1 00:00:06,870 --> 00:00:12,800 Après avoir examiné les enjeux du contentieux  de la formation des contrats administratifs, 2 00:00:12,800 --> 00:00:17,920 voyons donc quelles sont les solutions adoptées, par le droit positif. 3 00:00:18,600 --> 00:00:19,960 Et nous distinguerons donc,  4 00:00:20,160 --> 00:00:25,440 entre le contentieux de pleine juridiction et le contentieux de l'excès de pouvoir. 5 00:00:26,030 --> 00:00:28,440 Commençons par le contentieux de pleine juridiction. 6 00:00:30,040 --> 00:00:34,760 Car, conformément à l'esprit de la classification générale 7 00:00:34,760 --> 00:00:37,440 des voies de recours en contentieux administratif,  8 00:00:37,860 --> 00:00:40,680 le contentieux de pleine juridiction apparaît 9 00:00:41,300 --> 00:00:44,660 comme la terre d'élection du contentieux contractuel. 10 00:00:46,180 --> 00:00:49,500 C'est vrai d'abord, en matière de procédure d'urgence. 11 00:00:49,570 --> 00:00:51,000 Il y en a notamment deux 12 00:00:51,620 --> 00:00:54,360 - sur lesquels je passe rapidement parce que c'est du contentieux technique - 13 00:00:54,580 --> 00:01:00,880 mais je vous les mentionne tout de même - deux référés qui sont spécifiques à la matière. 14 00:01:01,870 --> 00:01:05,775 Le référé précontractuel qui vise à empêcher la méconnaissance 15 00:01:05,770 --> 00:01:08,150 des obligations de publicité et de mise en concurrence,  16 00:01:09,200 --> 00:01:12,460 uniquement celles-ci, avant que le contrat ne soit conclu. 17 00:01:13,240 --> 00:01:17,750 Et le référé contractuel qui vise également à garantir le respect 18 00:01:17,925 --> 00:01:20,820 des obligations de publicité et de mise en concurrence 19 00:01:21,200 --> 00:01:24,180 au moment même où le contrat vient d'être conclu. 20 00:01:25,570 --> 00:01:30,040 Sur le fond maintenant, le juge administratif, de pleine juridiction, 21 00:01:31,740 --> 00:01:38,200 a créé un recours en contestation de la validité d'un contrat administratif. 22 00:01:38,800 --> 00:01:46,280 Et ce recours, peut être aussi bien exercé par les parties contractantes que par les tiers. 23 00:01:47,290 --> 00:01:52,780 S'agissant des parties contractantes, l'arrêt qui a redessiné l'office,  24 00:01:53,170 --> 00:01:58,480 du juge administratif est un arrêt du Conseil d'État d'Assemblée du 28 décembre 2009, 25 00:01:58,620 --> 00:02:02,960 l'arrêt Commune de Béziers n°1 - parce que nous verrons qu'il y en a d'autres.  26 00:02:04,840 --> 00:02:09,700 Cet arrêt impose au juge de d'abord statuer,  27 00:02:10,100 --> 00:02:16,780 au regard de la directive fondamentale de la stabilité des relations contractuelles. 28 00:02:17,380 --> 00:02:24,760 Et donc, puisque tout doit être fait pour sauver le contrat de la disparition, 29 00:02:25,260 --> 00:02:29,100 le juge de plein contentieux, depuis cet arrêt, est invité 30 00:02:29,375 --> 00:02:31,725 à tenir compte de l'importance 31 00:02:31,720 --> 00:02:35,575 et les conséquences des illégalités  commises au stade de la passation,  32 00:02:35,575 --> 00:02:38,320 de la conclusion d'un contrat administratif. 33 00:02:39,500 --> 00:02:44,460 Le juge est donc invité à choisir la sanction qui lui paraît la plus opportune. 34 00:02:45,390 --> 00:02:47,480 Les sanctions privilégiées sont donc de deux sortes :  35 00:02:48,060 --> 00:02:53,600 poursuite de l'exécution du contrat,  sous réserve de mesures de régulation, 36 00:02:54,090 --> 00:02:58,580 ou éventuellement, pour les illégalités  plus graves, résiliation pour l'avenir,  37 00:02:59,060 --> 00:03:02,140 avec le cas échéant, effet différé. 