1 00:00:05,650 --> 00:00:10,600 Nous terminons cette section, mais également le premier semestre 2 00:00:10,800 --> 00:00:13,810 de ce cours, par la fin du contrat administratif. 3 00:00:14,500 --> 00:00:15,850 Il existe plusieurs possibilités. 4 00:00:16,050 --> 00:00:19,420 D’abord, et de la même manière que pour les actes administratifs, 5 00:00:19,810 --> 00:00:23,890 il peut exister une clause au sein du contrat qui prévoit sa caducité. 6 00:00:24,580 --> 00:00:28,720 Un contrat de recrutement est prévu à durée déterminée pour l’agent, 7 00:00:29,290 --> 00:00:32,320 une convention d’occupation du domaine public est signée pour 8 00:00:32,520 --> 00:00:35,670 quinze ans, une concession de service public est signée pour sept ans, 9 00:00:35,870 --> 00:00:39,100 etc., le contrat devient caduc à la date prévue. 10 00:00:39,910 --> 00:00:43,750 Le contrat peut également arriver à son terme lorsqu’il est complètement 11 00:00:43,950 --> 00:00:44,710 exécuté. 12 00:00:44,910 --> 00:00:49,390 Par exemple, un marché public de travaux disparaît lorsque les travaux 13 00:00:49,590 --> 00:00:51,340 sont réceptionnés par l’administration. 14 00:00:51,540 --> 00:00:54,430 Il n’y a plus de contrat à partir du moment où il est complètement 15 00:00:54,630 --> 00:00:55,390 exécuté. 16 00:00:55,720 --> 00:01:02,560 Mais la fin du contrat peut intervenir avant le terme qui a été fixé. 17 00:01:03,010 --> 00:01:06,100 On parle alors de résiliation, c’est-à-dire que le contrat ne 18 00:01:06,300 --> 00:01:07,510 produira plus d’effet pour l’avenir. 19 00:01:08,050 --> 00:01:11,050 Il existe un deuxième concept qu’on appelle la résolution du contrat, 20 00:01:11,380 --> 00:01:17,170 résolution qui est une disparition rétroactive du contrat, 21 00:01:17,370 --> 00:01:20,020 c’est-à-dire que la situation antérieure au contrat est rétablie, 22 00:01:20,260 --> 00:01:24,520 mais généralement, la résolution concerne les illégalités graves 23 00:01:24,720 --> 00:01:27,400 du contrat et est prononcée par le juge. 24 00:01:27,600 --> 00:01:31,540 Ici, nous allons nous porter essentiellement sur la question 25 00:01:31,740 --> 00:01:33,160 de la résiliation du contrat. 26 00:01:33,640 --> 00:01:36,580 La résolution sera étudiée au deuxième semestre lorsque nous parlerons 27 00:01:36,820 --> 00:01:39,010 du contrôle de l’activité administrative, éventuellement 28 00:01:39,210 --> 00:01:40,750 de la sanction des inégalités qu’elle commet. 29 00:01:41,080 --> 00:01:43,870 Et ici, il s’agirait, pour la résolution, de la sanction 30 00:01:44,070 --> 00:01:47,530 des inégalités qui sont contenues dans les contrats de l’administration. 31 00:01:48,340 --> 00:01:53,380 Voyons ici la résiliation du contrat administratif, c’est-à-dire sa 32 00:01:53,580 --> 00:01:54,490 disparition pour l’avenir. 33 00:01:55,860 --> 00:01:58,840 Voyons plusieurs cas dans lesquels il peut y avoir résiliation. 34 00:01:59,320 --> 00:02:03,190 Il y a d’abord la résiliation pour faute que j’ai mentionnée dans 35 00:02:03,390 --> 00:02:04,150 la vidéo précédente. 36 00:02:04,510 --> 00:02:08,770 Lorsque l’inexécution du contrat ou la mauvaise exécution du contrat 37 00:02:09,040 --> 00:02:12,760 par le cocontractant de l’administration constitue une 38 00:02:12,960 --> 00:02:17,290 faute grave, l’administration peut sanctionner son cocontractant en 39 00:02:17,490 --> 00:02:21,010 résiliant son contrat sans indemniser ce cocontractant. 40 00:02:22,730 --> 00:02:26,600 Deuxième cause de résiliation, il y a la résiliation en cas de 41 00:02:26,800 --> 00:02:27,560 force majeure. 42 00:02:27,760 --> 00:02:31,190 Je terminais la vidéo précédente sur la question de l’imprévision. 43 00:02:31,390 --> 00:02:39,320 Lorsqu’un événement extérieur est imprévisible, ne rend pas l’exécution 44 00:02:39,520 --> 00:02:43,910 du contrat simplement onéreuse, plus onéreuse, qu’elle bouleverse 45 00:02:44,110 --> 00:02:46,610 son économie - dans ce cas-là, il s’agirait d’une imprévision 46 00:02:46,810 --> 00:02:51,110 - mais qu’elle rend son exécution impossible, il y a force majeure 47 00:02:51,310 --> 00:02:55,550 qui motive une résiliation. 