1 00:00:06,280 --> 00:00:10,260 Troisième mécanisme relatif à l'application et à l'exécution 2 00:00:10,460 --> 00:00:11,220 du droit interne. 3 00:00:11,420 --> 00:00:16,600 Ce sont les voies d'exécution du droit international qui permettent 4 00:00:16,800 --> 00:00:19,740 de contraindre l'État à respecter le droit international, 5 00:00:20,200 --> 00:00:23,800 de contraindre l'État à veiller au respect de ses obligations 6 00:00:24,000 --> 00:00:25,300 internationales. 7 00:00:25,500 --> 00:00:29,620 Là, on sort de la question de la responsabilité pour viser des mesures 8 00:00:29,820 --> 00:00:36,200 de contrainte, des mesures coercitives qui vont avoir pour objet d'imposer 9 00:00:36,400 --> 00:00:41,120 à l'État le respect de la légalité internationale, donc permettre 10 00:00:41,320 --> 00:00:43,800 l'obligation de l'exécution internationale. 11 00:00:44,000 --> 00:00:48,560 Alors, les voies d'exécution vont intervenir généralement lorsqu'il 12 00:00:48,760 --> 00:00:51,560 y a une violation du droit international pour contraindre 13 00:00:51,760 --> 00:00:55,280 l'État à rétablir la légalité internationale. 14 00:00:55,480 --> 00:00:59,500 C'est un autre mécanisme à côté de la responsabilité internationale, 15 00:00:59,700 --> 00:01:03,980 qui elle, a pour vocation à réparer, en premier lieu, on l'a dit, 16 00:01:04,180 --> 00:01:07,380 le préjudice subit, les voies d'exécution vont avoir pour objet 17 00:01:07,580 --> 00:01:10,620 d'assurer l'exécution du droit international. 18 00:01:11,580 --> 00:01:15,720 Il y a une idée très répandue qui voudrait que la faiblesse de l'ordre 19 00:01:15,920 --> 00:01:20,540 juridique international repose sur ces voies d'exécution qui seraient 20 00:01:20,740 --> 00:01:23,900 imparfaites, qui seraient inefficaces, voire inexistantes. 21 00:01:25,400 --> 00:01:29,320 Il est vrai que si on compare avec le droit interne, les modes d'exécution 22 00:01:29,520 --> 00:01:33,680 du droit international sont faiblement réglementés et peuvent paraître 23 00:01:33,880 --> 00:01:35,220 assez archaïques. 24 00:01:35,420 --> 00:01:39,480 Pour autant, ces mécanismes existent bel et bien en droit international, 25 00:01:39,860 --> 00:01:43,980 ils ont d'ailleurs tendance à se renforcer en pratique et ils sont 26 00:01:44,180 --> 00:01:48,520 ceux que permet le droit international, c'est-à-dire ceux qui sont conformes 27 00:01:48,720 --> 00:01:50,640 à la structure du droit international. 28 00:01:51,660 --> 00:01:54,860 Le droit international connaît plusieurs types de voies d'exécution, 29 00:01:55,160 --> 00:01:59,520 parmi lesquelles le recours à la force armée, donc l'utilisation 30 00:01:59,720 --> 00:02:02,640 de la force armée pour contraindre un état à exécuter le droit 31 00:02:02,840 --> 00:02:03,600 international. 32 00:02:03,800 --> 00:02:09,020 Ce recours à la force armée intervient en dernier lieu, c'est l’État du 33 00:02:09,220 --> 00:02:12,540 droit international positif, on peut recourir à la force armée 34 00:02:12,740 --> 00:02:16,320 pour contraindre à l'exécution du droit international, mais uniquement 35 00:02:16,520 --> 00:02:19,200 en dernier lieu, dans des cas extrêmes. 36 00:02:19,400 --> 00:02:24,220 Dans le cas général, les voies d'exécution reposent, 37 00:02:24,420 --> 00:02:28,600 ce qu'on va voir dans un premier temps, sur les sanctions internationales 38 00:02:28,800 --> 00:02:33,300 qui sont donc ces mécanismes coercitifs qui sont destinés à contraindre 39 00:02:33,500 --> 00:02:34,740 l'état à respecter le droit international. 40 00:02:36,680 --> 00:02:38,720 Premièrement : Les sanctions internationales. 41 00:02:38,920 --> 00:02:43,180 Les sanctions internationales se sont largement multipliées en pratique, 42 00:02:43,480 --> 00:02:46,380 vous en avez certainement entendu parler, les sanctions économiques, 43 00:02:46,580 --> 00:02:47,940 par exemple, adoptées par les États. 44 00:02:48,420 --> 00:02:51,280 Cette pratique s'est notamment développée du fait de la multiplication 45 00:02:51,480 --> 00:02:55,200 des organisations internationales, puisque nombreuses sont aujourd'hui 46 00:02:55,400 --> 00:02:59,200 les organisations internationales qui disposent d'un pouvoir de sanction 47 00:02:59,400 --> 00:03:04,980 en interne, mais aussi en externe, qui va permettre aux organisations 48 00:03:05,180 --> 00:03:08,920 internationales de prendre des sanctions internationales de natures 49 00:03:09,120 --> 00:03:12,260 différentes, on le reverra, à l'encontre des États et notamment 50 00:03:12,460 --> 00:03:13,220 des États membres. 51 00:03:13,420 --> 00:03:17,660 Ces organisations existent dans tout un tas de domaines et dans 52 00:03:17,860 --> 00:03:21,180 des domaines particulièrement essentiels comme celui du maintien 53 00:03:21,380 --> 00:03:24,380 de la paix et de la sécurité internationale puisque le Conseil 54 00:03:24,580 --> 00:03:28,040 de sécurité des Nations unies est un organe qui dispose d'un pouvoir 55 00:03:28,240 --> 00:03:31,620 de sanction à l'encontre des États membres lorsqu'est en cause, 56 00:03:31,820 --> 00:03:34,500 notamment, une rupture de la paix. 57 00:03:34,780 --> 00:03:38,760 On a aussi le cas de l'Union européenne aujourd'hui qui dispose d'un pouvoir 58 00:03:38,960 --> 00:03:42,240 de sanction assez important à l'égard de ses États membres lorsqu'il 59 00:03:42,440 --> 00:03:45,720 y a un manquement au regard du droit de l'Union européenne. 60 00:03:47,600 --> 00:03:51,160 L'existence de ces organisations internationales, qui adoptent des 61 00:03:51,360 --> 00:03:54,960 sanctions, demeure tout de même partielle, ne couvre pas tous les 62 00:03:56,420 --> 00:03:58,780 domaines, ne concerne pas tous les États. 