1 00:00:05,640 --> 00:00:06,400 Bonjour. 2 00:00:07,560 --> 00:00:10,130 Revenons sur le mécanisme inscrit à l'article L. 3 00:00:10,330 --> 00:00:13,480 80 A du livre du procédure fiscale, ce mécanisme de garantie contre 4 00:00:13,680 --> 00:00:17,700 les changements de doctrine, afin d'en préciser d'abord le sens 5 00:00:17,900 --> 00:00:20,880 dans un premier point, puis la portée juridique et voir 6 00:00:21,080 --> 00:00:24,020 la manière dont la jurisprudence notamment a précisé cette portée. 7 00:00:24,420 --> 00:00:28,060 Alors s'agissant de la signification du sens même de la garantie inscrite 8 00:00:28,260 --> 00:00:29,020 à l'article L. 9 00:00:29,220 --> 00:00:32,740 80 A du LPF, je crois qu'on ne peut pas complètement se dispenser 10 00:00:32,940 --> 00:00:36,820 d'une lecture de l'alinéa 1 et de l'alinéa 3 de cet article qui 11 00:00:37,020 --> 00:00:39,760 sont au cœur de la matière fiscale comme je l'ai déjà indiqué, 12 00:00:40,280 --> 00:00:43,820 donc je lis rapidement et vous me pardonnerez, mais pour insister 13 00:00:44,020 --> 00:00:44,780 quand même sur un certain nombre de points. 14 00:00:45,540 --> 00:00:48,140 Le premier alinéa d'abord : "Il ne sera procédé à aucun 15 00:00:48,340 --> 00:00:50,760 rehaussement d'imposition antérieure si la cause du rehaussement poursuivi 16 00:00:50,960 --> 00:00:54,340 par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable 17 00:00:54,540 --> 00:00:57,700 de bonne foi du texte fiscal, et s'il est démontré que 18 00:00:57,900 --> 00:01:00,920 l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision", 19 00:01:01,120 --> 00:01:04,300 l'acte d'imposition original, "a été à l'époque formellement 20 00:01:04,500 --> 00:01:05,380 admise par l'administration. 21 00:01:06,160 --> 00:01:12,980 Le deuxième alinéa, passé au troisième alinéa en 2018 à la suite de la 22 00:01:13,180 --> 00:01:17,420 modification du dispositif à la marge, bref aujourd'hui le troisième alinéa 23 00:01:17,620 --> 00:01:19,900 ressemble beaucoup au premier avec des petites différences. 24 00:01:20,300 --> 00:01:23,580 Il indique, ce troisième alinéa, que "lorsque le redevable a appliqué 25 00:01:23,780 --> 00:01:25,900 un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait 26 00:01:26,100 --> 00:01:28,420 connaître par ses instructions ou circulaires publiées, 27 00:01:28,660 --> 00:01:30,600 et qu'elle n'avait pas rapporté à la date des opérations en cause, 28 00:01:30,800 --> 00:01:33,320 elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une 29 00:01:33,520 --> 00:01:34,720 interprétation différente". 30 00:01:35,840 --> 00:01:40,060 Et enfin, a été ajouté en 2008 un dernier élément à cet alinéa, 31 00:01:40,260 --> 00:01:42,860 "sont également opposables à l'administration dans les mêmes 32 00:01:43,060 --> 00:01:44,940 conditions les instructions et circulaires publiées relatives 33 00:01:45,140 --> 00:01:47,680 au recouvrement d'impôts et aux pénalités fiscales". 34 00:01:49,220 --> 00:01:51,960 Alors que retenir de tout cela ? 35 00:01:52,720 --> 00:01:55,720 Premier élément, ces deux alinéas ne sont pas rédigés exactement 36 00:01:55,920 --> 00:01:58,880 de la même manière mais en réalité, ils sont interprétés communément 37 00:01:59,080 --> 00:02:02,140 par notamment le conseil d'État et c'est la raison pour laquelle 38 00:02:02,340 --> 00:02:04,780 ensuite, je vais vous présenter donc les, différentes conditions 39 00:02:04,980 --> 00:02:08,080 d'application d'un même mouvement sans véritablement distinguer les 40 00:02:08,280 --> 00:02:09,040 deux alinéas. 41 00:02:09,240 --> 00:02:13,720 Il s'agit en fait d'un package, si je puis dire, de garanties inscrites 42 00:02:13,920 --> 00:02:14,680 dans la loi. 43 00:02:14,880 --> 00:02:17,020 Néanmoins les situations visées par les deux alinéas ne sont pas 44 00:02:17,220 --> 00:02:19,640 exactement similaires mais avant de voir ces détails, 45 00:02:19,840 --> 00:02:24,320 retenons l'idée générale qui est que cet article en réalité s'adresse 46 00:02:24,520 --> 00:02:25,280 à l'administration. 47 00:02:25,480 --> 00:02:29,380 Il ne sera procédé à aucun rehaussement et à peu près la même formule pour 48 00:02:29,580 --> 00:02:30,560 le troisième alinéa. 49 00:02:30,760 --> 00:02:34,900 L'idée, c'est au bout du compte d'interdire à l'administration 50 00:02:35,100 --> 00:02:37,880 de revenir à la charge donc de rehausser l'imposition, 51 00:02:38,080 --> 00:02:41,840 c'est-à-dire de redresser en réalité le contribuable, ou de le rectifier, 52 00:02:42,040 --> 00:02:43,700 les deux expressions peuvent être employées. 53 00:02:43,900 --> 00:02:50,160 Donc c'est une limite qui est opposée plus exactement à l'administration 54 00:02:50,360 --> 00:02:54,440 au moyen qu'a en principe l'administration notamment de reprendre 55 00:02:54,640 --> 00:02:58,960 une imposition lorsque l'administration estime que la première a été établie 56 00:02:59,160 --> 00:03:02,100 illégalement, par exemple parce que les déclarations du contribuable 57 00:03:02,300 --> 00:03:06,280 s'avèrent en contradiction avec ce que la loi prévoit. 