1 00:00:05,140 --> 00:00:07,120 Chapitre 2 : le régime des actes. 2 00:00:07,870 --> 00:00:11,260 Les actes juridiques de l'Union européenne sont soumis à un régime 3 00:00:11,460 --> 00:00:15,610 qui est à la fois déterminé par le traité, dans une certaine mesure 4 00:00:15,810 --> 00:00:19,330 par certains actes de droit dérivé, mais en tout cas précisés par la 5 00:00:19,530 --> 00:00:20,290 jurisprudence. 6 00:00:20,560 --> 00:00:24,760 Et ce sont plutôt ici les grands principes qui vont nous intéresser 7 00:00:26,830 --> 00:00:30,430 avant de voir les règles formelles relatives à l'édiction des actes 8 00:00:31,450 --> 00:00:35,350 et de régler les questions délicates d'application dans le temps des 9 00:00:35,550 --> 00:00:36,310 actes de droit de l'Union. 10 00:00:36,910 --> 00:00:39,160 Mais commençons donc, paragraphe 1, par les principes 11 00:00:39,360 --> 00:00:44,650 généraux et le premier des grands principes, la sécurité juridique. 12 00:00:44,890 --> 00:00:48,520 Premier des grands principes parce que c'est finalement le premier 13 00:00:48,720 --> 00:00:52,660 des principes consacrés par la Cour de justice dans un arrêt de 1961, 14 00:00:52,860 --> 00:00:59,890 S.N.U.P.A.T., affaire 49/59, et depuis, vous avez une jurisprudence 15 00:01:00,090 --> 00:01:06,100 extrêmement riche qui ne cesse de parler du principe de sécurité 16 00:01:06,300 --> 00:01:10,450 juridique sans qu'on sache exactement toujours quels sont ses contours 17 00:01:10,650 --> 00:01:11,410 exacts. 18 00:01:11,680 --> 00:01:14,770 Ce qui est certain, c'est que ce principe régit l'exercice par les 19 00:01:14,970 --> 00:01:18,550 institutions de l'Union d'un pouvoir normatif, celui d'adopter des actes 20 00:01:19,120 --> 00:01:24,730 juridiques, et qui nous dit que les actes, donc, c'est-à-dire la 21 00:01:24,930 --> 00:01:27,850 réglementation, la législation de l'Union, doit être certaine 22 00:01:28,050 --> 00:01:31,060 et son application prévisible pour les justiciables. 23 00:01:33,030 --> 00:01:38,400 Cet acte, donc ici, doit répondre 24 00:01:38,600 --> 00:01:42,660 aux impératifs de sécurité juridique qui comportent tout d'abord une 25 00:01:42,860 --> 00:01:44,220 prévisibilité temporelle. 26 00:01:45,960 --> 00:01:48,210 De manière générale, ça signifie que tout acte de droit 27 00:01:48,410 --> 00:01:50,940 de l'Union doit être porté à la connaissance de l'intéressé de 28 00:01:51,140 --> 00:01:55,020 telle manière à ce que celui-ci puisse connaître avec certitude 29 00:01:56,040 --> 00:02:01,080 le moment à partir duquel ledit acte s'applique et commence à produire 30 00:02:01,280 --> 00:02:04,620 ses effets juridiques, autrement dit, l'entrée en vigueur 31 00:02:04,820 --> 00:02:05,580 de l'acte. 32 00:02:07,020 --> 00:02:11,040 Il faut donc faire attention ici à tout ce qui peut être lié à la 33 00:02:11,240 --> 00:02:14,130 publication ou à la notification de l'acte, comme on le verra tout 34 00:02:14,330 --> 00:02:15,090 à l'heure. 35 00:02:15,290 --> 00:02:18,810 On considère par exemple que, est attentatoire à la sécurité 36 00:02:19,010 --> 00:02:22,710 juridique, le fait de reporter la date d'entrée en vigueur d'un 37 00:02:22,910 --> 00:02:26,490 acte ayant une portée générale alors que la date initialement 38 00:02:26,690 --> 00:02:28,100 prévue est déjà passée, affaire Kloppenburg 70/83. 