1 00:00:06,090 --> 00:00:06,850 Bonjour. 2 00:00:07,911 --> 00:00:09,644 Alors derrière la notion de nécessité, 3 00:00:09,820 --> 00:00:13,866 je crois qu'on peut voir le principe qui vient limiter 4 00:00:13,911 --> 00:00:16,755 ou les principes qui viennent limiter la rétroactivité de la loi fiscale 5 00:00:16,800 --> 00:00:23,200 mais aussi un certain nombre de principes qui viennent à limiter ce pouvoir de sanction, 6 00:00:23,333 --> 00:00:26,800 la définition et le régime des sanctions fiscales 7 00:00:26,840 --> 00:00:29,733 ainsi que les pouvoirs d'investigation de l'administration. 8 00:00:30,120 --> 00:00:33,422 Je vais évoquer très brièvement à ce stade ces deux points 9 00:00:33,600 --> 00:00:35,600 parce que nous reviendrons à la fois sur les sanctions 10 00:00:35,680 --> 00:00:39,200 et sur les pouvoirs d'investigation un petit peu plus tard au titre des procédures 11 00:00:39,333 --> 00:00:40,888 que nous étudierons ultérieurement. 12 00:00:40,888 --> 00:00:44,888 Mais notons dès ce stade, dans un  deuxième puis un troisième paragraphe, 13 00:00:45,155 --> 00:00:47,111 d'abord les limites aux sanctions fiscales. 14 00:00:47,610 --> 00:00:49,955 Simplement ce qui est essentiel d'avoir en tête 15 00:00:50,044 --> 00:00:56,044 je crois c'est que le Conseil constitutionnel à partir des années 1980, 16 00:00:56,088 --> 00:00:59,720 alors il y a plusieurs décisions qui ne concernent pas que la fiscalité, 17 00:00:59,866 --> 00:01:03,060 c'est pour ça que je n'en cite aucune précisément à ce stade. 18 00:01:03,450 --> 00:01:05,155 Le Conseil constitutionnel  est venu considérer 19 00:01:05,200 --> 00:01:07,955 que globalement les sanctions administratives,  20 00:01:08,000 --> 00:01:10,177 celles que le CSA et c'est plutôt avec le CSA  21 00:01:10,177 --> 00:01:14,400 que les premières décisions importantes en 1986 et 89 ont été adoptées, 22 00:01:14,533 --> 00:01:18,000 eh bien avaient un pouvoir de sanction que la loi leur avait conféré 23 00:01:18,088 --> 00:01:21,240 qui devait globalement s'exercer de la même manière,  24 00:01:21,288 --> 00:01:24,355 avec les mêmes garanties accordées aux personnes concernées 25 00:01:24,355 --> 00:01:27,244 que les sanctions pénales,  manié par le juge pénal,  26 00:01:28,666 --> 00:01:30,355 trouvaient à être mis en oeuvre. 27 00:01:30,840 --> 00:01:35,288 Cette espèce d'assimilation des sanctions administratives aux sanctions pénales 28 00:01:35,377 --> 00:01:39,822 pour ce qui concerne leur contrôle, les garanties offertes aux personnes visées,  29 00:01:39,822 --> 00:01:42,755 ce mouvement d'assimilation concerne tout autant la matière fiscale. 30 00:01:42,800 --> 00:01:44,266 Il y a une jurisprudence aujourd'hui 31 00:01:44,311 --> 00:01:47,511 relativement sophistiquée du Conseil constitutionnel 32 00:01:48,222 --> 00:01:53,555 s'agissant de la proportionnalité dans la définition des peines notamment, 33 00:01:54,044 --> 00:01:58,266 dans la précision des incriminations,  des définitions des sanctions, 34 00:01:58,310 --> 00:02:02,977 dans le contrôle des exigences de respect des droits de la défense etc.. 35 00:02:03,240 --> 00:02:08,250 Qui donc finalement est à peu près similaire, il y a quelques différences 36 00:02:08,266 --> 00:02:10,622 mais qui restent relativement  anecdotiques me semble-t-il. 37 00:02:10,940 --> 00:02:15,866 Il y a donc un mouvement très fort consistant à étendre 38 00:02:15,866 --> 00:02:18,990 aux sanctions administratives les mêmes garanties que les sanctions pénales. 