38 00:03:03,030 --> 00:03:05,280 Et d'ailleurs, "l'objectif de stabilité contractuelle", 39 00:03:05,280 --> 00:03:06,500 nous dit l'arrêt Commune de Béziers, 40 00:03:06,500 --> 00:03:10,420 "impose également au juge de vérifier avant l'usage du pouvoir de résiliation 41 00:03:10,600 --> 00:03:14,280 si le prononcé d'une sanction et donc le rétablissement de la légalité, 42 00:03:14,400 --> 00:03:17,920 ne sont pas moins importants que la préservation de l'intérêt général,  43 00:03:17,980 --> 00:03:21,380 qui s'attache à la poursuite du contrat". 44 00:03:21,900 --> 00:03:24,080 Autrement dit, un peu comme  en matière d'excès de pouvoir,  45 00:03:24,080 --> 00:03:27,520 notre juge administratif  aujourd'hui du plein contentieux,  46 00:03:28,540 --> 00:03:33,540 est invité à opérer la balance, la pesée des intérêts en présence 47 00:03:33,620 --> 00:03:37,540 pour déterminer la sanction la plus adéquate. 48 00:03:38,100 --> 00:03:46,720 Ce n'est vraiment, que si on est en présence d'un très grave vice d'illégalité 49 00:03:47,020 --> 00:03:52,600 que le juge administratif va désormais pouvoir prononcer la sanction la plus sévère,  50 00:03:52,600 --> 00:03:57,060 la plus irrémédiable, l'annulation rétroactive du contrat. 51 00:03:57,510 --> 00:04:00,220 Et l'arrêt Commune de Béziers nous dit, que désormais,  52 00:04:00,220 --> 00:04:03,620 il n'y a que deux grandes catégories de vices 53 00:04:03,860 --> 00:04:08,860 qui sont susceptibles d'entraîner l'annulation du contrat : 54 00:04:09,160 --> 00:04:12,480 d'une part, l'illicéité du contenu du contrat 55 00:04:12,760 --> 00:04:16,140 et d'autre part, les vices d'une particulière gravité,  56 00:04:16,860 --> 00:04:21,960 notamment, ceux affectant les conditions dans lesquelles les consentements se sont échangés. 57 00:04:23,660 --> 00:04:26,020 À cet objectif de stabilité contractuelle, 58 00:04:26,380 --> 00:04:29,140 l'arrêt Commune de Béziers numéro un en ajoute un autre 59 00:04:29,300 --> 00:04:33,540 qui est le principe de loyauté contractuelle. 60 00:04:34,490 --> 00:04:40,400 La finalité ici du Conseil d'État a été de lutter, contre l'invocation abusive,  61 00:04:40,500 --> 00:04:43,180 d'illégalité contractuelle,  des années plus tard, 62 00:04:43,180 --> 00:04:47,960  au fait au moment de l'exécution du contrat lorsqu'en réalité,  63 00:04:47,960 --> 00:04:52,140 l'une des parties ne cherche rien d'autre que d'échapper à ses obligations. 64 00:04:52,140 --> 00:04:56,140 Et pour y échapper, il invoque que le contrat était depuis 10 ans, 20 ans, 65 00:04:56,140 --> 00:04:57,260 entaché d'une illégalité. 66 00:04:57,820 --> 00:05:01,920 Et donc, l'arrêt Commune de Béziers 1  permet au juge administratif,  67 00:05:03,440 --> 00:05:06,020 quand bien même, il existerait une grave irrégularité,  68 00:05:06,020 --> 00:05:09,160 quand bien même l'intérêt général ne serait pas en péril,  69 00:05:09,540 --> 00:05:13,060 de ne pas tenir compte de l'illégalité invoquée 70 00:05:13,120 --> 00:05:16,120 parce qu'elle est invoquée de manière déloyale. 71 00:05:17,280 --> 00:05:25,260 Parce qu'en réalité, le requérant, le cocontractant connaissait depuis longtemps,  72 00:05:25,300 --> 00:05:29,160 peut-être même depuis toujours, depuis l'origine, l'illégalité et évidemment,  73 00:05:29,160 --> 00:05:30,700 il l'invoque simplement 10 ans plus tard,  74 00:05:30,700 --> 00:05:33,520 au moment où il veut essayer d'échapper à ses obligations 75 00:05:33,520 --> 00:05:37,300 en invoquant qu'il n'a pas d'obligation à respecter puisque le contrat, en réalité,  76 00:05:37,400 --> 00:05:39,860 est censé n'avoir jamais existé. 