63 00:03:58,980 --> 00:04:03,300 Et donc, en dehors de ces institutions internationales, la question de 64 00:04:03,500 --> 00:04:06,400 l'utilisation des sanctions comme moyen d'exécution du droit 65 00:04:06,600 --> 00:04:10,520 international retombe en réalité sur les États. 66 00:04:10,860 --> 00:04:14,060 En l'absence de mécanisme d'institution, le droit international 67 00:04:15,160 --> 00:04:20,180 reconnaît à chaque État la compétence générale d'adopter des mesures 68 00:04:20,380 --> 00:04:24,460 lorsqu'il y a eu violation du droit international pour contraindre 69 00:04:24,660 --> 00:04:26,860 un État au respect du droit international. 70 00:04:27,820 --> 00:04:33,240 La situation de droit commun est qu'on a des modes, des voies 71 00:04:33,440 --> 00:04:36,620 d'exécution en droit international qui sont décentralisées, 72 00:04:36,820 --> 00:04:40,180 c'est-à-dire que ce sont les États unilatéralement qui sont appelés 73 00:04:40,380 --> 00:04:42,980 à mettre en œuvre ces voies d'exécution du droit international. 74 00:04:43,820 --> 00:04:48,340 Et ce n'est qu'à titre peut-être exceptionnel, même si les hypothèses 75 00:04:48,540 --> 00:04:53,580 sont de plus en plus importantes, que les organisations internationales 76 00:04:53,780 --> 00:04:58,540 vont pouvoir produire ces voies d'exécution de manière centralisée 77 00:04:58,740 --> 00:05:02,120 et de manière universelle, notamment si on prend le cas du 78 00:05:02,320 --> 00:05:04,820 conseil de sécurité des Nations Unies. 79 00:05:05,560 --> 00:05:11,220 Du fait de ce paysage institutionnel là, sanctions décentralisées par 80 00:05:11,420 --> 00:05:14,680 les États, sanctions centralisées par les organisations internationales, 81 00:05:14,880 --> 00:05:18,140 il faut donc distinguer ces deux catégories de sanctions 82 00:05:18,340 --> 00:05:19,220 internationales. 83 00:05:20,340 --> 00:05:22,520 Commençons par les sanctions qui sont adoptées par les organisations 84 00:05:22,720 --> 00:05:23,960 internationales. 85 00:05:24,740 --> 00:05:27,560 Les OI interviennent de plus en plus dans le cadre de ces voies 86 00:05:27,760 --> 00:05:31,840 d'exécution du droit international et elles permettent justement d'éviter 87 00:05:32,040 --> 00:05:35,380 que ces voies d'exécution soient le fait des seuls États 88 00:05:35,580 --> 00:05:38,400 unilatéralement, plutôt que d'avoir des positions différentes, 89 00:05:38,860 --> 00:05:43,060 on va centraliser la réaction du système international à travers 90 00:05:43,260 --> 00:05:45,300 l'organisation internationale. 91 00:05:45,500 --> 00:05:49,660 Naturellement, ce pouvoir de sanction dépend, vous le comprenez, 92 00:05:49,860 --> 00:05:54,100 de la Charte constitutive, du traité constitutif de l'organisation 93 00:05:54,300 --> 00:05:59,540 internationale qui va ou non prévoir ce pouvoir d'adopter des sanctions 94 00:05:59,740 --> 00:06:01,600 internationales à l'encontre des États. 95 00:06:01,800 --> 00:06:04,720 Là, toutes les configurations sont possibles, on l'a vu, 96 00:06:04,920 --> 00:06:08,180 les traités internationaux des organisations internationales peuvent 97 00:06:08,380 --> 00:06:11,560 prévoir toutes les modalités envisageables. 98 00:06:12,120 --> 00:06:17,740 On peut souligner deux grandes situations, alors l'organisation 99 00:06:17,940 --> 00:06:23,520 internationale peut avoir reçu des États le pouvoir d'imposer 100 00:06:23,720 --> 00:06:27,560 des sanctions qu'il va définir, donc l'OI va définir les sanctions 101 00:06:27,760 --> 00:06:32,200 et va charger les États de les exécuter, va surveiller cette 102 00:06:32,400 --> 00:06:33,160 exécution. 103 00:06:33,880 --> 00:06:37,460 Dans ce cas-là, on a une organisation internationale qui prend pleinement 104 00:06:37,660 --> 00:06:41,380 en main la voie d'exécution du début à la fin de l'adoption à 105 00:06:41,580 --> 00:06:44,260 l'exécution de la sanction internationale et dans ce cas-là 106 00:06:44,460 --> 00:06:47,880 l’État n'est qu'un exécutant de l'organisation internationale. 107 00:06:48,080 --> 00:06:51,260 Dans d'autres hypothèses, l'organisation va être simplement 108 00:06:51,460 --> 00:06:56,620 compétente pour habiliter, pour autoriser les États, 109 00:06:56,820 --> 00:07:00,580 pour inciter les États parfois à prendre des sanctions internationales 110 00:07:00,780 --> 00:07:04,360 en exerçant un contrôle sur ces sanctions qui peut être plus ou 111 00:07:04,560 --> 00:07:10,700 moins étendu selon les dispositions du traité constitutif de l'organisation 112 00:07:10,900 --> 00:07:11,660 internationale. 113 00:07:11,860 --> 00:07:16,500 Dans ce cas-là, on a une voie d'exécution qui est partagée entre 114 00:07:16,700 --> 00:07:20,700 l'organisation internationale et l’État, l’État gardant une certaine 115 00:07:20,900 --> 00:07:21,660 marge de manœuvre. 116 00:07:21,860 --> 00:07:24,640 Alors, la distinction entre ces deux hypothèses n'est pas toujours 117 00:07:24,840 --> 00:07:29,540 facile en pratique et c'est le cas notamment des sanctions qui 118 00:07:29,740 --> 00:07:32,960 sont adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies selon 119 00:07:33,160 --> 00:07:37,460 le formulé et la manière dont la résolution est formulée et c'est 120 00:07:37,660 --> 00:07:40,140 ce qu'a considéré la Cour européenne des droits de l'homme dans sa 121 00:07:40,340 --> 00:07:41,100 jurisprudence. 122 00:07:41,300 --> 00:07:44,060 Puisque la Cour européenne des droits de l'homme considère que 123 00:07:44,260 --> 00:07:48,080 ces résolutions du Conseil de sécurité qui prévoit des sanctions 124 00:07:48,280 --> 00:07:52,540 internationales notamment des sanctions économiques, embargo par exemple. 125 00:07:52,880 --> 00:07:57,800 Ces résolutions-là, ces mesures-là sont imputables à l'organisation 126 00:07:58,000 --> 00:08:02,840 internationale, donc aux Nations Unies, lorsque l’État ne dispose d'aucune 127 00:08:03,040 --> 00:08:06,440 marge de manœuvre dans la mise en œuvre de ces sanctions, 128 00:08:06,640 --> 00:08:10,560 donc vont être imputables à l'OI lorsque l’État ne dispose d'aucune 129 00:08:10,760 --> 00:08:11,520 marge de manœuvre. 