39 00:02:19,260 --> 00:02:20,888 Néanmoins en matière fiscale 40 00:02:20,880 --> 00:02:24,400 cette jurisprudence n'a pas produit d'effet formidable 41 00:02:25,377 --> 00:02:29,155 parce que le texte législatif en général est plutôt bien ficelé 42 00:02:29,200 --> 00:02:34,400 et que le Parlement je crois a le souci lui même de poser des règles en matière de sanctions 43 00:02:34,530 --> 00:02:38,400 qui restent relativement raisonnables,  proportionnées, adaptées etc. etc. 44 00:02:38,755 --> 00:02:42,920 Donc il y a beaucoup de décisions du Conseil constitutionnel,  45 00:02:43,244 --> 00:02:44,888 énormément notamment en QPC  46 00:02:44,933 --> 00:02:49,688 car beaucoup de textes sont antérieurs à l'entrée en vigueur de la procédure de QPC 47 00:02:49,950 --> 00:02:54,622 et même antérieurs à 1958, n'avaient souvent donc pas été soumis au Conseil constitutionnel. 48 00:02:54,666 --> 00:02:57,111 Donc beaucoup ont été contestés ensuite par des contribuables 49 00:02:57,111 --> 00:02:58,933 qui subissaient lesdites sanctions,  50 00:02:58,933 --> 00:03:02,044 sachant qu'il y a plusieurs centaines de sanctions différentes prévues 51 00:03:02,044 --> 00:03:04,933 par le Code général des impôts et le livre des procédures fiscales, 52 00:03:04,933 --> 00:03:09,180 mais c'est surtout le code général des impôts pour différentes situations particulières. 53 00:03:09,390 --> 00:03:13,911 Bref le Conseil constitutionnel a pris des dizaines de décisions en la matière. 54 00:03:13,911 --> 00:03:17,955 J'en citerai simplement une, enfin une série de décisions assez massives 55 00:03:18,170 --> 00:03:21,022 puisqu'elles concernaient les sanctions les plus fréquemment adoptées,  56 00:03:21,066 --> 00:03:24,666 celles de l'article, nous le verrons,  1729 du Code général des impôts, 57 00:03:24,711 --> 00:03:27,155 qui pose ce qu'on appelle les majorations de droit commun,  58 00:03:27,466 --> 00:03:32,666 c'est-à-dire la majoration qui concerne la plupart des infractions à la loi fiscale. 59 00:03:32,760 --> 00:03:35,200 Et donc dans ces décisions du 17 mars 2011, 60 00:03:35,244 --> 00:03:37,822 le Conseil constitutionnel vient confirmer 61 00:03:37,820 --> 00:03:42,533 que globalement les dispositifs fixant les sanctions,  62 00:03:43,370 --> 00:03:46,450 majoration mais c'est une forme de sanction fiscale, les plus courantes 63 00:03:46,550 --> 00:03:49,620 étaient globalement tout à fait conformes aux exigences 64 00:03:49,688 --> 00:03:52,355 qui découlent de l'article 8 de la DDHC,  65 00:03:52,444 --> 00:03:54,266 article 8 de la Déclaration des droits de l'homme. 66 00:03:54,488 --> 00:03:59,155 Ce principe de la nécessité et de la proportionnalité des peines pénales à l'origine 67 00:03:59,422 --> 00:04:03,288 vient donc trouver à s'appliquer aussi en matière fiscale. 68 00:04:03,840 --> 00:04:06,177 Un mot, un peu dans le même état d'esprit,  69 00:04:06,622 --> 00:04:10,133 s'agissant des pouvoirs d'investigation paragraphe troisième de l'administration. 70 00:04:10,133 --> 00:04:15,244 Alors même chose, c'est un peu comme en matière pénale. 71 00:04:15,600 --> 00:04:19,111 Par hypothèse, l'ensemble des pouvoirs d'investigation que la loi et la loi seule  72 00:04:19,333 --> 00:04:24,222 accorde aux agents de l'administration fiscale porte atteinte 73 00:04:24,530 --> 00:04:28,177 par construction aux libertés individuelles,  dans des proportions variables. 74 00:04:28,222 --> 00:04:34,622 Nous évoquerons brièvement ces différents droits d'investigation de l'administration 75 00:04:34,710 --> 00:04:38,550 mais ça peut aller jusqu'à une véritable perquisition 76 00:04:38,550 --> 00:04:42,622 conduite par des agents de l'administration fiscale sur le fondement de l'article L 16 B, 77 00:04:42,622 --> 00:04:45,066 vous pouvez le noter, du Livre des procédures fiscales. 