77 00:05:40,500 --> 00:05:42,450 L'affaire qui avait donné lieu à l'arrêt Commune de Béziers 78 00:05:42,450 --> 00:05:44,375 est de ce point de vue là tout à fait exemplaire, 79 00:05:44,525 --> 00:05:48,760 puisque le vice était ici tiré de la signature prématurée 80 00:05:48,760 --> 00:05:50,860 d'un contrat d'une collectivité territoriale. 81 00:05:50,920 --> 00:05:53,325 Prématurée, c'est-à-dire que le contrat avait été signé 82 00:05:53,325 --> 00:05:59,340 avant la transmission au préfet de la délibération de l'assemblée délibérante,  83 00:05:59,860 --> 00:06:02,060 autorisant le principe du recours au contrat. 84 00:06:02,430 --> 00:06:03,925 Mais, ici, vous le voyez,  85 00:06:03,920 --> 00:06:07,300 c'est le type même de l'obligation procédurale qui est instituée uniquement 86 00:06:07,300 --> 00:06:11,040 pour que les préfets puissent exercer leur contrôle de légalité. 87 00:06:11,230 --> 00:06:15,680 Et donc, les parties contractantes sont ici sans doute de mauvaise foi 88 00:06:15,680 --> 00:06:20,780 de soulever une telle irrégularité des années plus tard pour échapper à leurs obligations.  89 00:06:21,960 --> 00:06:26,440 Donc, voilà, arrêt Commune de Béziers 1, 2009, qui a redessiné,  90 00:06:26,520 --> 00:06:31,120 une action en contestation de la validité du contrat administratif, 91 00:06:31,120 --> 00:06:33,040 ouverte aux parties contractantes. 92 00:06:33,520 --> 00:06:40,840 Mais, ce qu'il faut surtout noter, c'est l'ouverture du plein contentieux aux tiers au contrat. 93 00:06:41,050 --> 00:06:42,480 Et cette fois-ci, 94 00:06:42,720 --> 00:06:48,380 cette grande innovation est due à un arrêt du Conseil d'État d'assemblée du 4 avril 2014, 95 00:06:48,380 --> 00:06:50,960 l'arrêt Département de Tarn-et-Garonne. 96 00:06:51,740 --> 00:06:55,500 Département de Tarn-et-Garonne  qui en réalité est une généralisation, 97 00:06:55,780 --> 00:06:59,780 d'une expérimentation qui avait été tentée quelques années plus tôt par le Conseil d'État,  98 00:06:59,900 --> 00:07:03,820 dans son arrêt de 2007, Société Tropic Travaux. 99 00:07:03,920 --> 00:07:07,680 Mais, l'expérimentation était limitée aux contentieux,  100 00:07:08,120 --> 00:07:12,600 aux recours exercés par des candidats évincés d'une procédure de passation. 101 00:07:12,670 --> 00:07:17,820 Ici, c'est à tout tiers qu'est ouvert le juge de plein contentieux. 102 00:07:19,040 --> 00:07:21,940 Donc, l'arrêt Département  de Tarn-et-Garonne, met fin, 103 00:07:21,940 --> 00:07:27,060 à plus d'un siècle de jurisprudence issue de l'arrêt Martin de 1905, 104 00:07:27,140 --> 00:07:31,540 relatif à ce qu'on appelle, la théorie des actes détachables du contrat. 105 00:07:31,630 --> 00:07:36,980 Désormais le tiers, ne doit pas se diriger vers le recours pour excès de pouvoir,  106 00:07:37,860 --> 00:07:41,300 en attaquant les actes satellites du contrat, mais que désormais,  107 00:07:41,300 --> 00:07:44,900 le tiers a la possibilité d'exercer un recours 108 00:07:45,225 --> 00:07:51,480 également en contestation de la validité du contrat devant le juge de plein contentieux.  109 00:07:53,060 --> 00:07:54,960 Dans l'arrêt Département de Tarn-et-Garonne, 110 00:07:54,960 --> 00:07:59,840 le Conseil d'État définit lui-même les conditions de ce recours,  111 00:08:00,280 --> 00:08:03,160 recours ouvert à l'encontre de tous les contrats administratifs, 112 00:08:03,160 --> 00:08:04,540 mais une fois qu'ils sont conclus. 