130 00:08:11,720 --> 00:08:15,520 Mais ces mesures-là vont être imputables à l’État lorsque celui-ci 131 00:08:15,720 --> 00:08:19,280 dispose d'une marge de manœuvre, notamment quant aux moyens dont 132 00:08:19,480 --> 00:08:21,500 il dispose pour les mettre en place. 133 00:08:21,700 --> 00:08:26,580 Ainsi, un même mécanisme institutionnel, les résolutions 134 00:08:26,780 --> 00:08:29,620 du Conseil de sécurité, peuvent donner lieu à des mesures 135 00:08:29,820 --> 00:08:33,180 que l'on va considérer comme totalement dans les mains du Conseil de sécurité, 136 00:08:33,380 --> 00:08:37,420 c'est la première hypothèse, imputable à l'OI, ou partiellement 137 00:08:37,620 --> 00:08:39,660 dans les mains des États, c'est la seconde hypothèse, 138 00:08:39,860 --> 00:08:41,820 imputable donc aux États. 139 00:08:42,020 --> 00:08:44,400 Il y a un enjeu juridique important autour de ces questions, 140 00:08:44,600 --> 00:08:48,740 puisque, en l'espèce, ce n'est uniquement que dans le 141 00:08:48,940 --> 00:08:53,680 cas où la sanction est considérée comme imputable à l'État que la 142 00:08:53,880 --> 00:08:57,740 CEDH va trouver à s'appliquer et que la Cour va pouvoir engager 143 00:08:57,940 --> 00:09:02,620 la responsabilité de l'État qui aurait violé les droits reconnus 144 00:09:03,280 --> 00:09:07,120 par la CEDH en mettant en œuvre ces sanctions internationales. 145 00:09:07,320 --> 00:09:09,800 Donc, c'est un enjeu qui n'est pas purement théorique.   146 00:09:10,000 --> 00:09:14,360 Parmi ces organisations internationales, il faut faire 147 00:09:14,560 --> 00:09:17,340 une place naturellement toute particulière aux Nations unies 148 00:09:17,540 --> 00:09:18,300 en matière de sanctions. 149 00:09:19,240 --> 00:09:22,840 Dans le système des Nations unies, lorsqu'un État porte atteinte à 150 00:09:23,040 --> 00:09:26,400 la paix ou à la sécurité internationale, le Conseil de sécurité 151 00:09:26,600 --> 00:09:31,200 est habilité à imposer des sanctions qui sont prévues. 152 00:09:31,400 --> 00:09:34,980 C'est le fameux chapitre 7 de la Charte, mesures coercitives, 153 00:09:36,140 --> 00:09:40,740 le Conseil de sécurité peut imposer des sanctions à l'État. 154 00:09:41,500 --> 00:09:46,120 Le chapitre 7 comporte une gamme de sanctions de plus en plus 155 00:09:46,320 --> 00:09:48,840 restrictives, on va dire de plus en plus importantes. 156 00:09:49,040 --> 00:09:53,340 Les premières concernent l'adoption de mesures provisoires, 157 00:09:53,540 --> 00:09:54,880 c'est l'article 40. 158 00:09:55,080 --> 00:09:59,300 Ensuite, l'article 41 donne au Conseil de sécurité le pouvoir 159 00:09:59,500 --> 00:10:03,940 d'adopter des mesures qui n'impliquent pas l'emploi de la force armée, 160 00:10:04,300 --> 00:10:06,820 c'est là où l'on retrouve notamment les sanctions économiques. 161 00:10:09,820 --> 00:10:14,780 Et l'article 42, qui va permettre au Conseil de sécurité de prendre 162 00:10:14,980 --> 00:10:17,460 des mesures qui impliquent le recours à la force armée. 163 00:10:17,860 --> 00:10:21,860 La force armée est donc ce cas exceptionnel qui va devenir une 164 00:10:22,060 --> 00:10:23,600 voie d'exécution du droit international. 165 00:10:24,080 --> 00:10:28,480 On va recourir à la force armée pour contraindre un État à la légalité 166 00:10:28,680 --> 00:10:29,700 internationale. 167 00:10:30,700 --> 00:10:34,740 Pour mettre en œuvre ces différentes mesures prévues par le chapitre 7, 168 00:10:34,940 --> 00:10:40,940 le Conseil de sécurité doit constater l'existence d'une menace contre la paix, 169 00:10:41,140 --> 00:10:43,880 d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression. 170 00:10:44,080 --> 00:10:47,760 C'est ce qui est prévu à l'article 39 : menace contre la paix, 171 00:10:47,960 --> 00:10:49,960 rupture de la paix ou acte d'agression. 172 00:10:51,120 --> 00:10:55,440 Ce sont des termes qui ont été interprétés de manière assez généreuse 173 00:10:55,640 --> 00:10:59,080 par le Conseil de sécurité, puisqu'il n'est pas uniquement 174 00:10:59,280 --> 00:11:02,460 question d'hypothèses dans lesquelles l'État aurait utilisé le recours 175 00:11:02,660 --> 00:11:03,420 à la force armée. 176 00:11:03,620 --> 00:11:07,900 Le Conseil de sécurité qualifie aussi notamment de menace contre 177 00:11:08,100 --> 00:11:11,640 la paix des hypothèses dans lesquelles il y a des violations particulièrement 178 00:11:11,840 --> 00:11:13,460 graves des droits fondamentaux. 179 00:11:13,660 --> 00:11:15,860 Il peut considérer que, même s'il n'y a pas usage de la force, 180 00:11:16,060 --> 00:11:21,000 on est dans le champ de l'article 39, et donc il peut décider de mettre 181 00:11:21,200 --> 00:11:25,240 en œuvre son pouvoir de sanction, qui est prévu au chapitre 7, 182 00:11:25,440 --> 00:11:28,170 aux articles 40 et suivants de la Charte des Nations Unies. 183 00:11:28,370 --> 00:11:35,800 Dernière remarque sur ces sanctions des organisations internationales : 184 00:11:36,000 --> 00:11:39,260 beaucoup d'organisations internationales disposent du pouvoir 185 00:11:39,460 --> 00:11:44,300 de sanctionner leurs États membres du fait d'une violation d'une règle 186 00:11:44,500 --> 00:11:45,580 interne à l'organisation. 187 00:11:46,940 --> 00:11:49,720 C'est une hypothèse un peu particulière de sanctions que l'on peut qualifier 188 00:11:49,920 --> 00:11:50,900 de sanctions internes. 189 00:11:51,780 --> 00:11:54,900 Lorsque l'État viole des règles propres à l'organisation 190 00:11:55,100 --> 00:11:59,540 internationale, il y a généralement un organe qui a le pouvoir d'adopter 191 00:11:59,740 --> 00:12:00,500 des sanctions. 