58 00:03:06,480 --> 00:03:09,380 Sauf que, et donc c'est tout l'intérêt, même si l'article L. 59 00:03:09,580 --> 00:03:13,360 80 A ne le dit pas expressément, c'est implicite mais c'est l'évidence, 60 00:03:13,560 --> 00:03:17,960 c'est que cette espèce d'interdiction faite à l'administration de venir 61 00:03:18,160 --> 00:03:23,060 embêter le contribuable fonctionne précisément non seulement lorsque 62 00:03:23,260 --> 00:03:25,760 l'interprétation administrative sur laquelle s'est fondée le 63 00:03:25,960 --> 00:03:28,400 contribuable était légale, ça semble assez évident, 64 00:03:28,600 --> 00:03:33,140 mais aussi lorsque cette interprétation s'avère illégale et donc lorsque 65 00:03:33,340 --> 00:03:37,400 l'administration souhaiterait revenir à la charge en rétablissant la 66 00:03:37,600 --> 00:03:42,740 légalité dans une situation où donc une illégalité a pu prospérer 67 00:03:42,940 --> 00:03:45,960 du fait de la fidélité qu'a eu le contribuable aux prévisions 68 00:03:46,160 --> 00:03:49,000 de la doctrine, eh bien ça n'est pas possible et donc c'est tout 69 00:03:49,200 --> 00:03:53,760 l'enjeu, cette garantie fonctionne lorsque le contribuable s'est 70 00:03:53,960 --> 00:03:57,540 fidèlement plié aux indications d'une doctrine favorable, 71 00:03:57,740 --> 00:04:00,660 c'est pour ça qu'il s'y est plié, mais illégale, l'administration 72 00:04:00,860 --> 00:04:03,640 ne peut pas le reprocher finalement ensuite au contribuable. 73 00:04:03,840 --> 00:04:07,320 Donc il y a quelque chose comme une référence à la notion qu'on 74 00:04:07,520 --> 00:04:10,260 a déjà envisagée de confiance légitime, même si l'expression, 75 00:04:10,460 --> 00:04:13,180 là encore, n'est pas employée ni par le texte ni par la jurisprudence, 76 00:04:13,380 --> 00:04:16,000 mais c'est bien l'idée, l'idée donc, c'est que le contribuable, 77 00:04:16,200 --> 00:04:19,640 s'il a pu raisonnablement faire confiance à l'administration en 78 00:04:19,840 --> 00:04:24,760 suivant les indications formulées par cette dernière, en effet, 79 00:04:24,960 --> 00:04:28,600 il ne doit pas ensuite se voir reprocher finalement d'avoir suivi 80 00:04:28,800 --> 00:04:31,560 ce que l'administration lui avait suggéré de faire, quand bien même 81 00:04:31,760 --> 00:04:34,560 les suggestions s'avèrent être illégales. 82 00:04:34,760 --> 00:04:38,820 Alors l'autre élément essentiel qui est au cœur, et on va le préciser 83 00:04:39,020 --> 00:04:41,440 dans un instant mais qui est au cœur de ces deux alinéas, 84 00:04:41,640 --> 00:04:45,200 c'est bien l'idée selon laquelle l'administration ne peut pas reprocher 85 00:04:45,400 --> 00:04:48,580 au contribuable de s'être fié à ses indications s'il s'est fié 86 00:04:48,780 --> 00:04:49,880 fidèlement à ses indications. 87 00:04:50,080 --> 00:04:53,900 Il y a vraiment cette idée selon laquelle ce qui importe le plus 88 00:04:54,100 --> 00:04:57,500 pour que cette garantie fonctionne, c'est la conformité du comportement 89 00:04:57,700 --> 00:05:01,180 du contribuable aux indications de la doctrine administrative. 90 00:05:01,380 --> 00:05:03,760 Le dernier élément que je veux souligner pour commencer, 91 00:05:03,960 --> 00:05:07,620 c'est le fait que s'il s'agit d'une garantie offerte au contribuable, 92 00:05:08,460 --> 00:05:13,060 il ne s'agit vraiment que de ça, ce qui signifie a contrario que 93 00:05:13,260 --> 00:05:16,220 l'administration ne peut pas se fonder sur cet article L. 94 00:05:16,420 --> 00:05:23,640 80 A, par exemple pour promouvoir des normes qui s'avèreraient être 95 00:05:23,840 --> 00:05:28,760 illégales si comme ça arrive également, l'administration produit une doctrine 96 00:05:28,960 --> 00:05:31,660 administrative qui s'avère moins favorable que la loi, 97 00:05:31,860 --> 00:05:35,400 ça arrive aussi de temps en temps,  l'administration ne pourra pas 98 00:05:35,600 --> 00:05:39,700 s'appuyer sur cette doctrine moins favorable que la loi pour fonder 99 00:05:39,900 --> 00:05:42,880 une imposition, l'imposition ne peut se fonder que sur la loi et 100 00:05:43,080 --> 00:05:46,360 donc concrètement, l'administration ne peut jamais utiliser l'article L. 101 00:05:46,560 --> 00:05:50,580 80 A, c'est toujours au contribuable de l'utiliser contre l'administration 102 00:05:50,780 --> 00:05:52,380 et l'inverse n'est pas possible. 103 00:05:52,580 --> 00:05:57,080 Alors précisons cela maintenant en envisageant la portée du mécanisme 104 00:05:57,280 --> 00:06:00,940 et l'idée générale donc on va préciser les différentes conditions 105 00:06:01,140 --> 00:06:04,980 d'application mais c'est qu'évidemment, le Conseil d'État, la Cour de cassation 106 00:06:05,180 --> 00:06:08,080 à titre très très subsidiaire mais principalement le Conseil d'État 107 00:06:08,280 --> 00:06:11,260 a été très régulièrement confronté à des questions en fait 108 00:06:11,460 --> 00:06:13,100 d'interprétation de l'article L. 109 00:06:13,300 --> 00:06:16,880 80 A pour préciser le sens de chacun des mots que j'ai cités brièvement 110 00:06:17,080 --> 00:06:20,760 tout à l'heure pour finalement préciser les cas concrets dans 111 00:06:20,960 --> 00:06:23,540 lesquels le contribuable, disons, est protégé par cet article, 112 00:06:23,740 --> 00:06:25,560 et ceux dans lesquels il ne l'est pas. 113 00:06:25,760 --> 00:06:30,180 Alors il en ressort une jurisprudence assez touffue car il y a énormément 114 00:06:30,380 --> 00:06:33,960 de contentieux sur ce point, c'est extrêmement fréquent que 115 00:06:34,160 --> 00:06:37,120 les contribuables invoquent des éléments de doctrine pour tenter 116 00:06:37,320 --> 00:06:42,340 de faire tomber un redressement qui les a visés, et il peut considérer 117 00:06:42,540 --> 00:06:46,760 que globalement, le Conseil d'État a une lecture relativement stricte 118 00:06:46,960 --> 00:06:47,720 de l'article L. 119 00:06:47,920 --> 00:06:51,000 80, en tout cas sur un certain nombre des éléments qu'on a envisagés, 120 00:06:51,200 --> 00:06:54,320 pas sur tous, mais en tout cas une volonté clairement du Conseil 121 00:06:54,520 --> 00:06:57,900 d'État de bien délimiter les cas dans lesquels la garantie a vocation 122 00:06:58,100 --> 00:07:04,150 à s'appliquer pour justement que la garantie de sécurité juridique 123 00:07:04,350 --> 00:07:05,110 finalement que représente L. 124 00:07:05,310 --> 00:07:06,420 80, joue tout à fait son rôle et qui est une forme de prévisibilité, 125 00:07:06,620 --> 00:07:09,420 qu'on sache a priori les cas dans lesquels on peut faire confiance 126 00:07:09,620 --> 00:07:12,860 à la doctrine et ceux dans lesquels finalement l'administration pourra 127 00:07:13,060 --> 00:07:16,560 continuer de redresser le contribuable en cas de situation illégale sans 128 00:07:16,760 --> 00:07:21,120 que ce dernier puisse se cacher, si je puis, dire derrière une doctrine 129 00:07:21,320 --> 00:07:22,080 quelconque. 