension de la décision 189 00:12:58,080 --> 00:13:01,090 de refus d’agir de l’administration, mais l’administré peut aussi avoir 190 00:13:01,290 --> 00:13:07,300 recours à un référé très efficace, le référé-liberté dont je parlerai 191 00:13:07,660 --> 00:13:11,750 bien plus loin dans le cours, référé-liberté prévu à l’article L. 192 00:13:11,950 --> 00:13:16,570 521-2 du Code de justice administrative, sur lequel le juge 193 00:13:16,770 --> 00:13:18,880 doit se prononcer dans les 48 heures, c’est-à-dire rapidement. 194 00:13:19,080 --> 00:13:24,550 Ce référé-liberté ne peut être 195 00:13:24,750 --> 00:13:30,670 utilisé cependant que si l’inaction de l’administration met en danger 196 00:13:30,880 --> 00:13:34,420 une liberté fondamentale, liberté qui peut être liée par 197 00:13:34,620 --> 00:13:42,160 exemple au droit à la vie ou au droit de propriété si un bien risque 198 00:13:42,400 --> 00:13:48,250 d’être détruit en raison de l’inaction de l’administration qui a refusé 199 00:13:48,450 --> 00:13:49,570 d’adopter une mesure de police. 200 00:13:50,740 --> 00:13:54,490 Je donne rapidement un petit exemple de l’utilisation du référé-liberté. 201 00:13:56,080 --> 00:14:01,940 Ordonnance du Conseil d’État le 16 novembre 2011 Ville de Paris. 202 00:14:02,140 --> 00:14:07,600 En l’espèce, il s’agissait de la société H&M qui demandait au juge 203 00:14:07,800 --> 00:14:13,930 d’ordonner à la Ville de Paris, en urgence, d’ordonner la suspension 204 00:14:14,620 --> 00:14:21,160 des travaux de démolition de la dalle du Forum des Halles car un 205 00:14:21,550 --> 00:14:24,970 accident, au cours de ces travaux, avait entraîné la chute du bloc 206 00:14:25,170 --> 00:14:27,250 de béton à l’intérieur du magasin. 207 00:14:27,450 --> 00:14:31,720 Pour des raisons de sécurité, la société H&M avait demandé au 208 00:14:31,920 --> 00:14:37,300 juge d’ordonner au maire d’ordonner la suspension des travaux afin 209 00:14:37,500 --> 00:14:43,630 d’éviter que plus de dégâts ne 210 00:14:43,830 --> 00:14:44,590 soient causés. 211 00:14:46,990 --> 00:14:51,790 Pour l’histoire, le référé de la société H&M a été rejeté, 212 00:14:51,990 --> 00:14:55,480 le Conseil d’État estimant que l’intervention de l’administration 213 00:14:55,680 --> 00:14:56,440 n’était pas nécessaire. 214 00:14:57,910 --> 00:15:02,320 Troisième type de sanctions à l’encontre de l’administration 215 00:15:02,520 --> 00:15:07,090 qui commettrait une carence, qui n’utiliserait pas ses pouvoirs 216 00:15:07,290 --> 00:15:10,180 de police alors qu’elle le devrait, ce serait l’engagement de sa 217 00:15:10,380 --> 00:15:11,140 responsabilité. 218 00:15:11,800 --> 00:15:15,760 Nous verrons là aussi la responsabilité de l’administration plus loin dans 219 00:15:15,960 --> 00:15:16,720 le cours. 220 00:15:16,920 --> 00:15:21,370 Sachez pour l’instant que lorsque l’administration commet une faute 221 00:15:21,570 --> 00:15:28,240 qui cause un préjudice à un administré, l’administration doit indemniser 222 00:15:28,440 --> 00:15:29,410 l’administré. 223 00:15:29,770 --> 00:15:34,030 Elle doit lui verser pour l’essentiel des dommages-intérêts. 224 00:15:37,150 --> 00:15:39,900 Pour ce qui nous intéresse, c’est-à-dire en matière d’exercice 225 00:15:40,660 --> 00:15:44,590 des compétences de police, si l’inaction de l’administration 226 00:15:44,790 --> 00:15:49,330 cause un préjudice à un particulier, alors celui-ci peut demander au 227 00:15:49,530 --> 00:15:52,180 juge de condamner l’administration à lui verser des dommages-intérêts. 