192 00:12:00,700 --> 00:12:06,480 Ces sanctions internes vont concerner uniquement l'organisation 193 00:12:06,680 --> 00:12:09,140 internationale, c'est-à-dire que l'on va, par exemple, 194 00:12:09,340 --> 00:12:15,280 pouvoir priver un État de son droit de vote, notamment s'il n'a pas 195 00:12:15,480 --> 00:12:20,380 respecté ses engagements en matière d'obligations financières. 196 00:12:20,580 --> 00:12:24,760 On peut exclure la représentation de l'État devant certains organes, 197 00:12:24,960 --> 00:12:28,920 on peut retirer des avantages financiers, on peut aller jusqu'à 198 00:12:29,120 --> 00:12:32,640 la perte de la qualité de membre, c'est la sanction extrême, 199 00:12:32,840 --> 00:12:41,040 lorsque cet État ne respecte pas les prescriptions du droit de 200 00:12:41,240 --> 00:12:42,880 l'organisation internationale. 201 00:12:43,080 --> 00:12:46,200 Ça, ce sont des hypothèses un peu particulières, puisque là, 202 00:12:46,400 --> 00:12:49,220 ce que va faire prévaloir, c'est uniquement la légalité interne 203 00:12:49,420 --> 00:12:50,880 à l'organisation internationale. 204 00:12:51,080 --> 00:12:54,120 Alors que dans les hypothèses que j'ai mentionnées précédemment, 205 00:12:54,340 --> 00:12:58,740 ce que l'on entend faire exécuter, c'est la légalité générale, 206 00:12:58,940 --> 00:13:01,280 la légalité internationale, au-delà de l'organisation 207 00:13:03,340 --> 00:13:04,100 internationale. 208 00:13:04,300 --> 00:13:08,180 Voilà pour les sanctions des organisations internationales. 209 00:13:08,380 --> 00:13:11,760 Voyons maintenant les sanctions, les réactions unilatérales, 210 00:13:11,960 --> 00:13:12,720 ce qui reste le principe. 211 00:13:13,700 --> 00:13:17,140 Les voies d'exécution sont en grande partie dans les mains des États, 212 00:13:17,340 --> 00:13:21,180 qui sont appelés à réagir pour permettre l'exécution du droit 213 00:13:21,380 --> 00:13:22,140 international. 214 00:13:22,640 --> 00:13:27,260 On en revient ici aux contre-mesures, que l'on a déjà évoquées en matière 215 00:13:27,460 --> 00:13:28,480 de responsabilité. 216 00:13:29,600 --> 00:13:33,440 Cette notion de contre-mesure est apparue pour la première fois dans 217 00:13:33,640 --> 00:13:38,420 une sentence qui a été rendue en 1978 et ensuite dans les travaux 218 00:13:38,620 --> 00:13:41,840 de la Commission du droit international sur la responsabilité, 219 00:13:42,040 --> 00:13:46,060 dont on a parlé au titre des circonstances excluant l'illicite. 220 00:13:47,300 --> 00:13:54,040 Cette notion de contre-mesures doit être distinguée de ce que 221 00:13:54,240 --> 00:13:55,820 l'on appelle les mesures de rétorsion. 222 00:13:56,020 --> 00:14:01,100 Contre-mesures et mesures de rétorsion sont deux mécanismes qui ont en 223 00:14:01,300 --> 00:14:03,420 commun d'être des voies d'exécution du droit international. 224 00:14:04,000 --> 00:14:08,280 Les contre-mesures, comme les mesures de rétorsion, vont avoir pour objet 225 00:14:08,480 --> 00:14:12,000 de faire pression sur un État pour qu'il change son comportement et 226 00:14:12,200 --> 00:14:14,400 qu'il respecte la légalité internationale. 227 00:14:14,600 --> 00:14:18,060 La différence est que les mesures de rétorsion sont des mesures licites. 228 00:14:18,340 --> 00:14:21,140 Ce sont des mesures que l'État a le droit de prendre en toutes 229 00:14:21,340 --> 00:14:23,440 circonstances, elles ne violent pas le droit international. 230 00:14:25,260 --> 00:14:29,280 Les mesures de rétorsion sont assez fréquentes en pratique, 231 00:14:29,620 --> 00:14:31,780 comme elles ne violent pas le droit international, l'État n'a pas de 232 00:14:31,980 --> 00:14:33,020 difficulté à les adopter. 233 00:14:33,220 --> 00:14:36,120 Il s'agit, par exemple, et cela l'actualité l'a été montré 234 00:14:36,320 --> 00:14:39,940 dans le cas du conflit Israël-Palestine. 235 00:14:40,160 --> 00:14:44,320 Très classiquement, la rupture des relations diplomatiques est 236 00:14:44,520 --> 00:14:45,380 une mesure de rétorsion. 237 00:14:45,580 --> 00:14:49,280 Il n'y a aucune violation du droit international, l'État peut 238 00:14:49,480 --> 00:14:52,000 naturellement décider de rompre ses liens diplomatiques, 239 00:14:52,220 --> 00:14:54,200 mais c'est une mesure de rétorsion assez forte. 240 00:14:55,280 --> 00:14:57,580 Diplomatiquement, le signal est très fort : cela signifie que vous 241 00:14:57,780 --> 00:14:59,760 ne voulez plus dialoguer avec cet État. 242 00:14:59,980 --> 00:15:03,900 Donc, même si c'est une mesure qui ne viole pas le droit 243 00:15:04,100 --> 00:15:07,620 international, ça peut-être une mesure qui emporte des conséquences 244 00:15:07,820 --> 00:15:09,740 importantes sur les relations internationales. 245 00:15:09,940 --> 00:15:12,620 Ça, ce sont les mesures de rétorsion, qui sont licites. 246 00:15:12,820 --> 00:15:16,320 La particularité des contre-mesures, et c'est pour cela qu'elles sont 247 00:15:16,520 --> 00:15:19,900 intégrées dans le projet de la CDI sur la responsabilité 248 00:15:20,100 --> 00:15:22,720 internationale de l'État, est qu'elles constituent une violation 249 00:15:22,920 --> 00:15:23,680 du droit international. 250 00:15:24,820 --> 00:15:27,820 La contre-mesure c'est permettre à un État de violer le droit 251 00:15:28,020 --> 00:15:32,280 international, parce qu'une violation du droit international a précédemment 252 00:15:32,480 --> 00:15:34,160 été commise par un autre État. 253 00:15:34,360 --> 00:15:37,920 On va donc protéger l'État qui viole le droit international, 254 00:15:38,520 --> 00:15:41,880 parce que ce n'est qu'une réaction à une violation du droit international 255 00:15:42,080 --> 00:15:43,380 antérieure. 