39 00:02:32,010 --> 00:02:35,190 Il y a une seconde dimension dans la sécurité juridique, 40 00:02:36,060 --> 00:02:40,380 plus institutionnelle puisqu'il s'agit de garantir la prévisibilité 41 00:02:40,580 --> 00:02:43,080 des situations et des relations juridiques qui relèvent du droit 42 00:02:43,280 --> 00:02:44,040 de l'Union. 43 00:02:44,240 --> 00:02:49,410 Ici, les institutions doivent respecter l'intangibilité des actes qu'elles 44 00:02:49,610 --> 00:02:54,060 ont adoptés et qui affectent la situation juridique et matérielle 45 00:02:54,260 --> 00:02:55,020 des sujets de droit. 46 00:02:56,730 --> 00:03:00,240 Et de surcroît, les institutions ne peuvent modifier ces actes que 47 00:03:00,440 --> 00:03:02,910 dans le respect des règles de compétence et de procédure. 48 00:03:03,110 --> 00:03:06,840 Enfin, il y a une troisième dimension de la sécurité juridique qu'on 49 00:03:07,040 --> 00:03:10,590 dira plutôt matérielle, et qui permet donc aux personnes 50 00:03:10,790 --> 00:03:16,170 de connaître avec certitude et exactitude l'étendue des obligations 51 00:03:16,370 --> 00:03:17,370 que l'acte leur impose. 52 00:03:18,510 --> 00:03:22,530 Le principe s'impose ici avec une rigueur particulière lorsqu'il 53 00:03:22,730 --> 00:03:26,370 s'agit d'une réglementation susceptible de comporter des conséquences 54 00:03:26,570 --> 00:03:29,820 financières, insiste la Cour de justice, par exemple, 55 00:03:30,020 --> 00:03:32,130 dans une affaire France contre Commission, affaire C-336/85. 56 00:03:36,780 --> 00:03:40,620 La sécurité juridique, c'est donc ce grand principe qui 57 00:03:42,450 --> 00:03:46,620 encadre la manière dont les actes juridiques sont adoptés et qui 58 00:03:46,830 --> 00:03:50,860 comporte une dimension qui s'est en quelque sorte émancipée, 59 00:03:52,920 --> 00:03:57,420 c'est la confiance du juge légitime, certes liée à la sécurité juridique, 60 00:03:57,720 --> 00:04:01,170 mais devenue en quelque sorte autonome, selon la jurisprudence, 61 00:04:02,070 --> 00:04:04,470 d'autant que son succès contentieux est important. 62 00:04:05,160 --> 00:04:08,790 La confiance légitime, c'est en réalité ce principe, 63 00:04:08,990 --> 00:04:11,910 au demeurant tiré des traditions constitutionnelles des États, 64 00:04:12,270 --> 00:04:15,810 plus précisément d'une tradition germanique du droit, 65 00:04:16,010 --> 00:04:21,100 puisqu'on ne la retrouve pas dans la jurisprudence française, 66 00:04:21,300 --> 00:04:25,060 le Conseil constitutionnel dénie son existence et le Conseil d'État 67 00:04:25,260 --> 00:04:29,200 aussi, affaire KPMG de 2006 pour le Conseil d'État, Loi de finances 68 00:04:29,400 --> 00:04:35,590 pour 97 affaire 96-385 DC  pour le Conseil constitutionnel. 69 00:04:36,100 --> 00:04:40,030 Mais c'est un principe qui s'applique néanmoins dans le champ du droit 70 00:04:40,230 --> 00:04:42,910 de l'Union lorsque le droit de l'Union est mis en œuvre et qui 71 00:04:43,110 --> 00:04:45,550 fait partie des grands principes du droit de l'Union européenne. 