130 00:07:22,280 --> 00:07:25,860 Alors voyons donc ces différentes conditions en distinguant d'abord 131 00:07:26,060 --> 00:07:28,660 une série de conditions qui tiennent à l'interprétation elle-même, 132 00:07:28,860 --> 00:07:31,220 c'est-à-dire la doctrine, celle-ci doit avoir un certain 133 00:07:31,420 --> 00:07:34,240 nombre de qualités pour être ensuite opposable à l'administration et 134 00:07:34,440 --> 00:07:37,200 on verra dans un second temps les conditions qui tiennent au contribuable 135 00:07:37,400 --> 00:07:41,580 lui-même et à la situation donc qui est la sienne, s'agissant, 136 00:07:41,780 --> 00:07:44,980 a, par exemple des conditions qui tiennent à l'interprétation des 137 00:07:45,180 --> 00:07:46,600 conditions d'opposabilité. 138 00:07:46,800 --> 00:07:52,400 On peut estimer qu'il y a trois séries de conditions principales 139 00:07:52,600 --> 00:07:55,160 d'intérêt et d'importance variable. 140 00:07:55,360 --> 00:07:58,140 Première série de conditions, c'est celles qui tiennent à la 141 00:07:58,340 --> 00:07:59,940 source même de l'interprétation. 142 00:08:00,140 --> 00:08:02,980 Alors les choses sont extrêmement simples, seule la doctrine, 143 00:08:03,180 --> 00:08:07,720 quelle que soit sa forme, mais seule la doctrine qui provient 144 00:08:07,920 --> 00:08:11,880 des services du ministère des Finances, en fait du ministre chargé du budget 145 00:08:12,080 --> 00:08:18,380 des comptes publics et de l'ensemble de ses subordonnés, seuls ces éléments 146 00:08:18,580 --> 00:08:22,340 de doctrine sont ensuite opposables à l'administration fiscale donc 147 00:08:22,540 --> 00:08:24,860 seul ce que produit l'administration fiscale pour le dire simplement 148 00:08:25,060 --> 00:08:26,060 lui est ensuite opposable. 149 00:08:26,260 --> 00:08:30,620 Donc concrètement, si le ministre de l'Enseignement supérieur vient 150 00:08:30,820 --> 00:08:34,280 préciser aux agents du ministère la manière de déclarer leurs impôts, 151 00:08:34,480 --> 00:08:38,100 de payer ou de ne pas payer, etc., etc., s'il s'avère que cette 152 00:08:38,300 --> 00:08:41,740 doctrine est favorable mais illégale, elle ne sera pas ensuite opposable 153 00:08:41,940 --> 00:08:44,560 aux services des impôts car elle n'a pas été produite par les services 154 00:08:44,760 --> 00:08:48,100 du ministère des Finances et en pratique, l'essentiel de la doctrine, 155 00:08:48,300 --> 00:08:50,440 alors notamment la doctrine dite publiée, celle qui est publie au Bofip, 156 00:08:50,640 --> 00:08:53,300 les circulaires, instructions et notes de service sont généralement 157 00:08:53,500 --> 00:08:56,260 publiées par la direction de la législation fiscale donc qui dépend 158 00:08:56,460 --> 00:09:02,060 directement de la DGFIP et du ministre des Finances, donc premier élément 159 00:09:02,260 --> 00:09:03,020 tenant à la source. 160 00:09:03,760 --> 00:09:07,860 Deuxième élément, c'est ce qui concerne la forme de la doctrine. 161 00:09:08,060 --> 00:09:11,680 Alors là pour la peine, l'administration est assez libre 162 00:09:11,880 --> 00:09:16,620 sur le plan formel, en effet le Conseil d'État considère que de 163 00:09:16,820 --> 00:09:21,360 multiples supports peuvent effectivement porter une parole 164 00:09:21,560 --> 00:09:23,540 administrative qui sera ensuite opposable. 165 00:09:23,740 --> 00:09:26,520 Le plus souvent, je viens de le suggérer, le plus souvent, 166 00:09:26,720 --> 00:09:29,220 en pratique, c'est par voie d'instruction, c'est l'expression 167 00:09:29,420 --> 00:09:32,780 que privilégie l'administration fiscale, on pourrait parler de 168 00:09:32,980 --> 00:09:36,940 circulaire, on peut également de temps en temps relever que des 169 00:09:37,140 --> 00:09:42,780 notes de service sont adressées, bref c'est par la voie de ces documents 170 00:09:42,980 --> 00:09:45,800 qui ont un caractère général et impersonnel que s'exprime 171 00:09:46,000 --> 00:09:49,000 l'administration en publiant ces documents généralement au Bofip, 172 00:09:49,200 --> 00:09:53,440 alors sur le site internet concrètement de l'administration fiscale, 173 00:09:53,640 --> 00:09:56,860 et donc pour pour préciser à chaque nouveau texte de loi, 174 00:09:57,060 --> 00:10:00,720 souvent après une décision de justice importante, la signature d'une 175 00:10:00,920 --> 00:10:03,240 nouvelle convention bilatérale de la France, etc., donc une 176 00:10:03,440 --> 00:10:07,520 instruction qui peut parfois occuper des centaines de pages vient préciser 177 00:10:07,720 --> 00:10:10,320 la manière d'interpréter, de comprendre et finalement d'appliquer 178 00:10:10,520 --> 00:10:13,180 lesdites dispositions, c'est le cas le plus fréquent. 179 00:10:13,380 --> 00:10:17,680 Mais il y a également une deuxième forme de prise de position à caractère 180 00:10:17,880 --> 00:10:20,300 général et impersonnel assez comparable, très importante en 181 00:10:20,500 --> 00:10:22,640 pratique, ce sont les réponses ministérielles. 182 00:10:22,840 --> 00:10:26,320 Alors les réponses ministérielles se réfèrent aux réponses écrites 183 00:10:26,520 --> 00:10:30,340 du ministre des Finances bien entendu, faites à des questions parlementaires, 184 00:10:30,540 --> 00:10:34,540 sénateurs ou députés, donc les questions puis les réponses 185 00:10:34,740 --> 00:10:39,180 sont publiées au Journal Officiel, en fait dans deux journaux officiels 186 00:10:39,380 --> 00:10:41,420 différents, celui de l'Assemblée nationale et celui du Sénat, 187 00:10:41,620 --> 00:10:44,620 et donc les réponses fournies à ces questions souvent techniques 188 00:10:44,820 --> 00:10:48,120 de parlementaires sont ensuite opposables au ministre exactement 189 00:10:48,320 --> 00:10:50,720 dans les mêmes termes que les différentes instructions. 