48 00:02:55,910 --> 00:02:59,150 Lorsque l’exécution est impossible, il n’y a plus qu’une seule chose 49 00:02:59,350 --> 00:03:02,120 à faire, c’est de mettre un terme à l’exécution du contrat. 50 00:03:02,320 --> 00:03:05,300 Celui-ci est résilié, le contrat est résilié et 51 00:03:05,500 --> 00:03:10,910 l’administration indemnise son cocontractant pour l’événement 52 00:03:11,110 --> 00:03:14,270 qu’il a subi et qui a fait que le contrat est devenu impossible 53 00:03:14,470 --> 00:03:15,230 à exécuter. 54 00:03:15,560 --> 00:03:18,590 Ce sont les trois conditions classiques de la force majeure. 55 00:03:18,790 --> 00:03:22,280 L’événement est imprévisible et extérieur. 56 00:03:23,360 --> 00:03:27,560 Ce sont également les conditions de l’imprévision. 57 00:03:28,970 --> 00:03:32,420 Puisque l’événement est en plus irrésistible, c’est-à-dire qu’on 58 00:03:32,750 --> 00:03:36,980 ne peut rien faire contre cet événement, le contrat doit être 59 00:03:37,180 --> 00:03:39,350 résilié car il y a force majeure. 60 00:03:40,730 --> 00:03:43,790 Troisième cause de résiliation sur laquelle je vais passer un 61 00:03:43,990 --> 00:03:44,780 tout petit peu plus de temps. 62 00:03:44,980 --> 00:03:47,390 C’est la résiliation pour cause d’intérêt général. 63 00:03:47,590 --> 00:03:51,320 L’administration peut invoquer un motif d’intérêt général pour 64 00:03:51,520 --> 00:03:53,360 mettre un terme à ses relations contractuelles. 65 00:03:53,690 --> 00:03:57,260 Nous l’avons vu dans l’affaire Compagnie Nouvelle du Gaz de 66 00:03:57,460 --> 00:04:01,820 Deville-lès-Rouen de 1902, dans laquelle le Conseil d’État 67 00:04:02,150 --> 00:04:05,630 a admis qu’une commune pouvait, à condition de mettre en demeure 68 00:04:05,830 --> 00:04:09,470 son concessionnaire, mettre un terme à un contrat d’éclairage 69 00:04:09,670 --> 00:04:13,670 au gaz pour confier le service public de l’éclairage à une entreprise 70 00:04:13,870 --> 00:04:15,320 qui utilise l’électricité. 71 00:04:15,520 --> 00:04:20,840 Ici, il s’agissait d’une avancée technologique qui avait modifié 72 00:04:21,040 --> 00:04:25,430 l’intérêt général et qui justifiait la résiliation du contrat 73 00:04:25,630 --> 00:04:29,090 administratif, mais il existe une autre affaire qui est considérée 74 00:04:29,290 --> 00:04:33,050 comme étant à l’origine de cette résiliation unilatérale. 75 00:04:33,250 --> 00:04:38,660 C’est l’affaire Distillerie de Magnac-Laval qui a été jugée le 76 00:04:38,860 --> 00:04:39,980 2 mai 1958. 77 00:04:40,400 --> 00:04:42,320 Que s’était-il produit en l’espèce ? 78 00:04:42,520 --> 00:04:44,030 L’affaire est assez complexe. 79 00:04:44,990 --> 00:04:51,350 Il était en question le système du monopole de l’État sur la production 80 00:04:51,550 --> 00:04:52,310 d’alcool. 81 00:04:52,510 --> 00:04:56,420 Les distilleries produisaient de l’alcool que l’État devait acquérir 82 00:04:56,620 --> 00:04:57,860 pour ensuite revendre. 83 00:04:58,490 --> 00:05:01,640 Il existait des contingents sur la production d’alcool, 84 00:05:02,120 --> 00:05:04,640 contingents qui étaient fixés par la loi, c’est-à-dire un certain 85 00:05:04,840 --> 00:05:08,420 chiffre qui devait être respecté par les distilleries. 86 00:05:08,620 --> 00:05:14,030 Ensuite, l’État passait des contrats administratifs avec ces distilleries 87 00:05:14,230 --> 00:05:18,800 pour acquérir des surplus de production éventuels par rapport aux contingents 88 00:05:19,000 --> 00:05:20,210 qui ont été fixés initialement. 89 00:05:20,410 --> 00:05:24,350 Donc, des contingents et au-dessus de ces contingents, pour les surplus, 90 00:05:24,770 --> 00:05:26,960 rachat par le biais de contrats administratifs. 91 00:05:27,830 --> 00:05:31,940 Sauf qu’un problème survient, l’État français a du mal à écouler 92 00:05:32,600 --> 00:05:34,040 les surplus d’alcool. 