72 00:04:47,200 --> 00:04:49,930 Cette inversion subjective, en quelque sorte, de la sécurité 73 00:04:50,130 --> 00:04:57,490 juridique, l'idée, c'est que la confiance légitime, c'est la protection 74 00:04:57,690 --> 00:05:05,980 légitime à laquelle les justiciables ont droit lorsque les institutions 75 00:05:06,180 --> 00:05:09,220 modifient les actes en vigueur ou fournissent des renseignements 76 00:05:09,420 --> 00:05:10,180 erronés. 77 00:05:11,410 --> 00:05:15,070 La Cour de justice a donc précisé dans sa jurisprudence les conditions 78 00:05:15,270 --> 00:05:18,790 dans lesquelles les institutions respectent ou au contraire 79 00:05:18,990 --> 00:05:20,320 méconnaissent ce principe. 80 00:05:20,520 --> 00:05:25,000 1, il faut apprécier si le comportement de l'institution a fait naître 81 00:05:25,200 --> 00:05:32,110 des espérances légitimes dans le chef des justiciables et 2, 82 00:05:32,680 --> 00:05:35,470 si cette confiance est donc bien légitime et raisonnable, 83 00:05:35,670 --> 00:05:39,880 en ce sens qu'une modification du droit n'était pas initialement 84 00:05:40,080 --> 00:05:40,840 envisageable. 85 00:05:41,040 --> 00:05:45,760 Enfin, dernier élément, la Cour met en balance l'efficacité 86 00:05:45,960 --> 00:05:50,230 de l'action de l'administration et les intérêts du justiciable. 87 00:05:51,160 --> 00:05:55,120 Voilà donc ce principe soumis à ces trois conditions cumulatives 88 00:05:55,420 --> 00:06:00,370 qui fait que s'il est souvent invoqué dans le prétoire de la Cour de justice, 89 00:06:00,570 --> 00:06:04,930 il est malgré tout assez rarement reconnu, sa violation n'est pas 90 00:06:05,680 --> 00:06:07,960 reconnue de manière régulière par la Cour. 91 00:06:09,250 --> 00:06:11,830 Voilà donc pour les deux grands principes de sécurité juridique 92 00:06:12,030 --> 00:06:12,910 et de confiance légitime. 93 00:06:13,570 --> 00:06:15,880 Voyons maintenant, paragraphe 2, les règles de forme. 94 00:06:19,480 --> 00:06:24,190 Le droit de l'Union, même si on l'a vu, fait preuve 95 00:06:24,390 --> 00:06:28,660 d'une interprétation libérale par la Cour de justice, n'échappe pas 96 00:06:28,860 --> 00:06:33,670 à un certain degré de formalisme, formalisme qui, ici, 97 00:06:35,770 --> 00:06:39,940 implique des règles dont on peut distinguer la nature selon qu'elles 98 00:06:40,140 --> 00:06:44,320 sont des conditions d'opposabilité ou au contraire  des conditions 99 00:06:44,520 --> 00:06:45,310 de validité. 100 00:06:45,510 --> 00:06:51,880 D'abord, les conditions d'opposabilité, le fait que les actes juridiques 101 00:06:52,080 --> 00:06:54,580 ne peuvent être opposables s'ils ne remplissent un certain nombre 102 00:06:54,780 --> 00:06:58,450 de règles, en premier lieu, la règle de la publication, 103 00:06:58,810 --> 00:07:06,520 article 297 TFUE puisque tous les actes législatifs ainsi que les 104 00:07:06,720 --> 00:07:10,360 actes non législatifs, mais qui sont adoptés sous forme 105 00:07:10,560 --> 00:07:13,630 de règlements et de directives ou de décisions n'ayant pas de 106 00:07:13,830 --> 00:07:16,660 destinataires, eh bien tous ces actes doivent faire l'objet, 107 00:07:16,860 --> 00:07:21,400 article 297, d'une publication au Journal Officiel de l'Union 108 00:07:21,600 --> 00:07:26,920 européenne, dans les