78 00:04:45,111 --> 00:04:49,955 Donc des choses extrêmement attentatoires  évidemment à la liberté individuelle. 79 00:04:50,370 --> 00:04:53,555 Néanmoins le Conseil constitutionnel a toujours considéré 80 00:04:53,911 --> 00:04:56,000 qu'il y avait une forme de nécessité,  81 00:04:56,044 --> 00:04:57,822 et c'est pour cela que j'en parle à ce stade,  82 00:04:57,911 --> 00:05:01,790 à ce que l'administration soit dotée de pouvoirs forts afin, 83 00:05:01,790 --> 00:05:04,044 et c'est cela qui est très intéressant, afin,  84 00:05:04,311 --> 00:05:07,511 et c'est formulé de cette manière depuis 1999,  85 00:05:07,822 --> 00:05:14,044 que l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, 86 00:05:14,130 --> 00:05:15,600 objectif de valeur constitutionnelle 87 00:05:15,688 --> 00:05:17,688 donc de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, 88 00:05:17,688 --> 00:05:22,888 consacré en 1999 par le Conseil constitutionnel, soit respecté,  89 00:05:23,555 --> 00:05:27,680 il est indispensable que l'administration soit dotée de pouvoirs importants. 90 00:05:28,040 --> 00:05:32,000 Cela n'interdit pas au Conseil constitutionnel de contrôler la manière 91 00:05:32,044 --> 00:05:34,622 dont ces pouvoirs d'investigation sont mis en oeuvre. 92 00:05:34,790 --> 00:05:37,022 On a eu un exemple extrêmement intéressant 93 00:05:37,460 --> 00:05:39,525 dans la décision du Conseil constitutionnel 94 00:05:39,600 --> 00:05:44,620 relative à la loi de finances pour 2020 par exemple,  95 00:05:44,750 --> 00:05:49,050 où était en cause l'attribution à l'administration fiscale 96 00:05:49,050 --> 00:05:51,700 de nouveaux pouvoirs de collecte notamment sur Internet 97 00:05:51,800 --> 00:05:57,640 de données mises en ligne par les internautes,  98 00:05:57,688 --> 00:05:59,422 qui sont potentiellement des contribuables. 99 00:05:59,511 --> 00:06:03,377 Et donc afin pour l'administration d'effectuer un certain nombre de recoupements 100 00:06:04,570 --> 00:06:09,866 liés à tout ce qu'un contribuable pourrait poster sur des sites 101 00:06:09,860 --> 00:06:14,888 tels que leboncoin ou encore sur Facebook,  102 00:06:15,244 --> 00:06:19,911 afin le cas échéant d'identifier en quelque sorte des comportements 103 00:06:20,400 --> 00:06:23,377 qui pourraient sembler pas tout à fait en phase 104 00:06:23,640 --> 00:06:26,755 avec les déclarations du contribuable quant à ses revenus, quant à son patrimoine etc. 105 00:06:27,770 --> 00:06:28,622 Je cite cet exemple 106 00:06:28,620 --> 00:06:31,688 parce que les parlementaires s'étaient saisis de cette question 107 00:06:31,733 --> 00:06:35,244 et s'étaient un peu émus des risques d'atteinte évidemment aux libertés individuelles 108 00:06:35,422 --> 00:06:39,911 liées à cette collecte massive d'informations nominatives sur Internet. 109 00:06:40,070 --> 00:06:44,480 Le Conseil constitutionnel a légèrement retouché les choses 110 00:06:44,488 --> 00:06:49,333 en annulant une toute petite partie de ce que le législateur avait prévu mais, 111 00:06:49,377 --> 00:06:52,800 et c'est ça qui m'intéresse, a rappelé cette exigence d'équilibre 112 00:06:52,933 --> 00:06:56,311 qu'il y avait entre d'un côté l'objectif de valeur constitutionnelle 113 00:06:56,310 --> 00:06:58,444 de lutte contre la fraude fiscale et l'évasion fiscale 114 00:06:58,488 --> 00:07:03,155 mais d'un autre côté les exigences de respect des droits individuels,  115 00:07:03,200 --> 00:07:07,730 des libertés individuelles qui devaient parfois venir limiter 116 00:07:08,090 --> 00:07:11,750 certaines pratiques potentielles de l'administration. 