93 00:05:34,640 --> 00:05:38,060 Dans les années 50, les choses se déroulaient assez bien car la 94 00:05:38,260 --> 00:05:41,270 France arrivait à vendre son surplus aux États-Unis. 95 00:05:41,720 --> 00:05:45,410 Sauf qu’avec la fin de la guerre de Corée, les États-Unis cessent 96 00:05:45,610 --> 00:05:49,640 d’acheter de l’alcool français, ce qui entraîne une accumulation 97 00:05:49,840 --> 00:05:54,290 de stocks et qui entraîne également des charges importantes pour l’État 98 00:05:54,490 --> 00:05:55,250 français. 99 00:05:55,450 --> 00:06:00,290 Le législateur intervient pour lutter contre ces excès de frais 100 00:06:00,490 --> 00:06:04,910 dans le fonctionnement de l’État et qu’est-ce qu’il décide de faire ? 101 00:06:05,110 --> 00:06:10,040 De réduire les contingents, donc de réduire également l’alcool 102 00:06:10,240 --> 00:06:13,880 qui serait racheté par des contrats en cas de surplus. 103 00:06:14,930 --> 00:06:18,350 Ce que ça entraîne, c’est que le gouvernement résilie des contrats 104 00:06:18,590 --> 00:06:20,390 qu’il avait passés avec des distilleries. 105 00:06:20,900 --> 00:06:24,740 La Distillerie de Magnac-Laval fait un recours devant le Conseil 106 00:06:24,940 --> 00:06:29,240 d’État et pose la question suivante : Le gouvernement pouvait-il résilier 107 00:06:29,480 --> 00:06:33,080 unilatéralement le contrat qu’il avait avec cette distillerie ? 108 00:06:33,740 --> 00:06:35,420 Le Conseil d’État répond par la positive. 109 00:06:36,110 --> 00:06:40,370 Je cite : "Il appartenait au gouvernement, en vertu des règles 110 00:06:40,570 --> 00:06:44,090 applicables aux contrats administratifs et sous réserve des droits à indemnités 111 00:06:44,360 --> 00:06:47,990 des intéressés, de mettre fin, comme il l’a fait, à ces marchés 112 00:06:48,190 --> 00:06:48,950 de fourniture". 113 00:06:49,150 --> 00:06:51,650 L’administration a donc, en vertu des règles générales qui 114 00:06:51,850 --> 00:06:53,690 sont applicables aux contrats administratifs, c’est-à-dire qu’il 115 00:06:53,890 --> 00:06:56,330 n’y a pas besoin d’une clause au sein du contrat. 116 00:06:56,530 --> 00:06:57,320 C’est très souvent le cas. 117 00:06:57,520 --> 00:07:00,440 Il existe très souvent des clauses de résiliation au sein des contrats, 118 00:07:00,710 --> 00:07:05,750 qui prévoient d’ailleurs les indemnités que doit verser la personne qui 119 00:07:05,950 --> 00:07:06,710 résilie. 120 00:07:06,910 --> 00:07:11,120 Mais en tout cas, même en dehors d’une clause contractuelle, 121 00:07:11,320 --> 00:07:15,860 l’administration a le droit de résilier un contrat administratif. 122 00:07:16,060 --> 00:07:20,900 L’arrêt Distillerie de Magnac-Laval ne le dit pas, mais la jurisprudence 123 00:07:21,100 --> 00:07:22,450 postérieure est très claire sur ce point. 124 00:07:22,750 --> 00:07:26,200 L’administration ne peut procéder à une résiliation unilatérale que 125 00:07:26,400 --> 00:07:32,260 si elle invoque un motif d’intérêt général et si ce motif n’est pas 126 00:07:32,460 --> 00:07:35,980 présent, la résiliation par l’administration est considérée 127 00:07:36,180 --> 00:07:38,680 comme une faute que l’administration doit indemniser. 128 00:07:40,030 --> 00:07:45,040 De toute manière, l’administration doit indemniser son cocontractant 129 00:07:45,240 --> 00:07:47,950 pour les préjudices qu’il subit du fait de la résiliation. 130 00:07:48,150 --> 00:07:48,910 Donc, deux choses. 131 00:07:49,330 --> 00:07:51,910 Si l’administration n’invoque pas de motif d’intérêt général, 132 00:07:52,210 --> 00:07:56,230 elle doit indemniser totalement son cocontractant, c’est-à-dire 133 00:07:56,440 --> 00:08:03,790 à la fois pour sa faute et pour les surcoûts que cela représente 134 00:08:03,990 --> 00:08:05,680 éventuellement pour le cocontractant de l’administration. 135 00:08:06,010 --> 00:08:10,240 Et si l’administration a bien invoqué un motif d’intérêt général, 136 00:08:11,140 --> 00:08:15,130 elle devra tout de même indemniser, non pas pour sa faute, 137 00:08:15,490 --> 00:08:20,260 le cocontractant pour les frais qu’il a dû engager du fait de la 138 00:08:20,460 --> 00:08:21,220 résiliation.