conditions précisées par le règlement intérieur 109 00:07:27,120 --> 00:07:30,100 des différentes institutions, ce qui explique que vous trouvez 110 00:07:30,300 --> 00:07:34,600 dans le JO de l’UE une série L, législative, les actes qui ont 111 00:07:34,800 --> 00:07:39,010 une portée contraignante, des règlements, des directives 112 00:07:39,210 --> 00:07:42,490 et des décisions à portée générale qui produisaient les effets donc, 113 00:07:43,120 --> 00:07:45,970 et la série C qui sont les actes, eux, qui ne sont pas contraignants. 114 00:07:49,900 --> 00:07:52,660 En revanche, les directives qui ne sont pas adressées à tous les 115 00:07:52,860 --> 00:07:55,660 États membres, ça arrive, une directive peut être adressée 116 00:07:55,860 --> 00:07:59,590 à un seul État, ça arrive rarement, mais ça arrive, ainsi que les décisions 117 00:07:59,790 --> 00:08:02,110 qui ont un destinataire, les décisions individuelles ou 118 00:08:02,310 --> 00:08:04,450 qui ont plusieurs destinataires, mais qui restent néanmoins 119 00:08:04,650 --> 00:08:07,720 individuelles, elles, entrent en vigueur à partir du 120 00:08:07,920 --> 00:08:11,620 moment où elles sont opposables ou elles sont notifiées à leurs 121 00:08:11,820 --> 00:08:12,580 destinataires. 122 00:08:12,970 --> 00:08:16,420 Ce sont là des règles de notification qui sont davantage prévues par 123 00:08:16,620 --> 00:08:18,340 le règlement intérieur des institutions. 124 00:08:21,850 --> 00:08:25,420 On l'aura compris, ces règles de publicité sont des conditions 125 00:08:25,620 --> 00:08:29,590 d'opposabilité, n'ont pas ici d'impact sur la validité de l'acte. 126 00:08:29,890 --> 00:08:35,410 En revanche, la Cour de justice estime qu'il y a bien un principe 127 00:08:35,610 --> 00:08:39,280 fondamental dans l'ordre juridique de l'Union selon lequel un acte 128 00:08:39,480 --> 00:08:43,810 des institutions n'est pas opposable aux justiciables avant que ceux-ci 129 00:08:44,050 --> 00:08:48,450 n'aient pu avoir la possibilité d'en prendre connaissance, 130 00:08:48,650 --> 00:08:50,710 affaire Racke, 1979, 98/78. 131 00:08:53,890 --> 00:08:59,740 C'est bien là la condition donc de l'inopposabilité, composante 132 00:08:59,940 --> 00:09:02,710 en quelque sorte de la sécurité juridique, dit la Cour dans l'affaire 133 00:09:02,910 --> 00:09:13,540 Skoma-Lux, affaire C-161/06, et qui a pour conséquence concrète 134 00:09:14,380 --> 00:09:21,880 le fait que, aussi longtemps que l'acte n'a pas pu être porté par 135 00:09:22,080 --> 00:09:26,500 des moyens officiels à la connaissance du particulier, eh bien il ne serait 136 00:09:26,980 --> 00:09:34,210 lui être opposable, ce qui implique par exemple que le fait qu'un acte 137 00:09:35,950 --> 00:09:39,850 comporte une annexe, laquelle n'a pas été publiée au 138 00:09:40,050 --> 00:09:46,930 Journal Officiel, eh bien rend cette annexe inopposable aux différents 139 00:09:47,950 --> 00:09:52,040 particuliers dont la situation est régie par l'acte. 140 00:09:56,850 --> 00:09:59,970 Conditions donc d'opposabilité qui sont différentes des conditions 141 00:10:00,170 --> 00:10:00,960 de validité. 142 00:10:01,160 --> 00:10:04,830 Là, ce sont des conditions formelles, mais évidemment déterminantes en 143 00:10:05,030 --> 00:10:06,300 termes de sécurité juridique. 