228 00:15:54,370 --> 00:15:59,320 La carence fautive de l’administration existe dans tous les domaines, 229 00:15:59,520 --> 00:16:02,590 que ce soit en matière de police administrative générale ou en matière 230 00:16:02,790 --> 00:16:04,200 de police administrative spéciale. 231 00:16:04,400 --> 00:16:07,000 Un exemple en matière de police administrative spéciale, 232 00:16:07,200 --> 00:16:09,670 je vous en donnerai ensuite un en police générale. 233 00:16:09,870 --> 00:16:13,930 Un arrêt pas très important, il s’agit simplement d’une illustration 234 00:16:14,130 --> 00:16:17,580 en matière de police spéciale, un arrêt du Conseil d’État du 27 235 00:16:17,780 --> 00:16:19,780 septembre 2006 commune de Baalon. 236 00:16:20,260 --> 00:16:24,940 Une commune a été condamnée à indemniser un habitant dont la 237 00:16:25,140 --> 00:16:28,510 clôture a été dégradée par l’effondrement d’un immeuble voisin. 238 00:16:30,100 --> 00:16:36,340 En l’espèce, le maire n’avait pas usé de ses pouvoirs de police spéciale, 239 00:16:36,540 --> 00:16:40,360 en l’occurrence la police de ce qu’on appelle les édifices menaçant 240 00:16:40,560 --> 00:16:43,090 ruine, c’est-à-dire les édifices qui sont dans un tel état de 241 00:16:43,290 --> 00:16:46,870 délabrement qu’ils risquent de s’effondrer, de perdre des morceaux 242 00:16:47,070 --> 00:16:49,960 qui pourraient causer des atteintes à la sécurité publique. 243 00:16:50,160 --> 00:16:52,540 En l’occurrence, il y avait eu une atteinte à des biens. 244 00:16:54,640 --> 00:16:59,080 Pendant un temps, le juge administratif exigeait que la faute de 245 00:16:59,280 --> 00:17:04,450 l’administration soit grave pour que sa responsabilité soit engagée. 246 00:17:04,690 --> 00:17:09,220 Un peu comme dans le cadre de la jurisprudence Doublet qui, 247 00:17:09,420 --> 00:17:13,330 je vous le rappelle, disait que l’administration ne 248 00:17:13,530 --> 00:17:19,150 pouvait voir son refus d’intervenir annulé que s’il y avait un grave 249 00:17:19,570 --> 00:17:22,420 risque de trouble à l’ordre public, ou plutôt un risque de trouble 250 00:17:22,620 --> 00:17:26,140 grave à l’ordre public, en matière de responsabilité, 251 00:17:26,340 --> 00:17:31,840 le juge ne condamnait l’administration à verser des dommages-intérêts 252 00:17:32,320 --> 00:17:37,690 que si elle avait commis une grave faute dans l’exercice de son pouvoir 253 00:17:37,890 --> 00:17:40,960 de police, que si sa carence était particulièrement grave. 254 00:17:41,500 --> 00:17:45,090 On parle, en matière de responsabilité administrative, de faute lourde, 255 00:17:45,290 --> 00:17:47,770 c’est-à-dire qu’il faut une faute lourde pour que la responsabilité 256 00:17:47,970 --> 00:17:49,220 de l’administration soit engagée. 257 00:17:49,420 --> 00:17:53,620 Nous reparlerons plus tard de cette notion de faute lourde. 258 00:17:54,370 --> 00:17:57,460 Un exemple de l’application de cette faute lourde en matière de 259 00:17:57,660 --> 00:18:00,460 police, ce n’est qu’un exemple encore une fois, Conseil d’État, 260 00:18:00,660 --> 00:18:05,770 25 septembre 1987, commune de Lège-Cap-Ferret. 261 00:18:07,210 --> 00:18:10,030 Il s’agissait de nuisances sonores causées par des spectacles. 