117 00:07:11,822 --> 00:07:14,360 Nous verrons un peu dans le détail concret quelles sont ces pratiques 118 00:07:14,900 --> 00:07:18,500 et donc ça nous permettra de revoir ces éléments. 119 00:07:19,580 --> 00:07:22,666 Enfin c'est le dernier point qui n'est pas sans intérêt 120 00:07:23,288 --> 00:07:27,777 même s'il a été peut-être un peu à la mode il y a quelques années et qu'il l'est moins,   121 00:07:27,822 --> 00:07:34,000 c'est la question de la nécessaire,  indispensable mais parfois excessive,  122 00:07:35,244 --> 00:07:37,670 complexité de la loi fiscale et donc des limites 123 00:07:37,777 --> 00:07:40,577 qui sont apportées depuis quelques temps par le Conseil constitutionnel. 124 00:07:40,610 --> 00:07:43,377 Voyons cela pour terminer dans un quatrième paragraphe. 125 00:07:44,266 --> 00:07:50,090 Il se trouve que vous le savez le Conseil constitutionnel a dégagé 126 00:07:50,133 --> 00:07:55,022 depuis plusieurs années pour l'ensemble des branches du droit des exigences 127 00:07:55,130 --> 00:07:58,800 d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi,  128 00:07:59,066 --> 00:08:05,000 même si en pratique ses affirmations ne sont qu'assez peu suivies d'effet. 129 00:08:05,240 --> 00:08:10,844 Il ne lui arrive qu'assez peu de sanctionner le Parlement pour un défaut d'intelligibilité,  130 00:08:10,844 --> 00:08:13,288 de clarté, de lisibilité de la loi. 131 00:08:13,460 --> 00:08:16,910 Et pourtant en matière fiscale il a eu l'occasion de le faire 132 00:08:17,422 --> 00:08:21,644 en reprenant un petit peu ce principe général, à la faveur d'une décision  133 00:08:21,688 --> 00:08:25,690 qui reste importante même si au bout du compte elle est très isolée,  134 00:08:25,822 --> 00:08:27,244 elle n'a pas été reproduite. 135 00:08:27,288 --> 00:08:30,977 Donc ça peut sembler avec du recul anecdotique mais je pense que ça reste intéressant. 136 00:08:30,977 --> 00:08:35,866 Une décision du 29 décembre 2005 qui portait sur la loi de finances pour 2006 137 00:08:35,866 --> 00:08:38,711 et il se trouve alors en un mot c'est un peu amusant 138 00:08:38,910 --> 00:08:44,400 que dans cette loi de finances le gouvernement à l'époque de Dominique de Villepin 139 00:08:44,480 --> 00:08:47,600 avait souhaité créer un mécanisme a priori extrêmement sympathique, 140 00:08:48,350 --> 00:08:51,244 on peut le considérer comme tel en tout cas, qui visait 141 00:08:51,644 --> 00:08:57,022 à limiter le bénéfice que pouvaient tirer certains contribuables 142 00:08:57,288 --> 00:09:01,911 de l'ensemble des niches fiscales offertes aux contribuables à l'impôt sur le revenu. 143 00:09:02,040 --> 00:09:05,422 L'idée est la suivante : au titre de l'impôt sur le revenu il y avait à l'époque,  144 00:09:05,510 --> 00:09:10,355 c'est à peu près toujours le cas,  de l'ordre de 80 à 100 niches,  145 00:09:10,755 --> 00:09:12,533 donc vous pouvez bénéficier d'une niche 146 00:09:12,533 --> 00:09:15,111 si vous embaucher une femme de ménage à domicile,  147 00:09:15,244 --> 00:09:22,400 plus d'une autre niche si vous réalisez des travaux d'isolation de votre logement,  148 00:09:22,400 --> 00:09:26,755 plus d'une troisième si vous roulez avec un moteur GPL, 149 00:09:27,155 --> 00:09:28,222 je ne vais pas les multiplier. 150 00:09:28,222 --> 00:09:33,866 Donc c'est plus de 80 dispositifs fiscaux particuliers favorables au contribuable,  151 00:09:33,911 --> 00:09:37,200 qui lui fait gagner un peu d'argent à chaque fois évidemment que la loi prévoit. 