190 00:10:50,920 --> 00:10:55,620 En pratique, ces réponses sont assez fréquentes car il est assez 191 00:10:55,820 --> 00:10:58,520 fréquent que les parlementaires se fassent en gros le relais de 192 00:10:58,720 --> 00:11:02,260 questions très pratiques, très techniques, que telle entreprise 193 00:11:02,460 --> 00:11:05,920 ou même tel contribuable, personne physique de la circonscription 194 00:11:06,120 --> 00:11:09,900 du parlementaire en question, aura pu souhaiter poser à 195 00:11:10,100 --> 00:11:12,480 l'administration et donc souvent, les parlementaires servent de relais 196 00:11:12,680 --> 00:11:16,320 en quelque sorte à des questions parfois très légitimes d'une entreprise 197 00:11:16,520 --> 00:11:21,380 qui s'interroge sur son inclusion dans le champ d'application d'une 198 00:11:21,580 --> 00:11:23,920 disposition qui peut manquer parfois un peu de clarté sur tel ou tel 199 00:11:24,120 --> 00:11:27,940 point et donc il est assez fréquent que les ministres interrogent, 200 00:11:28,140 --> 00:11:31,000 évidemment en général les questions sont un peu tendancieuses avec 201 00:11:31,200 --> 00:11:34,640 l'espoir que la réponse aille dans un sens favorable aux contribuables, 202 00:11:34,840 --> 00:11:37,240 c'est parfois le cas, ça n'est pas toujours le cas, 203 00:11:37,440 --> 00:11:39,700 dans tous les cas de figure en tout cas, la réponse est opposable ensuite 204 00:11:39,900 --> 00:11:43,360 à l'administration dès lors qu'elle est publiée comme c'est toujours 205 00:11:43,560 --> 00:11:46,960 le cas de ces réponses ministérielles, à bien distinguer évidemment des 206 00:11:47,160 --> 00:11:50,700 réponses faites lors des débats parlementaires, purement orales, 207 00:11:50,900 --> 00:11:53,820 là pour la peine, il n'y a pas d'opposabilité. 208 00:11:54,020 --> 00:11:58,800 Troisième élément qu'on peut relever, c'est que parfois, de simples actes 209 00:11:59,000 --> 00:12:02,520 individuels peuvent être opposables, ils peuvent porter une interprétation 210 00:12:02,720 --> 00:12:05,720 de la loi ou du droit positif globalement qui sera opposable 211 00:12:05,920 --> 00:12:08,760 à l'administration, ça peut être le cas d'un acte d'imposition car 212 00:12:08,960 --> 00:12:12,280 il y a des éléments de motivation, notamment lorsque le contribuable 213 00:12:12,480 --> 00:12:15,380 fait l'objet d'un redressement et donc à certains égards, 214 00:12:15,580 --> 00:12:19,180 une interprétation de la loi peut être proposée et elle pourra ensuite 215 00:12:19,380 --> 00:12:21,400 être opposée à l'administration. 216 00:12:21,600 --> 00:12:23,500 Alors ce n'est pas si fréquent que ça car le plus souvent, 217 00:12:23,700 --> 00:12:26,200 ces actes d'imposition ne font que reprendre des éléments 218 00:12:26,400 --> 00:12:28,580 d'interprétation qui sont déjà présents dans des instructions 219 00:12:28,780 --> 00:12:32,700 publiées mais le cas échéant, cela peut s'avérer opposable. 220 00:12:32,900 --> 00:12:36,620 Et dernier élément peut-être qui mérite d'être noté, on reviendra 221 00:12:36,820 --> 00:12:38,960 sur ce cas qui est important et assez intéressant, c'est le cas 222 00:12:39,160 --> 00:12:39,920 dit des rescrits. 223 00:12:40,120 --> 00:12:43,120 Alors les rescrits pour la peine, ce sont des prises de position 224 00:12:43,320 --> 00:12:46,600 de l'administration mais qui ont été sollicitées par le contribuable, 225 00:12:46,800 --> 00:12:50,060 le contribuable interroge l'administration sur sa situation 226 00:12:50,260 --> 00:12:54,900 personnelle au regard d'une loi fiscale particulière en souhaitant 227 00:12:55,100 --> 00:12:58,600 savoir si d'après l'administration, la loi doit être appliquée de cette 228 00:12:58,800 --> 00:13:02,000 manière ou de cette manière, je viens de gagner au loto, 229 00:13:02,200 --> 00:13:03,460 dois-je déclarer ce gain ? 230 00:13:03,660 --> 00:13:04,670 Je viens de… 231 00:13:04,870 --> 00:13:07,980 on ne va pas multiplier des exemples, ou j'envisage de racheter une 232 00:13:08,180 --> 00:13:10,680 entreprise ou de réaliser une opération de fusion acquisition, 233 00:13:10,880 --> 00:13:14,280 est-ce que je pourrai bénéficier du régime fiscal favorable des 234 00:13:14,480 --> 00:13:18,900 fusions qui me permettra ensuite de récupérer l'éventuel déficit 235 00:13:19,100 --> 00:13:21,820 de la société absorbée pour réduire mon niveau d'imposition ? 236 00:13:22,020 --> 00:13:24,980 Je n'entre pas dans les détails techniques mais des questions de 237 00:13:25,180 --> 00:13:27,820 cette nature parfois complexes peuvent être posées au contribuable, 238 00:13:28,020 --> 00:13:31,480 et comme le verra, l'article, alors principalement l'article L. 239 00:13:31,680 --> 00:13:36,580 80 B du LPF mais d'autres dispositions permettent non seulement au 240 00:13:36,780 --> 00:13:39,600 contribuable bien sûr de poser sa question mais imposent à 241 00:13:39,800 --> 00:13:42,300 l'administration d'y répondre, alors dans des délais variables 242 00:13:42,500 --> 00:13:47,280 mais en tout cas, cette prise de position, si elle s'avère favorable 243 00:13:47,480 --> 00:13:52,260 au contribuable, si le contribuable souhaite donc en effet suivre le 244 00:13:52,460 --> 00:13:55,660 contenu du rescrit, il est sûr ensuite de ne pas se le voir reprocher, 245 00:13:55,860 --> 00:13:59,380 il pourra opposer ce rescrit à l'administration, quand bien même, 246 00:13:59,580 --> 00:14:01,620 toujours la même chose, celui-ci s'avérerait illégal, 247 00:14:01,820 --> 00:14:03,300 il pourra donc sur le fondement de L. 248 00:14:03,500 --> 00:14:05,540 80 A, opposer ce rescrit. 