256 00:15:44,920 --> 00:15:48,220 En pratique, dans les relations internationales, les contre-mesures 257 00:15:48,420 --> 00:15:52,360 qui sont des violations du droit international, mais que l'on va 258 00:15:52,560 --> 00:15:58,560 épargner au titre de la responsabilité internationale, remplissent plusieurs 259 00:15:58,760 --> 00:15:59,520 fonctions. 260 00:15:59,720 --> 00:16:02,880 Si l'on essaie de comprendre les hypothèses dans lesquelles les 261 00:16:03,080 --> 00:16:07,520 États les utilisent, l'hypothèse principale est celle de faire cesser 262 00:16:07,720 --> 00:16:08,480 l'illicite. 263 00:16:08,680 --> 00:16:13,240 On utilise les contre-mesures pour faire pression sur l'État afin 264 00:16:13,440 --> 00:16:16,280 qu'il cesse les violations du droit international. 265 00:16:16,880 --> 00:16:20,280 C'est comme ça que l'on peut interpréter les sanctions économiques 266 00:16:20,480 --> 00:16:23,900 à l'encontre de la Russie qui, telles qu'elles sont présentées, 267 00:16:24,480 --> 00:16:30,080 ont pour objet de contraindre la Russie à cesser son agression vis-à-vis 268 00:16:30,280 --> 00:16:33,540 de l'Ukraine depuis le début de la guerre. 269 00:16:34,700 --> 00:16:39,580 Parfois, les contre-mesures peuvent aussi être un moyen de contraindre 270 00:16:39,780 --> 00:16:43,320 un État à accepter un règlement arbitral ou un règlement 271 00:16:43,520 --> 00:16:45,520 juridictionnel, ça s'est vu aussi en pratique. 272 00:16:45,980 --> 00:16:51,000 Donc,contraindre l'État à accepter de recourir au juge international. 273 00:16:52,140 --> 00:16:56,140 Les contre-mesures peuvent aussi avoir une portée plus symbolique, 274 00:16:56,520 --> 00:17:01,840 il ne s'agit pas simplement de contraindre l'État à quelque chose, 275 00:17:02,140 --> 00:17:04,820 mais plus largement, et c'est peut-être ce qui se passe 276 00:17:05,020 --> 00:17:09,360 dans la pratique la plus récente, les contre-mesures sont utilisées 277 00:17:09,560 --> 00:17:13,420 pour marquer la réprobation de l’État vis-à-vis d'une violation 278 00:17:13,620 --> 00:17:14,380 du droit international. 279 00:17:15,080 --> 00:17:18,900 Une violation du droit international qui ne concerne pas forcément cet État, 280 00:17:19,100 --> 00:17:23,900 mais pour marquer sa désapprobation l’État va intervenir au titre d'une 281 00:17:24,100 --> 00:17:28,840 légalité internationale, de manière objective et adopter 282 00:17:29,080 --> 00:17:33,920 ces contre-mesures, ces violations du droit international pour marquer 283 00:17:34,120 --> 00:17:36,880 sa désapprobation d'une violation du droit international. 284 00:17:37,180 --> 00:17:39,940 C'est peut-être aussi comme ça qu'il faut lire les sanctions 285 00:17:40,140 --> 00:17:44,640 économiques qui sont prises à l'encontre de la Russie. 286 00:17:46,640 --> 00:17:51,580 En ce qui concerne le régime applicable aux contre-mesures, que l'on a 287 00:17:53,040 --> 00:17:57,300 volontairement laissé de côté lorsqu'on a parlé du projet d'article sur 288 00:17:57,500 --> 00:18:01,180 la responsabilité de l'État, c'est l'article 22 du projet de la CDI. 289 00:18:01,920 --> 00:18:04,540 Les contre-mesures sont soumises à plusieurs conditions. 290 00:18:05,000 --> 00:18:07,680 Les mesures de rétorsion n'ont pas de conditions, puisqu'elles 291 00:18:07,880 --> 00:18:10,080 sont légales, ce ne sont pas des violations du droit international, 292 00:18:10,360 --> 00:18:11,380 donc il n'y a pas de difficulté. 293 00:18:11,580 --> 00:18:14,280 Pour les contre-mesures, comme il s'agit de mesures qui 294 00:18:14,480 --> 00:18:16,480 violent le droit international, naturellement que le droit 295 00:18:16,680 --> 00:18:18,280 international pose un certain nombre de conditions. 296 00:18:19,780 --> 00:18:24,640 Premièrement, les contre-mesures doivent reposer sur un fait initial, 297 00:18:25,100 --> 00:18:29,100 donc une violation du droit international, qui a été commise 298 00:18:30,880 --> 00:18:33,160 par l'État visé par la réaction. 299 00:18:33,860 --> 00:18:37,080 On est dans un schéma bilatéral : un État A a violé le droit 300 00:18:37,280 --> 00:18:40,320 international à l'égard de l'État B, et l'État B peut prendre une 301 00:18:40,520 --> 00:18:43,480 contre-mesure à l'égard de l'État A, puisque l'on est dans une situation 302 00:18:44,620 --> 00:18:45,380 bilatérale. 303 00:18:45,580 --> 00:18:49,120 Les contre-mesures se cantonnent à cette relation entre l'État A 304 00:18:49,320 --> 00:18:51,060 et l'État B : l'État A, qui a violé le droit international, 305 00:18:51,260 --> 00:18:54,320 et l'État B, qui a subi cette violation du droit international. 306 00:18:55,320 --> 00:18:59,220 En principe, la contre-mesure ne doit pas être exercée à l'encontre 307 00:18:59,420 --> 00:19:04,240 d'un État tiers, il n'est pas possible de violer le droit international 308 00:19:04,440 --> 00:19:08,040 au titre des contre-mesures à l'encontre d'un État tiers à la 309 00:19:08,240 --> 00:19:09,940 violation initiale. 310 00:19:10,860 --> 00:19:15,540 Il en va de même, selon le droit international, lorsque la contre-mesure 311 00:19:15,740 --> 00:19:20,020 est bien exercée à l'encontre de l'État qui a commis la première 312 00:19:20,220 --> 00:19:25,920 violation, mais qu'elle produit des effets dits extraterritoriaux, 313 00:19:26,120 --> 00:19:27,680 qui s'étendent à des États tiers. 314 00:19:27,980 --> 00:19:31,290 En principe, cela n'est pas admis par le droit des contre-mesures, 315 00:19:31,490 --> 00:19:32,250 le droit international. 316 00:19:32,680 --> 00:19:37,200 Donc, même si la contre-mesure s'attaque à l'État qui a commis 317 00:19:37,400 --> 00:19:41,320 la violation primaire du droit international, elle ne doit pas 318 00:19:41,520 --> 00:19:44,840 produire des effets extraterritoriaux à l'égard des États tiers. 319 00:19:45,180 --> 00:19:48,200 C'est une question qui a été longtemps débattue, et c'est une règle qui 320 00:19:48,400 --> 00:19:49,940 n'est pas toujours respectée en pratique. 