152 00:09:37,370 --> 00:09:43,111 Or il se trouve que ce dispositif avait pour ambition de créer une sorte de plafond global 153 00:09:43,200 --> 00:09:46,190 avec l'idée que au maximum le contribuable 154 00:09:46,310 --> 00:09:47,688 qui tire profit de toutes ces niches 155 00:09:47,733 --> 00:09:52,070 ou d'une partie de ces niches ne pourra pas avoir un cadeau supérieur à un montant donné. 156 00:09:52,670 --> 00:09:54,680 L'idée peut sembler plutôt sympathique. 157 00:09:54,950 --> 00:09:57,155 Néanmoins le Conseil constitutionnel l'a annulée 158 00:09:57,150 --> 00:10:02,266 et donc de manière tout à fait inédite sur ce fondement 159 00:10:04,666 --> 00:10:08,311 tiré de plusieurs articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen 160 00:10:08,400 --> 00:10:10,755 et de la Constitution, je ne vais pas vous les citer tous, 161 00:10:10,750 --> 00:10:15,466 il y a une espèce de gros mix 162 00:10:15,555 --> 00:10:20,355 entre plusieurs principes pour au bout du compte considérer 163 00:10:20,444 --> 00:10:23,555 que, je cite parce que la formule est amusante, 164 00:10:23,644 --> 00:10:29,288 que les dispositifs fiscaux avaient vocation à être annulés 165 00:10:29,333 --> 00:10:35,200 lorsqu'ils étaient "d'une complexité excessive et non justifiée 166 00:10:35,200 --> 00:10:36,977 par un motif d'intérêt général suffisant". 167 00:10:36,977 --> 00:10:40,888 Alors la formule est plutôt amusante parce que cela suggère que le fait 168 00:10:41,060 --> 00:10:44,240 d'être d'une complexité excessive en soi n'est pas un motif d'annulation. 169 00:10:45,080 --> 00:10:48,020 Ce n'est seulement que dans le cas où la complexité excessive 170 00:10:48,220 --> 00:10:51,340 en plus n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général suffisant 171 00:10:51,560 --> 00:10:53,600 que la loi devient inconstitutionnelle. 172 00:10:53,644 --> 00:10:56,690 Et donc c'est ce qui s'est passé avec ce dispositif sympathique 173 00:10:56,960 --> 00:11:02,044 qui était vraisemblablement justifié par un motif d'intérêt d'intérêt général en tant que tel, 174 00:11:02,044 --> 00:11:07,066 mais la complexité du dispositif, elle, était excessive et non justifiée. 175 00:11:07,190 --> 00:11:07,911 Pourquoi ?  176 00:11:08,130 --> 00:11:11,111 Tout simplement parce que la direction de législation fiscale 177 00:11:11,155 --> 00:11:14,400 avait effectivement rédigé un article qui était à peu près illisible. 178 00:11:14,590 --> 00:11:17,955 Alors pour des raisons que l'on peut comprendre, comme je le disais 80 niches,  179 00:11:18,177 --> 00:11:21,800 et donc l'objectif avait été dans un unique article de loi 180 00:11:22,000 --> 00:11:26,311 de faire référence en fait aux 80 niches différentes donc à 80 articles, 181 00:11:26,311 --> 00:11:28,910 et en fait même un peu plus du Code général des impôts,  182 00:11:29,280 --> 00:11:34,133 en créant une espèce de formule extrêmement alambiquée permettant justement de voir 183 00:11:34,177 --> 00:11:37,822 comment additionner les avantages de nature différente liés à ces 80 niches 184 00:11:37,820 --> 00:11:39,333 pour finalement fixer une limite. 185 00:11:39,380 --> 00:11:42,590 Bref en pratique l'article était totalement illisible. 186 00:11:42,620 --> 00:11:47,111 Alors il aurait pu être mis en vigueur et mis en œuvre au bout du compte par l'administration 187 00:11:47,155 --> 00:11:51,955 mais avec une complexité qui a semblé excessive aux yeux du Conseil constitutionnel. 188 00:11:52,940 --> 00:11:54,260 Cela reste relativement anecdotique. 189 00:11:54,260 --> 00:11:54,622 Pourquoi ?  