249 00:14:05,740 --> 00:14:08,020 Alors comme on le reprécisera mais je le dis tout de suite, 250 00:14:08,220 --> 00:14:11,180 si le rescrit s'avère défavorable, si l'administration donne un point 251 00:14:11,380 --> 00:14:13,440 de vue qui ne plaît pas au contribuable, celui-ci n'est pas lié, 252 00:14:13,640 --> 00:14:16,380 il s'agit d'une sorte d'avis simplement, alors évidemment, 253 00:14:16,580 --> 00:14:18,640 il prendra un petit risque à ne pas suivre ce que lui suggère 254 00:14:18,840 --> 00:14:21,640 l'administration et peut-être que celle-ci tentera de le redresser 255 00:14:21,840 --> 00:14:25,100 mais le combat contentieux pourra ensuite donner tort au contribuable, 256 00:14:25,300 --> 00:14:27,980 en tout cas, on ne peut pas lui reprocher de ne pas suivre ce qui 257 00:14:28,180 --> 00:14:31,820 n'est qu'une forme d'avis de l'administration lorsqu'une question 258 00:14:32,020 --> 00:14:36,060 lui a été posée, mais donc si l'avis lui plaît, cet avis sous forme 259 00:14:36,260 --> 00:14:38,320 de rescrit est opposable. 260 00:14:38,520 --> 00:14:42,100 Voilà donc la forme que peut prendre, les différentes formes que peuvent 261 00:14:42,300 --> 00:14:44,280 prendre ces prises de position. 262 00:14:44,480 --> 00:14:49,320 Enfin troisième série de conditions tenant à l'interprétation elle-même, 263 00:14:49,520 --> 00:14:52,660 c'est la question du contenu même de l'interprétation. 264 00:14:53,920 --> 00:14:58,100 Alors plusieurs points méritent d'être relevés à cet égard, 265 00:14:58,300 --> 00:15:00,700 premier point, et c'est l'expression qu'emploie l'article L. 266 00:15:00,900 --> 00:15:04,220 80 que j'ai lu tout à l'heure, seules les interprétations d'un 267 00:15:04,420 --> 00:15:06,860 texte fiscal sont opposables à l'administration. 268 00:15:07,060 --> 00:15:10,220 Alors cette expression est très confuse, elle a donné lieu à, 269 00:15:10,420 --> 00:15:13,200 pour la peine, une interprétation par le juge qui permet de savoir 270 00:15:13,400 --> 00:15:16,060 de quoi il s'agit, concrètement ce que cela signifie, 271 00:15:16,260 --> 00:15:20,190 et ce depuis l'origine de l'article, je ne l'ai peut-être pas souligné, 272 00:15:20,390 --> 00:15:26,060 c'est en 1959 que cet article a été formulé dans sa première mouture 273 00:15:26,260 --> 00:15:29,560 et donc depuis lors, l'idée du Conseil d'État, 274 00:15:29,760 --> 00:15:33,440 c'est qu'un texte fiscal, c'est d'abord un texte dit d'assiette, 275 00:15:33,640 --> 00:15:38,080 c'est-à-dire un texte qui porte sur des questions relatives à 276 00:15:38,280 --> 00:15:41,280 l'assiette ou au contribuable, c'est-à-dire à qui paye quoi dans 277 00:15:41,480 --> 00:15:44,760 quelle situation, et donc a contrario, ce que cela signifie, 278 00:15:44,960 --> 00:15:50,400 c'est que les textes fiscaux, ou plus exactement les dispositifs 279 00:15:50,600 --> 00:15:53,460 qui portent sur des questions de procédures fiscales, 280 00:15:53,660 --> 00:15:57,160 et donc pas d'assiette donc les modalités d'établissement de l'impôt 281 00:15:57,360 --> 00:16:03,800 par exemple ou de contrôle, ces textes ne sont pas des textes 282 00:16:04,000 --> 00:16:04,820 fiscaux au sens de l'article L. 283 00:16:05,020 --> 00:16:08,680 80 du LPF donc concrètement, et c'est toujours le cas aujourd'hui, 284 00:16:08,880 --> 00:16:12,140 lorsque l'administration donc vient préciser par voie par exemple 285 00:16:12,340 --> 00:16:15,280 d'instruction la manière dont les contrôles doivent être conduits, 286 00:16:15,480 --> 00:16:18,820 si une instruction s'avère plus favorable au contribuable que la loi, 287 00:16:19,020 --> 00:16:22,100 pour autant, celle-ci, cette instruction ne sera pas opposable 288 00:16:22,300 --> 00:16:25,920 car elle ne sera pas considérée comme interprétant un texte fiscal 289 00:16:26,120 --> 00:16:28,880 au sens de ce dispositif car il s'agit non pas d'un texte d'assiette 290 00:16:29,080 --> 00:16:30,400 mais d'un texte procédural. 291 00:16:30,600 --> 00:16:35,560 Alors le point un peu complexe qui a donné lieu une évolution 292 00:16:35,760 --> 00:16:37,960 mais qui aujourd'hui est réglé en tout cas depuis 2008 donc cela 293 00:16:38,160 --> 00:16:41,560 date un petit peu, c'est la question des interprétations qui portent 294 00:16:41,760 --> 00:16:45,840 sur des dispositions relatives d'une part aux sanctions et d'autre 295 00:16:46,040 --> 00:16:47,400 part au recouvrement de l'impôt. 296 00:16:47,600 --> 00:16:50,540 Et vous l'avez peut-être noté, je l'ai dit tout à l'heure, 297 00:16:50,740 --> 00:16:52,160 mais le troisième alinéa de l'article L. 298 00:16:52,360 --> 00:16:57,580 80 A depuis donc sa modification en 2008, intègre expressément ces 299 00:16:57,780 --> 00:17:02,300 instructions ou ces prises de position relatives aux sanctions d'une part, 300 00:17:02,500 --> 00:17:05,760 précisant par exemple que dans certains cas, les sanctions seront 301 00:17:05,960 --> 00:17:11,320 moins lourdes que ce que prévoit la loi si le contribuable est 302 00:17:11,520 --> 00:17:14,380 particulièrement diligent, ce type de prise de position plus 303 00:17:14,580 --> 00:17:19,360 favorable sera opposable car la loi donc l'a expressément indiqué, 304 00:17:19,560 --> 00:17:24,140 même chose pour les modalités de recouvrement de l'impôt donc par 305 00:17:24,340 --> 00:17:27,120 exemple des délais de paiement supplémentaires qui pourraient 306 00:17:27,320 --> 00:17:31,180 être accordés au contribuable, là encore, ces instructions relatives 307 00:17:31,380 --> 00:17:34,920 donc au recouvrement sont opposables à l'administration, dans tous les 308 00:17:35,120 --> 00:17:38,700 cas et en particulier si elles sont plus favorables et donc illégales. 