321 00:19:50,960 --> 00:19:54,540 Par exemple, on a pu questionner la légalité des boycotts dits 322 00:19:54,740 --> 00:19:55,500 secondaires. 323 00:19:55,700 --> 00:20:00,340 Un boycott secondaire consiste pour un État à interdire à ses 324 00:20:00,540 --> 00:20:04,680 nationaux non seulement de commercer avec les nationaux de l'État qui 325 00:20:04,880 --> 00:20:07,880 a commis la violation du droit international, mais aussi de commercer 326 00:20:08,080 --> 00:20:12,300 avec les nationaux d’États tiers qui, eux, commercent avec les nationaux 327 00:20:12,500 --> 00:20:15,500 de l’État qui a commis la violation du droit international. 328 00:20:16,120 --> 00:20:19,980 Ces boycotts secondaires qui permettent de renforcer la pression, 329 00:20:20,180 --> 00:20:23,120 naturellement, sur l’État, mais, du fait de ses effets 330 00:20:23,320 --> 00:20:28,580 extraterritoriaux, voit leur légalité contestée au regard du droit 331 00:20:28,780 --> 00:20:29,540 international. 332 00:20:29,740 --> 00:20:33,480 C'est également le cas d'un certain nombre de sanctions américaines, 333 00:20:33,680 --> 00:20:35,720 notamment celles qui sont prises à l'encontre de l'Iran, 334 00:20:35,920 --> 00:20:40,740 qui ont une portée extraterritoriale puisque ces sanctions vont s'imposer 335 00:20:40,940 --> 00:20:44,420 à des ressortissants qui ne sont pas des ressortissants américains 336 00:20:44,620 --> 00:20:47,180 et qui exercent des activités en dehors des États-Unis. 337 00:20:47,520 --> 00:20:49,440 Il n'y a donc pas de rattachement avec les États-Unis. 338 00:20:50,140 --> 00:20:54,280 Là encore, ce sont les effets extraterritoriaux de ces contre-mesures 339 00:20:54,480 --> 00:20:57,320 qui peuvent être questionnés et qui sont questionnés au regard 340 00:20:57,520 --> 00:21:01,000 du droit international relatif aux contre-mesures. 341 00:21:02,300 --> 00:21:06,300 Cette question de la relation bilatérale, sur laquelle repose 342 00:21:06,500 --> 00:21:10,000 la contre-mesure, pose aussi une difficulté quand il s'agit de 343 00:21:10,200 --> 00:21:13,240 déterminer quel est l’État qui est habilité à prendre la 344 00:21:13,440 --> 00:21:14,200 contre-mesure. 345 00:21:14,600 --> 00:21:18,700 On l'a dit, c'est l’État normalement victime de la violation du droit 346 00:21:18,900 --> 00:21:24,540 international qui est seul appelé à réagir à cette violation du droit 347 00:21:24,740 --> 00:21:25,500 international. 348 00:21:26,200 --> 00:21:29,400 On a une individualisation, en quelque sorte, de la compétence 349 00:21:29,600 --> 00:21:31,100 pour prendre des contre-mesures. 350 00:21:31,860 --> 00:21:36,620 C'est une condition qui n'est pas toujours facile à mettre en œuvre. 351 00:21:37,840 --> 00:21:40,260 Du point de vue du dommage, c'est assez simple : 352 00:21:40,660 --> 00:21:45,400 c'est l’État lésé, celui qui a subi le dommage du fait de la violation 353 00:21:45,600 --> 00:21:49,280 internationale, qui va être habilité à prendre les contre-mesures contre 354 00:21:49,480 --> 00:21:52,840 l’État qui a commis cette violation du droit international. 355 00:21:53,900 --> 00:21:57,680 Dans ce cas-là, l’État lésé va à la fois bénéficier du droit à 356 00:21:57,880 --> 00:22:00,760 réparation au titre de la responsabilité internationale et 357 00:22:00,960 --> 00:22:03,700 du droit à contre-mesure, c'est-à-dire le droit de mettre 358 00:22:03,900 --> 00:22:06,860 en œuvre ces modes d'exécution, ces voies d'exécution, 359 00:22:07,060 --> 00:22:09,240 pour rétablir la légalité internationale. 360 00:22:09,780 --> 00:22:14,500 Mais la difficulté est qu'en pratique, on voit que l'exercice de ces 361 00:22:14,700 --> 00:22:18,080 contre-mesures peut parfois se détacher de cette relation bilatérale, 362 00:22:18,280 --> 00:22:23,660 et parfois les États invoquent les contre-mesures pour marquer 363 00:22:23,860 --> 00:22:27,480 cette désapprobation des violations particulièrement graves du droit 364 00:22:27,680 --> 00:22:28,440 international. 365 00:22:28,800 --> 00:22:32,300 Il ne s'agit pas forcément pour les États d'invoquer un droit 366 00:22:32,500 --> 00:22:36,260 subjectif, mais plutôt d'invoquer la légalité au sens général du 367 00:22:36,460 --> 00:22:39,760 terme en adoptant ces sanctions internationales. 368 00:22:39,960 --> 00:22:43,980 Dans ce cas-là, la délimitation des États habilités à réagir à 369 00:22:44,180 --> 00:22:47,140 un fait illicite est beaucoup plus difficile à déterminer. 370 00:22:47,660 --> 00:22:51,500 Si on admet que n'importe quel État peut réagir à une violation 371 00:22:51,700 --> 00:22:54,740 du droit international, y compris une violation qui ne 372 00:22:54,940 --> 00:22:58,920 l'a pas affecté directement, cela renforce naturellement les 373 00:22:59,120 --> 00:23:03,100 voies d'exécution, puisque cela permet à plus d’États d'agir au 374 00:23:03,300 --> 00:23:06,310 titre de l'exécution du droit international, mais cela augmente 375 00:23:06,510 --> 00:23:07,840 également les conflictualités. 376 00:23:08,140 --> 00:23:10,860 C'est-à-dire que n'importe quel État peut adopter des sanctions, 377 00:23:11,220 --> 00:23:15,580 ce qui peut conduire l’État victime des sanctions à en adopter lui-même. 378 00:23:15,780 --> 00:23:20,180 Il peut donc y avoir une cascade de sanctions, de voies d'exécution, 379 00:23:20,380 --> 00:23:22,300 qui se mettent en place, et ce n'est pas forcément une bonne 380 00:23:22,500 --> 00:23:23,720 chose pour le système international. 381 00:23:25,880 --> 00:23:31,620 Cette pratique vise ce que l'on a pu appeler dans la pratique les 382 00:23:31,820 --> 00:23:33,240 "contre-mesures d'intérêt général". 