262 00:18:11,410 --> 00:18:14,920 Le Conseil d’État estime, je cite, "que des spectacles et 263 00:18:15,120 --> 00:18:18,790 manifestations organisés en plein air durant l’été 1983 ont, 264 00:18:19,360 --> 00:18:25,660 en raison tant de leur durée que de leur ampleur, porté gravement 265 00:18:25,860 --> 00:18:30,250 atteinte à diverses reprises à la tranquillité et au repos nocturne 266 00:18:30,450 --> 00:18:31,270 de Monsieur X". 267 00:18:31,470 --> 00:18:36,760 C’est parce qu’il y avait des demandes répétées de la part de l’administré 268 00:18:36,960 --> 00:18:44,920 et un grave trouble à la tranquillité publique que la commune a été condamnée 269 00:18:45,120 --> 00:18:47,460 à indemniser le requérant. 270 00:18:47,800 --> 00:18:52,690 Il fallait qu’il y ait une faute grave, une faute lourde de l’administration 271 00:18:52,890 --> 00:18:54,850 pour que sa responsabilité soit engagée. 272 00:18:55,420 --> 00:18:59,350 Les choses ont changé, notamment avec un arrêt de 2003, 273 00:18:59,980 --> 00:19:03,820 arrêt important pour le coup, Conseil d’État 28 novembre 2003 274 00:19:04,020 --> 00:19:07,180 Commune de Moissy-Cramayel, à propos de nuisances sonores, 275 00:19:07,380 --> 00:19:10,300 encore une fois, causées par la présence d’un terrain de basket 276 00:19:10,570 --> 00:19:11,890 à côté d’une habitation. 277 00:19:12,460 --> 00:19:16,660 En l’espèce, le justiciable avait saisi le tribunal administratif, 278 00:19:16,860 --> 00:19:19,330 puis l’affaire était passée devant la cour administrative d’appel. 279 00:19:19,840 --> 00:19:25,630 La cour administrative d’appel a jugé que l’inaction du maire 280 00:19:25,830 --> 00:19:28,960 constituait une faute de nature à engager la responsabilité de 281 00:19:29,160 --> 00:19:29,920 la commune. 282 00:19:30,120 --> 00:19:33,520 Mais dans son arrêt, la cour administrative d’appel 283 00:19:33,820 --> 00:19:39,190 n’avait pas cherché à démontrer que la faute commise par la commune 284 00:19:39,390 --> 00:19:43,480 de Moissy-Cramayel, par le maire de Moissy-Cramayel, elle n’avait 285 00:19:43,680 --> 00:19:48,670 pas démontré que sa faute au maire était d’une particulière gravité, 286 00:19:48,870 --> 00:19:53,200 était lourde, ce qui entraînait l’engagement de sa responsabilité. 287 00:19:54,250 --> 00:19:58,810 Le Conseil d’État est saisi par la commune de Moissy-Cramayel qui 288 00:19:59,010 --> 00:20:02,680 estime que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit. 289 00:20:02,880 --> 00:20:07,210 Celle-ci aurait dû rechercher l’existence d’une faute lourde, 290 00:20:07,410 --> 00:20:08,800 ce qu’elle n’a pas fait en l’espèce. 291 00:20:09,850 --> 00:20:13,480 Dans sa décision, le Conseil d’État nous dit la chose suivante : 292 00:20:13,680 --> 00:20:16,360 "En jugeant que le maire, en s’abstenant de faire usage de 293 00:20:16,560 --> 00:20:19,510 ses pouvoirs de police pour édicter une réglementation relative à l’accès 294 00:20:19,710 --> 00:20:24,070 aux terrains de sport, etc., en jugeant que le maire avait 295 00:20:24,270 --> 00:20:27,040 commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune 296 00:20:27,240 --> 00:20:32,620 sans qualifier celle-ci de faute lourde, la Cour administrative 297 00:20:32,820 --> 00:20:34,960 d’appel de Paris n’a pas commis d’erreur de droit". 