113 00:08:05,020 --> 00:08:07,620 Recours qui doit être exercé dans un délai de deux mois,  114 00:08:07,620 --> 00:08:12,940 à compter non de la notification du contrat,  mais des mesures de publicité appropriées. 115 00:08:14,660 --> 00:08:18,680 Alors, l'intérêt de l'arrêt Département de Tarn-et-Garonne,  116 00:08:18,680 --> 00:08:25,020 c'est précisément d'entourer ce recours d'un certain nombre de conditions, 117 00:08:25,240 --> 00:08:26,620 peut-être même de contraintes. 118 00:08:27,290 --> 00:08:29,360 S'agissant des conditions relatives au requérant,  119 00:08:29,360 --> 00:08:33,440 l'arrêt Département de  Tarn-et-Garonne offre à tout tiers,  120 00:08:34,140 --> 00:08:36,660 une voie d'accès au juge de plein contentieux. 121 00:08:37,320 --> 00:08:40,980 Là où l'arrêt Tropical Travaux, réservait uniquement aux candidats évincés. 122 00:08:42,420 --> 00:08:46,320 Mais, "il faut que le tiers se prévale", nous dit l'arrêt, 123 00:08:46,480 --> 00:08:52,600 "d'un intérêt susceptible d'être lésé,  de façon suffisamment directe 124 00:08:52,600 --> 00:08:56,100 et certaine par la passation du contrat". 125 00:08:57,500 --> 00:09:00,500 Donc, bien évidemment, ce peut être le contribuable local, 126 00:09:00,500 --> 00:09:03,400 ce peut être un syndicat, ce  peut être un usager du service, 127 00:09:03,520 --> 00:09:06,080 ce peut être un candidat évincé, mais  attention,  128 00:09:06,380 --> 00:09:08,980 désormais l'intérêt à agir a fait l'objet d'une restriction. 129 00:09:09,500 --> 00:09:13,640 Il faut que le tiers, fasse la démonstration, 130 00:09:14,260 --> 00:09:19,500 qu'il a un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine. 131 00:09:19,670 --> 00:09:22,580 La même condition n'est pas d'ailleurs opposée 132 00:09:22,740 --> 00:09:27,100 à ce que j'appellerais  des requérants privilégiés, 133 00:09:27,400 --> 00:09:31,540 que sont les membres des organes délibérants des collectivités territoriales 134 00:09:31,780 --> 00:09:33,040 et les préfets. 135 00:09:33,900 --> 00:09:39,340 S'agissant des moyens invocables à l'appui du recours, le nouveau recours,  136 00:09:39,340 --> 00:09:43,680 comme on dit dans le vocabulaire Tarn-et-Garonne, est également très encadré. 137 00:09:44,340 --> 00:09:48,060 Il s'agit d'un recours en contestation de la validité d'un contrat administratif. 138 00:09:48,530 --> 00:09:53,520 Les inégalités soulevées doivent donc tenir non à des faits d'exécution,  139 00:09:53,520 --> 00:09:57,980 mais à des vices originels qui ont entaché, dès l'origine, ab initio, 140 00:09:58,400 --> 00:10:01,680 le contrat au stade de sa conclusion et sa passation. 141 00:10:02,510 --> 00:10:03,140 En revanche,  142 00:10:03,140 --> 00:10:08,260 le tiers peut soulever tout autant des moyens d'illégalité tirés du contrat lui même,  143 00:10:08,520 --> 00:10:13,320 que des moyens d'illégalité tirés des actes unilatéraux qui entourent,  144 00:10:13,420 --> 00:10:16,260 qui ont concouru à l'élaboration du contrat. 145 00:10:16,630 --> 00:10:20,580 Mais, dans tous les cas, les tiers ne peuvent invoquer, 146 00:10:20,580 --> 00:10:23,840 nous dit l'arrêt, que des vices en rapport direct,  147 00:10:24,500 --> 00:10:27,060 avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent 148 00:10:27,620 --> 00:10:31,520 ou ceux d'une gravité telle que le juge doit les relever d'office. 