383 00:23:33,780 --> 00:23:40,200 Ça vise cette hypothèse où l'État, qui n'a pas subi de préjudice au 384 00:23:40,400 --> 00:23:43,100 sens classique, va tout de même prendre des mesures, 385 00:23:43,300 --> 00:23:46,790 pour répondre à une violation de certaines obligations internationales. 386 00:23:46,990 --> 00:23:51,880 Souvent, les États le font lorsqu'ils considèrent qu'il y a une violation 387 00:23:52,080 --> 00:23:55,200 d'une règle impérative, donc une violation du jus cogens. 388 00:23:55,480 --> 00:23:58,820 Donc, on aurait les contre-mesures classiques, qui reposent sur la 389 00:23:59,020 --> 00:24:01,820 relation bilatérale, et les contre-mesures dites d'intérêt 390 00:24:02,020 --> 00:24:07,800 général, qui reposent sur la défense d'une certaine légalité internationale. 391 00:24:08,620 --> 00:24:12,500 Il a été demandé à la Commission du droit international de déterminer 392 00:24:12,700 --> 00:24:16,680 quel était l'état du droit international sur cette question-là. 393 00:24:16,880 --> 00:24:18,060 Les débats ont été très nombreux. 394 00:24:18,880 --> 00:24:23,560 A été souvent mentionnée cette crainte de multiplier les mécanismes 395 00:24:23,760 --> 00:24:26,880 de sanctions et de sanctions réciproques. 396 00:24:27,100 --> 00:24:33,060 A aussi été évoquée la peur, à travers ces contre-mesures d'intérêt 397 00:24:33,260 --> 00:24:37,760 général, de renforcer la domination de quelques grandes puissances, 398 00:24:37,960 --> 00:24:41,960 puisque ces voies d'exécution sont généralement le fait des grandes 399 00:24:42,160 --> 00:24:44,560 puissances, les États-Unis, l'Europe, la Chine. 400 00:24:44,760 --> 00:24:48,600 Donc, ce serait favoriser la domination de ces quelques grands, 401 00:24:49,200 --> 00:24:52,440 grandes puissances militaires, mais aussi économiques. 402 00:24:52,640 --> 00:24:58,560 C'est probablement ce qui a justifié que la CDI, dans son projet, 403 00:24:58,920 --> 00:25:02,700 n'aille pas jusqu'à reconnaître qu'un État tiers à un fait 404 00:25:02,900 --> 00:25:08,060 internationalement illicite puisse adopter des contre-mesures pour 405 00:25:08,260 --> 00:25:11,340 réagir à une violation du droit international. 406 00:25:12,300 --> 00:25:15,860 Donc, c'est l'état actuel du droit international positif : 407 00:25:16,060 --> 00:25:18,900 une incertitude et, a priori, un droit international qui est 408 00:25:19,100 --> 00:25:24,020 plutôt opposé à ces contre-mesures d'intérêt général. 409 00:25:24,400 --> 00:25:26,400 Cela ne veut pas dire qu'elles n'existent pas en pratique, 410 00:25:26,740 --> 00:25:28,620 on les trouve et elles se multiplient en pratique. 411 00:25:29,560 --> 00:25:35,020 Pour autant, le droit international considère que cela n'est pas admis 412 00:25:35,220 --> 00:25:40,440 par le système international et que la réaction au titre des voies 413 00:25:40,640 --> 00:25:42,240 d'exécution repose sur l’État lésé. 414 00:25:42,440 --> 00:25:46,820 Il y a donc une assimilation entre l’État lésé au titre de la 415 00:25:47,020 --> 00:25:50,240 responsabilité internationale et l’État lésé au titre des voies 416 00:25:50,440 --> 00:25:51,200 d'exécution. 417 00:25:52,180 --> 00:25:54,500 Il y a une dernière hypothèse, qu'il faut mentionner,  418 00:25:54,700 --> 00:25:57,700 qui pose des difficultés : c'est l'hypothèse où aucun État 419 00:25:57,900 --> 00:25:59,460 n'est lésé par une violation du droit international. 420 00:26:00,200 --> 00:26:03,600 Il peut y avoir des règles de droit international qui n'affectent pas 421 00:26:03,800 --> 00:26:05,580 les droits d'un État tiers. 422 00:26:05,960 --> 00:26:07,900 On peut penser au génocide. 423 00:26:08,200 --> 00:26:10,680 Lorsqu'un génocide a lieu sur le territoire d'un État, 424 00:26:10,880 --> 00:26:15,000 c'est la population qui est victime de ce génocide, mais en soi, 425 00:26:15,200 --> 00:26:20,160 elle ne met en cause aucun droit d'un autre État au sein de la 426 00:26:20,360 --> 00:26:21,140 communauté internationale. 427 00:26:21,340 --> 00:26:24,920 C'est aussi le cas du droit à l'autodétermination. 428 00:26:25,160 --> 00:26:27,180 Là encore, on est dans des affaires internes. 429 00:26:27,760 --> 00:26:31,140 Si le droit à l'autodétermination est remis en cause par un État, 430 00:26:31,340 --> 00:26:35,160 cela concerne le peuple considéré, mais pas un autre État. 431 00:26:35,380 --> 00:26:37,080 Il y a donc des hypothèses dans lesquelles il n'y a pas d’État 432 00:26:37,280 --> 00:26:38,780 lésé par une violation du droit international. 433 00:26:39,680 --> 00:26:43,520 Dans ce cas-là, le droit international n'est pas très clair sur la question 434 00:26:43,720 --> 00:26:46,960 de savoir si n'importe quel État peut se saisir de cette question. 435 00:26:47,160 --> 00:26:49,780 Puisque si on n'autorise pas n'importe quel État à le faire, 436 00:26:50,060 --> 00:26:53,380 aucun État ne pourrait utiliser les voies d'exécution, 437 00:26:53,740 --> 00:26:58,700 utiliser les contre-mesures au titre du droit international. 438 00:26:59,160 --> 00:27:00,920 Là encore, une question qui reste assez ouverte. 439 00:27:01,120 --> 00:27:05,440 En pratique, on voit des États intervenir dans ces hypothèses-là 440 00:27:05,640 --> 00:27:08,220 au titre de la légalité internationale. 441 00:27:09,680 --> 00:27:13,150 Deuxième remarque sur les conditions des contre-mesures : 442 00:27:13,350 --> 00:27:17,380 les contre-mesures nécessitent un fait internationalement illicite 443 00:27:17,580 --> 00:27:20,820 préalable, mais il suffit que ce fait internationalement illicite 444 00:27:21,020 --> 00:27:24,180 soit allégué par l’État qui entend exercer des contre-mesures. 445 00:27:24,380 --> 00:27:28,120 Donc, ce fait internationalement illicite n'a pas à être préalablement 446 00:27:28,320 --> 00:27:29,780 et objectivement établi. 