144 00:10:07,620 --> 00:10:10,380 Ça part de quelque chose d'anodin, mais symboliquement fort, 145 00:10:10,580 --> 00:10:12,750 la signature de l'acte, tous les actes doivent être signés, 146 00:10:14,580 --> 00:10:18,600 ce qui aujourd'hui, question à peu près réglée, sauf lorsque se 147 00:10:18,800 --> 00:10:21,780 pose le problème des délégations de signature évidemment, 148 00:10:22,390 --> 00:10:26,070 on peut penser aux manières de concurrence des délégations de 149 00:10:26,820 --> 00:10:28,560 signature au sein de la Commission européenne. 150 00:10:29,280 --> 00:10:32,010 Et surtout article 296, et ça, en revanche, c'est très 151 00:10:32,210 --> 00:10:35,600 important, les actes doivent être motivés. 152 00:10:35,800 --> 00:10:39,000 Tous les actes doivent être motivés, ce n'est pas simplement un souci 153 00:10:39,200 --> 00:10:42,840 formel, nous dit la jurisprudence, cela doit donner la possibilité 154 00:10:43,040 --> 00:10:47,040 aux intéressés de défendre leur droit, à la Cour d'exercer son contrôle 155 00:10:48,390 --> 00:10:51,330 et aux États membres comme aux particuliers de connaître les 156 00:10:51,530 --> 00:10:55,650 conditions dans lesquelles les institutions ont appliqué le traité, 157 00:10:55,850 --> 00:10:58,740 dit la Cour dans un arrêt Allemagne contre Commission, affaire 24/62, 158 00:10:58,940 --> 00:11:03,840 formalité substantielle qui fait partie donc des conditions de légalité, 159 00:11:04,590 --> 00:11:09,630 eh bien, ici, cette condition est 160 00:11:09,830 --> 00:11:13,260 contrôlée par la Cour de justice, qui n'hésite pas à annuler des 161 00:11:13,460 --> 00:11:17,220 actes au motif qu'ils feraient l'objet d'une motivation insuffisante. 162 00:11:18,810 --> 00:11:22,800 C'est donc un élément extrêmement important, d'autant que de la 163 00:11:23,000 --> 00:11:26,730 motivation dépend ensuite, évidemment, le contrôle au fond 164 00:11:26,930 --> 00:11:33,290 de l'acte, et notamment le respect, par exemple, du traité où les actes 165 00:11:33,490 --> 00:11:36,930 de qualification juridique des faits sont tributaires de la motivation 166 00:11:37,380 --> 00:11:38,140 des actes. 167 00:11:39,090 --> 00:11:42,960 C'est ainsi une condition générale qui vaut pour les actes typiques 168 00:11:43,160 --> 00:11:46,290 et atypiques, tous les actes sont concernés par cette obligation 169 00:11:47,220 --> 00:11:48,330 de motivation. 170 00:11:48,530 --> 00:11:53,040 Enfin, dernière condition formelle, mais ô combien importante là encore, 171 00:11:53,240 --> 00:11:58,290 le régime linguistique, article 355 du TUE, vous savez 172 00:11:58,490 --> 00:12:01,800 qu'il y a un certain nombre de langues officielles et le régime 173 00:12:02,000 --> 00:12:06,420 juridique en termes linguistiques des institutions est fixé par l'article 174 00:12:06,620 --> 00:12:11,660 342 du traité FUE, tel que précisé 175 00:12:11,860 --> 00:12:15,290 par un règlement du conseil adopté à l'unanimité et c'est d'ailleurs 176 00:12:15,490 --> 00:12:18,140 un règlement, le numéro 1, le premier règlement adopté dans 177 00:12:18,340 --> 00:12:21,830 l'histoire de la Communauté européenne en 1958, le règlement numéro 1 178 00:12:22,280 --> 00:12:25,910 qui fixe le régime linguistique en la matière et qui détermine 179 00:12:26,110 --> 00:12:29,300 ici 24 langues officielles des institutions. 