149 00:10:33,030 --> 00:10:35,580 Dans l'arrêt Département de Tarn-et-Garonne, 150 00:10:35,670 --> 00:10:38,100 exactement comme dans l'arrêt Commune de Béziers 1, 151 00:10:38,260 --> 00:10:43,800 nous retrouvons ce qui était l'un des grands enjeux de cette façon 152 00:10:43,800 --> 00:10:46,820 de redessiner l'office du juge du contrat,  153 00:10:47,040 --> 00:10:51,900 à savoir qu'il puisse disposer d'une palette de sanctions 154 00:10:51,900 --> 00:10:56,640 et choisir la sanction qui lui paraît la plus adéquate par rapport à la nature et à la gravité,  155 00:10:57,440 --> 00:10:58,680 de l'illégalité commise. 156 00:10:59,240 --> 00:11:03,620 Donc, poursuite de l'exécution du contrat, sous réserve de régularisation,  157 00:11:04,060 --> 00:11:07,080 résiliation avec effet différé dans le temps éventuellement, 158 00:11:07,380 --> 00:11:14,080 annulation totale ou partielle, mais,  seulement, en cas, pour les deux vices,  159 00:11:14,580 --> 00:11:19,640 contenu illicite ou illégalité d'une particulière gravité. 160 00:11:20,160 --> 00:11:22,140 Voilà comment ces dernières années,  161 00:11:22,440 --> 00:11:29,950 le juge administratif français, soucieux de privilégier les pouvoirs du juge,  162 00:11:30,200 --> 00:11:35,480 a choisi, de diriger aussi bien les parties contractantes, que les requérants,  163 00:11:35,780 --> 00:11:38,500 devant le juge de plein contentieux. 164 00:11:39,820 --> 00:11:44,180 Malgré tout, le contentieux de l'excès de pouvoir, n'a pas totalement disparu 165 00:11:44,340 --> 00:11:49,460 en matière de contestation de la validité d'un contrat administratif. 166 00:11:50,280 --> 00:11:56,440 Elle n'est en effet pas aujourd'hui totalement exclue, trois exceptions. 167 00:11:56,560 --> 00:12:06,140 D'abord, vous le savez, il faut réserver un sort particulier à l'usager du service public. 168 00:12:06,140 --> 00:12:10,680 Donc, lorsqu'un contrat porte sur un service public, 169 00:12:11,080 --> 00:12:15,440 il y a évidemment les dispositions relatives aux usagers 170 00:12:15,520 --> 00:12:18,380 qui forment ce qu'on appelle les clauses réglementaires. 171 00:12:18,580 --> 00:12:23,220 Or, nous savons depuis un arrêt du Conseil d'État du 21 décembre 1906, 172 00:12:23,230 --> 00:12:27,820 Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix-de-Seguey-Tivoli, 173 00:12:28,340 --> 00:12:34,560 que le Conseil d'État réserve un sort particulier aux usagers du service public. 174 00:12:34,780 --> 00:12:42,120 Dans l'arrêt Croix-de-Seguey-Tivoli, il s'agissait,  de la possibilité pour un usager de se prévaloir 175 00:12:42,320 --> 00:12:47,800 ou de contester par la voie de l'exception des clauses réglementaires 176 00:12:47,925 --> 00:12:51,740 contenues dans un contrat administratif ayant un objet de service public. 177 00:12:51,820 --> 00:12:57,140 Mais, dans un arrêt du Conseil d'État d'Assemblée, du 10 juillet 1996,  178 00:12:57,340 --> 00:13:05,540 un arrêt Cayzeele, le Conseil d'État a été jusqu'à admettre la recevabilité directe,  179 00:13:05,640 --> 00:13:11,260 du recours pour excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat,  180 00:13:13,120 --> 00:13:14,960 ayant un objet de service public. 181 00:13:15,140 --> 00:13:19,140 Par exemple, les clauses tarifaires d'une concession d'autoroute,  182 00:13:19,200 --> 00:13:24,640 d'une concession de distribution de l'énergie ou de distribution de l'eau potable 183 00:13:24,700 --> 00:13:27,780 ou de ramassage des ordures ménagères. 184 00:13:28,440 --> 00:13:32,180 Donc ici, le recours pour excès de pouvoir reste recevable, 185 00:13:32,180 --> 00:13:34,420 contre les clauses réglementaires des contrats. 