190 00:11:54,666 --> 00:12:01,377 C'était un peu dans une logique de coup de la part du Conseil constitutionnel : 191 00:12:01,511 --> 00:12:04,266 c'est à la fin de la présidence de Pierre Mazeaud 192 00:12:04,266 --> 00:12:08,666 qui avait beaucoup dans la presse dit son aversion 193 00:12:08,711 --> 00:12:12,222 pour la tendance du législateur à bavarder,  194 00:12:12,220 --> 00:12:16,177 à faire des lois qui ne servaient à pas grand chose etc etc. 195 00:12:16,240 --> 00:12:19,955 Et donc il y avait clairement la volonté de concrétiser ces mises en garde,  196 00:12:20,311 --> 00:12:23,555 même si encore une fois au delà des intentions 197 00:12:23,555 --> 00:12:28,355 c'est toujours un peu difficile de venir contrôler puis censurer le Parlement 198 00:12:28,400 --> 00:12:31,422 pour une complexité excessive des textes fiscaux qu'il adopte,  199 00:12:32,133 --> 00:12:36,133 parce que je l'avais dit lors d'une de nos premières séances, 200 00:12:36,177 --> 00:12:38,240 et je crois que c'est une idée importante à garder en tête,  201 00:12:38,577 --> 00:12:41,422 dans l'immense majorité des cas, et y compris dans cette affaire,  202 00:12:41,422 --> 00:12:44,933 lorsque la loi fiscale est complexe ce n'est pas simplement par mauvaise rédaction, 203 00:12:44,977 --> 00:12:48,577 par incompétence des rédacteurs,  par négligence ou que sais-je encore. 204 00:12:48,577 --> 00:12:51,733 C'est parce que les situations sont complexes et que justement 205 00:12:51,866 --> 00:12:54,560 pour prendre en compte l'ensemble des situations potentielles, 206 00:12:54,800 --> 00:12:58,700 pour s'adapter dans un souci de justice, dans un souci d'équité 207 00:12:58,900 --> 00:13:00,650 à l'ensemble des situations potentielles,  208 00:13:00,650 --> 00:13:04,600 le législateur justement essaye d'être extrêmement précautionneux,  209 00:13:04,600 --> 00:13:07,911 d'envisager un luxe de détails et au bout du compte cela produit des textes 210 00:13:07,955 --> 00:13:11,000 qui sont évidemment très complexes à lire, très complexes à comprendre. 211 00:13:11,570 --> 00:13:15,022 Je crois que c'est un peu dans l'immense majorité des cas encore une fois la rançon 212 00:13:15,200 --> 00:13:19,777 en quelque sorte du souci de justice qui guide le rédacteur de la loi fiscale quel qu'il soit, 213 00:13:20,260 --> 00:13:21,511 de sorte qu'au bout du compte 214 00:13:21,555 --> 00:13:24,680 c'est un petit peu je pense à un procès facile de considérer 215 00:13:24,755 --> 00:13:28,177 que la complexité c'est mal c'est sale et ça doit être combattu. 216 00:13:28,550 --> 00:13:30,977 Evidemment que tout le monde préfère quand les choses sont simples,  217 00:13:31,155 --> 00:13:34,088 évidemment aussi que ce n'est pas toujours possible en matière fiscale. 218 00:13:34,311 --> 00:13:37,333 Le Conseil constitutionnel a un peu fait mine de l'oublier dans cette affaire. 219 00:13:37,644 --> 00:13:41,955 Bon voilà pour ce qui devient un petit peu anecdotique encore une fois,  220 00:13:41,955 --> 00:13:45,290 cette décision n'a pas fait école si je puis dire depuis, 221 00:13:45,466 --> 00:13:47,422 sans qu'on puisse complètement jurer 222 00:13:47,422 --> 00:13:50,977 que depuis cette décision le législateur fiscal rédige les textes différemment 223 00:13:51,022 --> 00:13:54,977 mais pour des raisons je le répète qui tiennent un peu de la nécessité,  224 00:13:55,333 --> 00:13:58,088 nous parlions du principe de nécessité nous y revoilà. 225 00:13:58,790 --> 00:14:03,555 Voilà donc pour ces sources internes constitutionnelles. 226 00:14:03,800 --> 00:14:08,533 Il nous reste maintenant à nous ouvrir au delà des frontières aux sources internationales,  227 00:14:08,800 --> 00:14:11,111 nous les aborderons lors de notre prochaine séance.