309 00:17:38,900 --> 00:17:41,720 Reste, je le répète, aujourd'hui, qu'une instruction 310 00:17:41,920 --> 00:17:45,620 portant sur un élément de procédure, contrôle fiscal par exemple, 311 00:17:45,820 --> 00:17:49,540 n'est pas opposable à l'administration donc ne protège pas véritablement 312 00:17:49,740 --> 00:17:52,860 le contribuable, même si l'on peut espérer et supposer que les agents 313 00:17:53,060 --> 00:17:56,180 de l'administration s'y plieront. 314 00:17:56,920 --> 00:18:00,160 Deuxième point essentiel toujours relatif au contenu d'une instruction, 315 00:18:00,360 --> 00:18:03,380 et c'est peut-être le point le plus important, et le mot est employé 316 00:18:03,580 --> 00:18:04,340 par l'article L. 317 00:18:04,540 --> 00:18:07,500 80 A, c'est que sont opposables à l'administration exclusivement 318 00:18:07,700 --> 00:18:10,540 les interprétations formelles, c'est lorsque l'administration 319 00:18:10,740 --> 00:18:15,600 a formellement pris position sur un point de droit qu'ensuite, 320 00:18:15,800 --> 00:18:17,620 cette interprétation lui est opposable. 321 00:18:17,820 --> 00:18:21,020 Alors l'idée derrière cet adjectif d'interprétation formelle, 322 00:18:21,220 --> 00:18:23,900 l'idée du Conseil d'État, c'est de considérer que c'est seulement 323 00:18:24,100 --> 00:18:28,460 lorsque l'administration s'est clairement prononcée lorsque la 324 00:18:28,660 --> 00:18:32,280 lecture du texte montre clairement qu'il y a une prise de position 325 00:18:32,480 --> 00:18:37,020 et a contrario si je puis dire, les cas dans lesquels l'administration 326 00:18:37,220 --> 00:18:41,580 se contente par exemple de recommander, de suggérer, d'indiquer qu'il y 327 00:18:41,780 --> 00:18:45,560 a plusieurs manières de voir, ces cas donc qui ne manifestent 328 00:18:45,760 --> 00:18:48,120 pas une prise de position suffisamment claire ou même des cas, 329 00:18:48,320 --> 00:18:51,340 et ça peut se produire ou une forme de contradiction peut naître entre 330 00:18:51,540 --> 00:18:54,420 plusieurs éléments d'une instruction donc dans tous ces cas-là, 331 00:18:55,180 --> 00:19:01,000 défaut de clarté, défaut d'une intention nette de l'administration, 332 00:19:01,800 --> 00:19:05,260 dans ces cas-là, l'interprétation ne sera pas considérée comme une 333 00:19:05,460 --> 00:19:08,620 prise de position formelle, elle ne sera pas opposable. 334 00:19:08,820 --> 00:19:11,800 Alors c'est relativement rare, la question se pose assez peu ; 335 00:19:12,000 --> 00:19:16,080 elle a pu se poser dans des situations un peu troublantes à certains égards, 336 00:19:16,280 --> 00:19:21,780 notamment s'agissant de formulaires accompagnant, les formulaires de 337 00:19:21,980 --> 00:19:25,280 déclaration de certains impôts sont accompagnés par un formulaire 338 00:19:25,480 --> 00:19:29,840 explicatif, une sorte de mode d'emploi en quelques pages, le Conseil d'État 339 00:19:30,040 --> 00:19:34,640 a tendance à considérer, mais une jurisprudence se dessine 340 00:19:34,840 --> 00:19:37,660 qui suggère peut-être des évolutions à venir, en tout cas 341 00:19:37,860 --> 00:19:42,360 traditionnellement, le Conseil d'État considérait que ces fascicules 342 00:19:42,560 --> 00:19:46,400 explicatifs ne manifestaient pas assez la volonté de l'administration 343 00:19:46,600 --> 00:19:50,700 de s'engager sur une prise de position, relevaient simplement d'une sorte 344 00:19:50,900 --> 00:19:55,080 de mode d'emploi parfois maladroit et que donc cela ne suffisait pas 345 00:19:55,280 --> 00:19:59,520 à les juger formelles, à juger ces prises de position 346 00:19:59,720 --> 00:20:03,440 comme étant formelles et donc ça ne suffisait pas a priori à les 347 00:20:03,640 --> 00:20:05,800 rendre opposables à l'administration, y compris dans les cas où elles 348 00:20:06,000 --> 00:20:10,220 proposeraient par exemple des cas de figure qui n'apparaissent pas 349 00:20:10,420 --> 00:20:13,380 dans la loi et qui sembleraient aux yeux du contribuable plus 350 00:20:13,580 --> 00:20:14,340 favorables. 351 00:20:14,840 --> 00:20:18,340 L'administration encore une fois, en général, est relativement attentive 352 00:20:18,540 --> 00:20:21,800 à ce qu'elle écrit et ensuite, le Conseil d'État n'a pas trop 353 00:20:22,000 --> 00:20:25,020 de difficultés à identifier les cas dans lesquels il y a clairement 354 00:20:25,220 --> 00:20:26,940 une prise de position, ce qui est généralement le cas, 355 00:20:27,140 --> 00:20:30,760 sinon l'administration ne parle pas pour rien dire, donc ces 356 00:20:30,960 --> 00:20:34,900 difficultés d'identification d'une prise de position formelle ne sont 357 00:20:35,100 --> 00:20:37,020 pas si fréquents à vrai dire. 358 00:20:37,220 --> 00:20:39,960 Le dernier élément, je termine là-dessus s'agissant toujours du 359 00:20:40,160 --> 00:20:45,220 contenu, et ça reste une question relativement ouverte et pas si 360 00:20:45,420 --> 00:20:49,000 évidente que cela, c'est la question de savoir si, alors c'est assez 361 00:20:49,200 --> 00:20:53,780 particulier, si les instructions qui s'avèreraient contraires au 362 00:20:53,980 --> 00:20:56,540 droit de l'Union européenne sont également opposables sur le fondement 363 00:20:56,740 --> 00:20:57,500 de l'article L. 364 00:20:57,700 --> 00:20:58,460 80 A. 365 00:20:58,660 --> 00:21:02,800 Alors évidemment qu'une interprétation contraire à la loi est opposable, 366 00:21:03,160 --> 00:21:05,500 enfin c'est l'idée même comme je viens de vous l'expliquer, 367 00:21:05,880 --> 00:21:08,600 en revanche si cette interprétation est contraire au droit de l'Union, 368 00:21:08,800 --> 00:21:13,040 il y a là une difficulté différente puisque laisser finalement un acte 369 00:21:13,240 --> 00:21:15,860 d'imposition prospérer sur le fondement, en tout cas grâce à 370 00:21:16,060 --> 00:21:21,620 l'opposabilité d'une instruction, et ce donc au