180 00:12:30,920 --> 00:12:33,320 Ce sont des langues qui correspondent aux langues des États membres, 181 00:12:33,520 --> 00:12:37,780 bien entendu, posant la question du sort de l'anglais avec le Brexit. 182 00:12:38,810 --> 00:12:42,230 La question a été discutée, mais l'anglais demeure une langue 183 00:12:42,430 --> 00:12:44,810 officielle, ne serait-ce que parce qu'elle est la langue officielle, 184 00:12:45,010 --> 00:12:47,720 encore, une des langues officielles de l'Irlande et de Malte, 185 00:12:48,170 --> 00:12:51,830 ce qui fait que l'anglais reste encore aujourd'hui une langue 186 00:12:52,030 --> 00:12:52,790 officielle. 187 00:12:54,650 --> 00:12:58,400 Se pose également la question des langues régionales, à cet égard, 188 00:12:58,600 --> 00:13:02,210 on laisse une certaine liberté aux États, notamment en fonction 189 00:13:02,410 --> 00:13:05,930 de leur ordre constitutionnel, puisque dans certains États, 190 00:13:06,130 --> 00:13:10,280 plusieurs langues officielles peuvent coexister, ce qui appelle ici, 191 00:13:10,480 --> 00:13:14,030 le cas échéant, des arrangements comme celui qui a été conclu entre 192 00:13:14,230 --> 00:13:18,230 la Commission et l'Espagne en 2006 pour régler l'utilisation de certaines 193 00:13:18,430 --> 00:13:20,870 langues régionales comme le basque ou du catalan, par exemple. 194 00:13:22,040 --> 00:13:25,850 Mais pour le reste, on a quand même un principe d'égalité entre 195 00:13:26,050 --> 00:13:31,040 les langues officielles, relayé par un droit fondamental 196 00:13:31,240 --> 00:13:33,970 interdisant toute discrimination fondée par la langue, 197 00:13:34,170 --> 00:13:38,120 article 21 de la Charte des droits fondamentaux, ce qui peut poser 198 00:13:38,570 --> 00:13:43,550 aujourd'hui la question de l'utilisation par certaines 199 00:13:43,750 --> 00:13:45,890 institutions de certaines langues par rapport à d'autres, 200 00:13:46,610 --> 00:13:50,930 et notamment la prédominance de l'anglais, même si le principe 201 00:13:51,860 --> 00:13:58,410 est qu'ici, les citoyens de l'Union 202 00:13:58,770 --> 00:14:04,890 ont un droit, article toujours 21, à ce que les institutions communiquent 203 00:14:05,090 --> 00:14:06,810 avec elles dans la langue de leur choix. 204 00:14:07,010 --> 00:14:10,980 On terminera enfin, paragraphe 3, par la délicate question de 205 00:14:11,180 --> 00:14:13,470 l'application dans le temps des actes de droit de l'Union, 206 00:14:14,460 --> 00:14:19,470 parce qu'ici, tout acte juridique implique une entrée en vigueur. 207 00:14:20,070 --> 00:14:25,230 L'entrée en vigueur répond à des exigences de sécurité juridique, 208 00:14:25,430 --> 00:14:30,870 bien entendu, et ce qui explique une différence entre l'acte notifié 209 00:14:31,070 --> 00:14:33,750 qui entre en vigueur le jour où il est notifié, et l'acte faisant 210 00:14:33,950 --> 00:14:37,710 l'objet d'une publication dont l'entrée en vigueur dépend des 211 00:14:37,910 --> 00:14:43,470 conditions de l'article 297 TFUE, étant précisé que l'acte lui-même 212 00:14:43,740 --> 00:14:48,720 peut prévoir une entrée en vigueur différente ou pour sa globalité, 213 00:14:48,920 --> 00:14:50,460 pour certaines de ses dispositions. 