298 00:20:35,160 --> 00:20:38,770 Ici, dans sa décision commune de Moissy-Cramayel, le Conseil d’État 299 00:20:38,970 --> 00:20:42,880 abandonne sa jurisprudence antérieure en estimant que toute faute, 300 00:20:43,080 --> 00:20:46,660 même une faute simple, une faute qui n’a pas de gravité 301 00:20:46,860 --> 00:20:51,730 particulière, toute faute entraîne l’engagement de la responsabilité 302 00:20:51,930 --> 00:20:58,070 de l’administration en matière de carence de police. 303 00:20:58,270 --> 00:21:01,390 J’insiste bien sur ce point, la faute lourde, l’exigence d’une 304 00:21:01,590 --> 00:21:03,910 faute lourde existe, comme on le verra plus tard, 305 00:21:04,110 --> 00:21:04,980 dans certains cas. 306 00:21:05,180 --> 00:21:08,250 D’ailleurs, elle demeure, j’ai un exemple à vous donner, 307 00:21:08,950 --> 00:21:10,270 dans un cas très particulier. 308 00:21:10,470 --> 00:21:14,050 Elle demeure, la faute lourde, l’exigence d’une faute d’une 309 00:21:14,290 --> 00:21:19,960 particulière gravité existe toujours lorsque ce n’est pas l’autorité 310 00:21:20,160 --> 00:21:25,540 de police qui a commis une carence – pour ce cas-là, la faute simple 311 00:21:25,740 --> 00:21:31,510 suffit – mais pour le cas où une autorité aurait refusé de se substituer 312 00:21:31,710 --> 00:21:34,960 à l’autorité qui a commis la carence. 313 00:21:35,160 --> 00:21:40,150 Autrement dit, il s’agit du cas dans lequel c’est l’autorité de 314 00:21:40,350 --> 00:21:46,150 substitution qui a commis une carence, qui a failli dans l’exercice de 315 00:21:46,350 --> 00:21:47,170 son pouvoir de police. 316 00:21:47,410 --> 00:21:49,810 En particulier ici, il s’agit du cas du préfet. 317 00:21:50,010 --> 00:21:53,050 Je vous l’ai déjà dit, le préfet doit se substituer au 318 00:21:53,250 --> 00:21:58,660 maire lorsque celui-ci n’agit pas, n’emploie pas son pouvoir de police. 319 00:21:59,980 --> 00:22:05,650 Le Préfet, la responsabilité de l’État du fait de l’inaction du préfet, 320 00:22:05,950 --> 00:22:11,830 qui a refusé de se substituer au maire, n’engage la responsabilité de l’État 321 00:22:12,030 --> 00:22:14,800 que si le préfet a commis une faute lourde. 322 00:22:15,070 --> 00:22:18,340 Il faut qu’il y ait une faute d’une particulière gravité de l’autorité 323 00:22:18,540 --> 00:22:22,240 de substitution pour que la responsabilité soit engagée. 324 00:22:22,440 --> 00:22:29,020 C’est une décision du Conseil d’État du 25 juillet 2007, Société France 325 00:22:29,220 --> 00:22:29,980 Télécom. 326 00:22:30,180 --> 00:22:36,160 Évidemment, l’idée derrière est qu’il ne faut pas pousser les autorités 327 00:22:37,570 --> 00:22:40,930 qui disposent d’un pouvoir de substitution à se substituer en 328 00:22:41,130 --> 00:22:45,670 permanence, car ça peut être la conséquence d’une jurisprudence 329 00:22:45,870 --> 00:22:51,280 qui sanctionnerait facilement les inactions des autorités qui disposent 330 00:22:51,480 --> 00:22:52,480 d’un pouvoir de substitution. 331 00:22:52,680 --> 00:22:58,330 Si la faute simple suffit, une autorité de substitution sera 332 00:22:58,530 --> 00:23:03,910 poussée à intervenir en toutes circonstances à la place de l’autorité 333 00:23:04,110 --> 00:23:04,870 de principe. 334 00:23:05,070 --> 00:23:07,040 Ce n’est évidemment pas ce que l’on souhaite. 335 00:23:07,240 --> 00:23:11,920 Il faut donc une faute lourde lorsqu’il s’agit d’une autorité qui dispose 336 00:23:12,120 --> 00:23:14,230 simplement d’un pouvoir de substitution.