mépris des prévisions 371 00:21:21,820 --> 00:21:25,280 d'une directive européenne par exemple, en matière de TVA ça peut se poser 372 00:21:25,480 --> 00:21:28,540 de manière assez fréquente en réalité, c'est une manière de laisser prospérer 373 00:21:28,740 --> 00:21:31,320 une situation contraire au droit de l'Union et donc c'est un risque 374 00:21:31,520 --> 00:21:34,800 que de mettre la France finalement en situation de violation du droit 375 00:21:35,000 --> 00:21:38,000 de l'Union européenne au mépris des principes tout à fait évidents 376 00:21:38,200 --> 00:21:41,400 rappelés par la Cour de justice à de très nombreuses reprises qui, 377 00:21:41,960 --> 00:21:47,220 enfin je pense aux arrêts Costa ENEL, Simmenthal que vous avez vu évidemment 378 00:21:47,420 --> 00:21:51,200 et qui donc suggèrent une obligation, enfin une primauté du droit de l'Union, 379 00:21:51,400 --> 00:21:56,120 une obligation pour l'ensemble finalement des institutions publiques 380 00:21:56,320 --> 00:22:00,160 de garantir cette primauté du droit de l'Union et donc de ne pas laisser 381 00:22:00,360 --> 00:22:02,260 prospérer des situations en contrariété avec le droit de l'Union. 382 00:22:02,680 --> 00:22:08,840 Il se trouve qu'une Cour administrative d'appel, celle de Douai en 2005, 383 00:22:10,820 --> 00:22:14,980 dans un arrêt Segafredo Zanetti a considéré qu'effectivement, 384 00:22:15,180 --> 00:22:15,940 la garantie de L. 385 00:22:16,140 --> 00:22:21,720 80 A n'avait pas vocation à s'appliquer lorsque la situation du contribuable 386 00:22:21,920 --> 00:22:25,660 avait beau être conforme à certes une instruction mais était contraire 387 00:22:25,860 --> 00:22:28,380 au droit de l'Union et que la primauté du droit de l'Union ne permettait 388 00:22:28,580 --> 00:22:30,760 pas donc finalement de faire jouer la garantie L. 389 00:22:30,960 --> 00:22:31,720 80 A. 390 00:22:31,920 --> 00:22:35,080 Et la cour administrative d'appel de Paris en 2010 dans un arrêt 391 00:22:35,280 --> 00:22:40,740 SARL A la Frégate, a jugé exactement l'inverse, au terme d'un raisonnement 392 00:22:40,940 --> 00:22:44,670 sophistiqué et pas forcément très convaincant, suggérant que l'article L. 393 00:22:44,870 --> 00:22:48,300 80 A était une forme de transposition en quelque sorte en droit interne 394 00:22:48,500 --> 00:22:52,420 du principe général du droit de l'Union de confiance légitime et 395 00:22:52,620 --> 00:22:57,880 que finalement, le fait que le cas échéant, une instruction soit 396 00:22:58,080 --> 00:23:01,480 contraire à une directive, par exemple une directive TVA, 397 00:23:01,680 --> 00:23:06,920 n'était pas forcément dramatique dès lors que finalement, 398 00:23:07,120 --> 00:23:07,880 comme L. 399 00:23:08,080 --> 00:23:11,620 80 A serait une forme de transposition de ce principe général de confiance 400 00:23:11,820 --> 00:23:16,580 légitime, ce principe général a vocation à primer sur les dispositions 401 00:23:16,780 --> 00:23:19,160 d'un certain nombre de directives européennes, c'est une logique 402 00:23:19,360 --> 00:23:22,380 de hiérarchie des normes européennes, et que finalement, le contribuable 403 00:23:22,580 --> 00:23:26,400 français devrait se trouver protégé donc par, au bout du compte, 404 00:23:26,600 --> 00:23:27,360 cet article L. 405 00:23:27,560 --> 00:23:31,740 80 A, manière de transposer, je le répète, un principe général 406 00:23:31,940 --> 00:23:32,700 du droit de l'Union. 407 00:23:32,900 --> 00:23:34,860 Alors le raisonnement est intéressant, il est un peu tortueux, 408 00:23:35,060 --> 00:23:38,460 c'est pour ça que je l'ai présenté assez brièvement, à mon sens, 409 00:23:38,660 --> 00:23:40,700 il n'est guère convaincant, tout simplement parce que ce principe 410 00:23:40,900 --> 00:23:42,920 général qu'évoque la Cour administrative d'appel de Paris 411 00:23:43,120 --> 00:23:45,680 existe évidemment en droit de l'Union mais avec des conditions d'application 412 00:23:45,880 --> 00:23:48,960 extrêmement strictes et mille fois plus strictes que celles attachées 413 00:23:49,160 --> 00:23:50,040 à l'article L. 414 00:23:50,240 --> 00:23:51,000 80 A. 415 00:23:51,200 --> 00:23:54,600 Donc le raisonnement me semble tout à fait contraire en réalité 416 00:23:54,800 --> 00:23:57,860 au droit de l'Union mais peu importe, sauf à ce que demain, 417 00:23:58,060 --> 00:24:03,060 la commission saisisse la Cour de justice d'un cas de cette nature 418 00:24:03,260 --> 00:24:07,080 et que la France finalement soit condamnée pour l'application d'un 419 00:24:07,280 --> 00:24:11,020 tel raisonnement, sauf que précisément, la situation ne s'est jamais produite 420 00:24:11,220 --> 00:24:14,120 pour le moment et que depuis 2010, les choses sont restées en l'état 421 00:24:14,320 --> 00:24:16,360 parce que le Conseil d'État n'a pas eu à se prononcer, 422 00:24:16,560 --> 00:24:19,200 en réalité personne ne souhaite que le Conseil d'État se prononce, 423 00:24:19,400 --> 00:24:22,340 l'administration fiscale elle-même ne souhaite pas que le Conseil 424 00:24:22,540 --> 00:24:25,300 d'État se prononce parce que l'administration, finalement, 425 00:24:25,500 --> 00:24:28,300 préfère continuer d'user d'une certaine liberté d'interprétation, 426 00:24:28,500 --> 00:24:32,180 y compris du droit de l'Union européenne et finalement donc lorsque 427 00:24:32,380 --> 00:24:35,700 ce type de situation se présente, c'est-à-dire qu'un contribuable 428 00:24:35,900 --> 00:24:38,720 se serait vu redressé pour avoir suivi les instructions de 429 00:24:38,920 --> 00:24:43,140 l'administration et ce contrairement à une directive, il peut se trouver 430 00:24:43,340 --> 00:24:48,200 un vérificateur pour se lancer à l'assaut du contribuable alors 431 00:24:48,400 --> 00:24:51,160 même que celui-ci a respecté la doctrine administrative, 432 