214 00:14:50,660 --> 00:14:54,420 Ici donc il y a une liberté qui est donnée, à la condition évidemment, 215 00:14:54,840 --> 00:15:00,630 de préciser la date d'entrée en vigueur qui est tributaire de la 216 00:15:01,410 --> 00:15:04,870 publication au Journal Officiel de l'Union européenne pour les actes, 217 00:15:05,070 --> 00:15:08,970 règlements, directives adressées à tous les États membres et décisions 218 00:15:09,170 --> 00:15:10,500 n'ayant pas de destinataire. 219 00:15:11,130 --> 00:15:14,970 On notera que le JO UE est aujourd'hui disponible uniquement en version 220 00:15:15,170 --> 00:15:17,610 électronique, ce qui facilite les choses. 221 00:15:18,480 --> 00:15:20,730 Une fois entré en vigueur, le principe est celui de 222 00:15:20,930 --> 00:15:21,990 l'intangibilité. 223 00:15:22,260 --> 00:15:26,880 En effet, l'acte publié ou notifié jouit d'une présomption de validité 224 00:15:27,080 --> 00:15:30,480 et produit des effets juridiques aussi longtemps qu'il n'a pas été 225 00:15:30,680 --> 00:15:36,210 annulé, retiré ou que son application n'a pas été suspendue par une décision 226 00:15:36,420 --> 00:15:40,800 de la Cour de justice ou par une décision de l'autorité de l'institution 227 00:15:41,000 --> 00:15:41,760 qu'il a adopté. 228 00:15:44,970 --> 00:15:46,280 Ceci a des conséquences. 229 00:15:46,480 --> 00:15:49,020 D'abord, la première, c'est le parallélisme des règles 230 00:15:49,220 --> 00:15:50,340 de compétence et de procédure. 231 00:15:50,540 --> 00:15:54,450 L'acte peut certes être modifié, mais uniquement dans le respect 232 00:15:54,650 --> 00:16:00,910 de ce parallélisme des actes, c'est-à-dire des règles de compétence 233 00:16:01,110 --> 00:16:01,870 et de procédure. 234 00:16:02,070 --> 00:16:08,780 Ensuite, il est important que l'acte 235 00:16:10,370 --> 00:16:14,450 puisse produire un effet posant la question de l'inexistence de 236 00:16:14,650 --> 00:16:15,410 certains actes. 237 00:16:15,610 --> 00:16:19,770 En effet, en droit de l'Union, existe une théorie de l'inexistence, 238 00:16:20,180 --> 00:16:23,450 voir l'affaire BASF, une affaire C-137/92 P, 239 00:16:24,920 --> 00:16:28,730 en vertu duquel, eh bien, certains actes sont affectés d'une 240 00:16:29,810 --> 00:16:33,470 violation de la légalité si grave, si grave qu'ils sont réputés ne 241 00:16:33,670 --> 00:16:35,060 jamais avoir été adoptés. 242 00:16:36,620 --> 00:16:38,240 C'est très rare, mais ça existe. 243 00:16:39,290 --> 00:16:43,790 Mais bon, en situation normale, eh bien l'acte entre en vigueur 244 00:16:44,330 --> 00:16:48,890 et produit un effet immédiat, c'est-à-dire qu'il régit les situations 245 00:16:49,090 --> 00:16:50,720 existantes et les situations futures. 246 00:16:50,920 --> 00:16:55,640 L'acte peut donc modifier les réglementations en vigueur au moment 247 00:16:55,840 --> 00:16:59,120 où il commence à produire ses effets et il va s'appliquer aux relations 248 00:16:59,320 --> 00:17:02,270 contractuelles en cours, en ce qui concerne, mais uniquement, 249 00:17:02,470 --> 00:17:05,480 les effets futurs de ces relations contractuelles. 