447 00:27:30,300 --> 00:27:32,600 Il n'y a aucune condition, par exemple, pour l’État qui entend 448 00:27:32,800 --> 00:27:35,780 exercer des contre-mesures, de saisir préalablement le juge 449 00:27:35,980 --> 00:27:38,280 international pour faire constater l'existence d'une violation 450 00:27:38,480 --> 00:27:39,400 internationale. 451 00:27:40,120 --> 00:27:43,960 C'est lui, c'est l’État, qui interprète une situation comme 452 00:27:44,160 --> 00:27:47,520 étant constitutive d'une violation du droit international et qui va 453 00:27:47,720 --> 00:27:50,580 en tirer comme conséquence qu'il va exercer des contre-mesures. 454 00:27:50,820 --> 00:27:55,480 Cette première violation du droit international n'a pas à être établie. 455 00:27:55,680 --> 00:27:59,060 Il n'y a pas "d'huissier international", dans le système 456 00:27:59,260 --> 00:28:01,880 juridique international, qui viendrait dresser un procès-verbal 457 00:28:02,080 --> 00:28:03,940 des violations internationales, ça n'existe pas. 458 00:28:04,140 --> 00:28:08,340 C'est donc l’État qui interprète une situation comme étant celle 459 00:28:08,540 --> 00:28:09,520 d'une violation du droit international. 460 00:28:10,140 --> 00:28:12,020 Ce qui fait qu'il va en tirer des conséquences. 461 00:28:12,220 --> 00:28:14,480 S'il considère qu'il y a une violation du droit international, 462 00:28:14,680 --> 00:28:17,960 mais que tel n'est pas le cas, alors il ne pourra pas utiliser 463 00:28:18,160 --> 00:28:21,460 le mécanisme des contre-mesures, puisqu'il n'y aura pas eu de violation 464 00:28:22,340 --> 00:28:23,140 internationale préalable. 465 00:28:23,340 --> 00:28:27,240 Et sa mesure, qui est elle-même une violation du droit international, 466 00:28:27,440 --> 00:28:31,420 ne pourra pas bénéficier des circonstances excluant l'illicite. 467 00:28:31,620 --> 00:28:36,260 Il verra donc sa responsabilité engagée, puisqu'il n'aura pas respecté 468 00:28:36,460 --> 00:28:38,620 les conditions propres aux contre-mesures. 469 00:28:38,840 --> 00:28:43,840 Les États adoptent assez facilement des sanctions internationales 470 00:28:44,040 --> 00:28:47,420 aujourd'hui, mais il faut qu'ils prennent la mesure de leur 471 00:28:47,620 --> 00:28:52,740 comportement, car il faut s'assurer que ces mesures-là reposent sur 472 00:28:52,940 --> 00:28:54,840 une violation internationale préalable. 473 00:28:55,040 --> 00:28:57,700 Il y a des cas où il n'y a pas de débat, mais dans certaines hypothèses, 474 00:28:57,900 --> 00:29:01,160 on peut se demander s'il y a réellement une violation du droit international 475 00:29:01,360 --> 00:29:06,180 préalable, ce qui peut mettre l’État dans une situation complexe au 476 00:29:06,380 --> 00:29:08,040 regard de ses obligations internationales. 477 00:29:10,540 --> 00:29:13,740 Troisième remarque sur les contre-mesures : les contre-mesures 478 00:29:13,940 --> 00:29:17,380 doivent respecter un critère de proportionnalité. 479 00:29:17,580 --> 00:29:22,640 La proportionnalité des contre-mesures est un critère assez classique. 480 00:29:22,840 --> 00:29:27,740 Les réactions doivent être proportionnées à la violation primaire 481 00:29:27,940 --> 00:29:28,700 du droit international. 482 00:29:29,580 --> 00:29:36,760 C'est une règle qui a été consacrée dans une vieille sentence de 1928, 483 00:29:36,960 --> 00:29:40,760 l'affaire Naulilaa, qui avait été rendue en matière de représailles 484 00:29:40,960 --> 00:29:41,720 armées. 485 00:29:41,920 --> 00:29:43,900 On n'était pas dans le cadre des contre-mesures, mais dans celui 486 00:29:44,100 --> 00:29:45,140 des représailles armées. 487 00:29:45,340 --> 00:29:48,280 Toutefois, on a considéré que ce principe-là était naturellement 488 00:29:48,480 --> 00:29:50,020 valable en matière de contre-mesures. 489 00:29:50,220 --> 00:29:53,280 Ainsi, les contre-mesures doivent respecter un critère de 490 00:29:53,480 --> 00:29:57,980 proportionnalité entre l'illicite initiale et la réaction prise au 491 00:29:58,180 --> 00:29:59,140 titre des voies d'exécution. 492 00:29:59,820 --> 00:30:02,400 C'est un critère classique, mais, comme tous les critères de 493 00:30:02,600 --> 00:30:06,520 proportionnalité, il est toujours difficile à mettre en pratique 494 00:30:06,720 --> 00:30:11,300 pour déterminer la proportionnalité réelle de la réaction. 495 00:30:12,660 --> 00:30:17,760 C'est une condition reconnue par le projet de la CDI, 496 00:30:17,960 --> 00:30:22,080 qui prévoit que les contre-mesures doivent être proportionnelles au 497 00:30:22,280 --> 00:30:23,480 préjudice subi. 498 00:30:24,540 --> 00:30:29,020 Dernière condition des contre-mesures : certaines contre-mesures sont 499 00:30:29,220 --> 00:30:29,980 interdites. 500 00:30:30,180 --> 00:30:33,760 Il y a donc certaines violations du droit international qui ne peuvent 501 00:30:33,960 --> 00:30:36,480 pas être couvertes par les contre-mesures. 502 00:30:37,260 --> 00:30:40,460 Les contre-mesures ne peuvent jamais porter sur certaines règles du 503 00:30:40,660 --> 00:30:41,420 droit international. 504 00:30:42,060 --> 00:30:45,460 Sont concernées, selon le projet de la CDI article 26, 505 00:30:46,920 --> 00:30:48,360 les règles du jus cogens. 506 00:30:48,560 --> 00:30:53,020 Un État ne peut pas violer le jus cogens au titre des contre-mesures. 507 00:30:53,280 --> 00:30:57,340 Même si la violation primaire est une violation du jus cogens, 508 00:30:57,620 --> 00:31:01,020 l’État ne peut pas répliquer par une violation du jus cogens, 509 00:31:01,220 --> 00:31:04,140 puisqu'il s'agit là de règles impératives du droit international 510 00:31:04,340 --> 00:31:07,160 auxquelles il ne peut être dérogé. 511 00:31:07,360 --> 00:31:11,660 Donc, les contre-mesures ne peuvent pas permettre à un État de violer 512 00:31:11,860 --> 00:31:15,720 le droit impératif, ces principes fondamentaux de l'ordre juridique 513 00:31:15,920 --> 00:31:16,680 international.