00:24:52,200 --> 00:24:55,340 une fois que le dossier arrive devant le juge, ce ne sont plus 433 00:24:55,540 --> 00:24:59,260 les mêmes services en réalité qui instruisent les dossiers contentieux, 434 00:24:59,460 --> 00:25:02,880 ce ne sont plus les mêmes que ceux qui ont dans un premier temps instruit 435 00:25:03,080 --> 00:25:07,000 finalement le redressement fiscal, et donc cette administration centrale 436 00:25:07,200 --> 00:25:11,260 qui va être saisie du dossier aura vraisemblablement le souci d'arrêter 437 00:25:11,460 --> 00:25:14,460 les frais et donc accordera ce qu'on appelle la décharge au 438 00:25:14,660 --> 00:25:16,720 contribuable, c'est-à-dire qu'il donnera raison, ce service 439 00:25:16,920 --> 00:25:19,740 vraisemblablement donnera raison au contribuable pour éviter que 440 00:25:19,940 --> 00:25:22,480 ça se retrouve devant le Conseil d'État et qu'il ait à juger dans 441 00:25:22,680 --> 00:25:25,900 un sens qui en réalité ne plairait pas à l'administration. 442 00:25:26,100 --> 00:25:30,860 Bref, la question reste ouverte, peut-on en toute tranquillité se 443 00:25:31,060 --> 00:25:33,380 fier aux indications de la doctrine qui s'avèreraient contraires au 444 00:25:33,580 --> 00:25:34,500 droit de l'Union européenne ? 445 00:25:34,700 --> 00:25:38,220 En pratique on peut supposer que oui, même si juridiquement, 446 00:25:38,420 --> 00:25:41,680 la chose n'est pas complètement certaine, il y aura donc une petite 447 00:25:41,880 --> 00:25:43,400 prise de risque. 448 00:25:43,600 --> 00:25:47,480 Tout dernier point peut-être, au titre, parce que c'est à cheval 449 00:25:47,680 --> 00:25:51,460 entre la question de la situation du contribuable et la notion de 450 00:25:51,660 --> 00:25:55,040 doctrine elle-même et son contenu, c'est la question de la publication, 451 00:25:55,240 --> 00:25:59,440 simplement je rappelle ce que j'ai évoqué brièvement mais disons-le 452 00:25:59,640 --> 00:26:03,660 à ce stade, la doctrine publiée est toujours invocable, 453 00:26:03,860 --> 00:26:08,200 quoi qu'elle dise, lorsqu'elle n'est pas publiée, alors il y a 454 00:26:08,400 --> 00:26:11,260 là une petite différence entre l'alinéa 1 et l'alinéa 3, 455 00:26:11,460 --> 00:26:15,700 l'alinéa 3 fait référence en pratique à de la doctrine publiée, 456 00:26:15,900 --> 00:26:19,580 circulaires et instructions publiées, tandis que l'alinéa 1 n'y fait 457 00:26:19,780 --> 00:26:22,700 pas référence, c'est la raison pour laquelle sur le fondement 458 00:26:22,900 --> 00:26:26,120 de l'alinéa 1, peuvent être opposées à l'administration non seulement 459 00:26:26,320 --> 00:26:28,060 des choses publiées mais également des choses non publiées, 460 00:26:28,260 --> 00:26:29,680 des rescrits en particulier. 461 00:26:29,880 --> 00:26:34,320 Sauf que, et c'est là la petite subtilité, l'alinéa 1 ne se réfère 462 00:26:34,520 --> 00:26:38,740 qu'aux cas de rehaussement d'imposition antérieure alors que l'alinéa 3 463 00:26:39,200 --> 00:26:41,680 plus largement parle des rehaussements d'imposition, quelle est la 464 00:26:41,880 --> 00:26:42,640 différence ? 465 00:26:42,840 --> 00:26:45,660 La différence, c'est que l'alinéa 3 vise tous les cas dans lesquels 466 00:26:45,860 --> 00:26:48,960 l'administration veut redresser, y compris un contribuable qui n'aurait 467 00:26:49,160 --> 00:26:51,720 rien payé dans un premier temps, il n'y aurait donc pas eu d'imposition 468 00:26:51,920 --> 00:26:55,140 antérieure, tandis que le premier alinéa, lui, se réfère uniquement 469 00:26:55,340 --> 00:26:58,260 aux cas où le contribuable a déjà payé quelque chose sur le fondement 470 00:26:58,460 --> 00:27:01,680 de sa première déclaration et donc il y a une imposition antérieure 471 00:27:01,880 --> 00:27:03,320 qui est rehaussée. 472 00:27:03,520 --> 00:27:06,040 Concrètement, ce que ça signifie et ce que je vous demande de retenir, 473 00:27:06,240 --> 00:27:10,920 c'est que sur le fondement de l'alinéa 1, les rescrits sont opposables 474 00:27:11,120 --> 00:27:14,120 sauf si sur le fondement du rescrit, il n'y a eu aucune imposition. 475 00:27:14,320 --> 00:27:18,520 Donc le rescrit qui conclut à l'absence totale d'imposition n'est pas opposable 476 00:27:18,720 --> 00:27:21,800 à l'administration, ça n'est que le rescrit qui conduit à une forme 477 00:27:22,000 --> 00:27:24,900 d'imposition moins importante que celle que réclame ensuite 478 00:27:25,100 --> 00:27:28,200 l'administration, ça n'est que ce rescrit qui pourrait être opposable 479 00:27:28,400 --> 00:27:30,960 sur le fondement du premier alinéa puisqu'il y a eu une imposition 480 00:27:31,160 --> 00:27:34,920 antérieure plus faible par hypothèse, tandis que sur le fondement du 481 00:27:35,120 --> 00:27:38,940 troisième alinéa, seules les instructions publiées peuvent être 482 00:27:39,140 --> 00:27:41,780 opposées, y compris celles donc qui concluraient que dans certaines 483 00:27:41,980 --> 00:27:44,540 situations, aucune imposition n'est due, celles-ci parce qu'elles sont 484 00:27:44,740 --> 00:27:45,720 publiées sont opposables. 485 00:27:45,920 --> 00:27:49,900 L'idée donc, c'est de ne pas permettre à un agent tout seul signant un 486 00:27:50,100 --> 00:27:53,260 rescrit un peu dans son coin d'autoriser finalement une absence 487 00:27:53,460 --> 00:27:54,860 totale d'imposition. 488 00:27:55,060 --> 00:27:59,080 Voilà donc pour ces conséquences liées à l'absence de publication 489 00:27:59,280 --> 00:28:02,400 ou à la publication d'une doctrine, même si par principe on l'a vu, 490 00:28:02,600 --> 00:28:05,340 toutes les formes de doctrine, même non publiées, sont opposables, 491 00:28:05,540 --> 00:28:08,740 à moins qu'elles concluent à l'absence totale d'imposition, 492 00:28:08,940 --> 00:28:12,260 là, ce sont seulement celles qui sont publiées qui sont opposables.