250 00:17:07,490 --> 00:17:11,180 Le principe en droit de l'Union, c'est que les particuliers n'ont 251 00:17:11,390 --> 00:17:13,580 aucun droit acquis au maintien d'une réglementation. 252 00:17:13,780 --> 00:17:17,690 Toutefois, la Cour de justice a dégagé quand même une protection 253 00:17:17,890 --> 00:17:25,400 des droits acquis sous l'empire d'une réglementation antérieure. 254 00:17:25,600 --> 00:17:30,620 Ici, on retrouve la volonté d'une 255 00:17:30,820 --> 00:17:35,120 protection de la confiance légitime et donc des conditions sont posées 256 00:17:36,530 --> 00:17:41,960 pour régir les situations passées que l'acte nouveau, eh bien, 257 00:17:42,160 --> 00:17:42,920 modifie. 258 00:17:43,120 --> 00:17:49,430 À cela s'ajoute le fait que, en principe, la sécurité juridique 259 00:17:49,630 --> 00:17:53,690 exclut un effet rétroactif des actes, c'est-à-dire qu'un acte ne peut 260 00:17:53,890 --> 00:17:56,780 pas entrer en vigueur à une date antérieure à celle de sa publication. 261 00:17:58,580 --> 00:18:01,850 En soi, c'est une violation du principe de sécurité juridique, 262 00:18:02,050 --> 00:18:05,990 même si, de manière exceptionnelle, la rétroactivité d'un acte peut 263 00:18:06,190 --> 00:18:09,380 être admise dans des conditions qui sont fixées par la jurisprudence 264 00:18:09,580 --> 00:18:15,020 Racke, affaire 98/78 qui explicite donc ces conditions. 265 00:18:16,370 --> 00:18:20,480 De la même manière, dans le silence du traité, c'est le principe de 266 00:18:20,680 --> 00:18:24,980 sécurité juridique, tel que précisé par la confiance légitime qui encadre 267 00:18:25,180 --> 00:18:28,340 la possibilité pour les institutions de retirer des actes avec effet 268 00:18:28,540 --> 00:18:33,050 rétroactif, et ce, depuis un arrêt ancien Algera de 1957, 269 00:18:33,420 --> 00:18:34,760 l'affaire 7/56. 270 00:18:36,410 --> 00:18:38,990 Deux éléments doivent néanmoins être pris en considération, 271 00:18:39,190 --> 00:18:44,270 la légalité ou l'illégalité de l'acte, d'une part, et son caractère créateur 272 00:18:44,470 --> 00:18:45,230 de droits, d'autre part. 273 00:18:46,280 --> 00:18:49,790 En effet, un acte légal créateur de droits ne peut pas faire l'objet 274 00:18:49,990 --> 00:18:50,750 d'un retrait. 275 00:18:51,080 --> 00:18:55,070 En revanche, un acte illégal créateur de droits peut être retiré si trois 276 00:18:55,270 --> 00:18:59,810 conditions sont remplies dans un délai raisonnable, être justifié 277 00:19:00,010 --> 00:19:03,590 par un motif d'intérêt public et respecter la confiance légitime 278 00:19:03,790 --> 00:19:04,640 qu'on retrouve ici. 279 00:19:05,390 --> 00:19:09,500 Voilà donc les conditions, les conditions qui sont celles 280 00:19:09,700 --> 00:19:12,440 de l'application dans le temps des actes juridiques de l'Union, 281 00:19:12,800 --> 00:19:15,710 et on l'aura compris, ceci pour faire respecter ce grand 282 00:19:15,910 --> 00:19:19,880 principe que constitue la sécurité juridique et qui est le principe 283 00:19:21,320 --> 00:19:24,500 créateur en réalité, de l'ordre juridique, 284 00:19:24,700 --> 00:19:30,390 de tout ordre juridique, et donc de l'Union européenne.