186 00:13:34,990 --> 00:13:36,600 Deuxième exception,  187 00:13:37,640 --> 00:13:41,800 la jurisprudence Département de  Tarn-et-Garonne ne met pas fin 188 00:13:42,820 --> 00:13:45,575 - en même temps, il ne le pouvait pas parce qu'un arrêt ne pouvait pas 189 00:13:45,575 --> 00:13:48,460 aller à l'encontre de dispositions constitutionnelles et législatives -  190 00:13:49,240 --> 00:13:51,400 à l'existence du déféré préfectoral. 191 00:13:51,430 --> 00:13:54,360 Cette fameuse voie de recours qui permet au préfet,  192 00:13:54,820 --> 00:14:00,340 après qu'on lui ait transmis toute une série d'actes des collectivités locales,  193 00:14:00,720 --> 00:14:04,180 de saisir le tribunal administratif territorialement compétent 194 00:14:04,340 --> 00:14:07,640 pour contester la légalité de tous les actes administratifs. 195 00:14:07,640 --> 00:14:15,460 Or, ici, parmi les actes que le préfet peut contester par la voie du référé préfectoral, 196 00:14:15,580 --> 00:14:19,880 il y a évidemment tous les actes détachables du contrat. 197 00:14:20,230 --> 00:14:24,340 Et donc ici, la théorie des actes détachables du contrat, 198 00:14:24,340 --> 00:14:26,500 attaquables par la voie du recours pour excès de pouvoir,  199 00:14:26,540 --> 00:14:30,450 n'est pas abandonnée pour le préfet 200 00:14:30,450 --> 00:14:36,350 lorsqu'il exerce cette forme particulière de recours pour excès de pouvoir 201 00:14:36,450 --> 00:14:39,480 qu'est le déféré préfectoral.  202 00:14:39,720 --> 00:14:43,680 Et puis, il existe une troisième et dernière exception,  203 00:14:44,480 --> 00:14:49,640 qui ne concerne pas ici cette fois l'acte détachable ou la clause règlementaire,  204 00:14:49,640 --> 00:14:51,660 mais des contrats administratifs eux-mêmes, 205 00:14:51,720 --> 00:14:54,520 qui peuvent faire l'objet de recours pour excès de pouvoir. 206 00:14:54,520 --> 00:14:58,060 Alors, c'est évidemment une exception tout à fait particulière, 207 00:14:58,120 --> 00:14:59,900 mais je tenais à vous la mentionner. 208 00:15:00,160 --> 00:15:05,540 C'est une exception qui résulte d'un arrêt du Conseil d'État de section du 3 octobre 1998, 209 00:15:05,600 --> 00:15:07,120 un arrêt Ville de Lisieux, 210 00:15:07,320 --> 00:15:09,980 arrêt dans lequel le Conseil d'État juge recevables  211 00:15:09,980 --> 00:15:11,660 les recours pour excès de pouvoir dirigés 212 00:15:11,800 --> 00:15:15,560 contre les contrats de recrutement d'agents dans la fonction publique. 213 00:15:16,030 --> 00:15:20,660 Mais, la raison d'être de cette jurisprudence très dérogatoire, 214 00:15:20,720 --> 00:15:24,400 c'est de considérer que le contrat de recrutement d'un agent public,  215 00:15:25,120 --> 00:15:31,980 est quasiment un acte administratif unilatéral, tant il n'y a pour l'agent recruté, 216 00:15:32,040 --> 00:15:35,180 par contrat, aucune marge de négociation, 217 00:15:35,180 --> 00:15:39,360 aucune différence fondamentale de statut avec l'agent public statutaire 218 00:15:39,360 --> 00:15:40,820 et notamment, avec le fonctionnaire. 219 00:15:41,000 --> 00:15:42,680 Et c'est pour cela que le Conseil d'État a estimé 220 00:15:42,680 --> 00:15:47,160 que le contrat de recrutement d'un agent public n'est quasiment pas un contrat. 221 00:15:47,230 --> 00:15:49,720 Ce n'est qu'une enveloppe contractuelle, mais, sur le fond,  222 00:15:49,720 --> 00:15:55,200 c'est un acte administratif unilatéral, même si ça ne l'est pas formellement et officiellement. 223 00:15:55,340 --> 00:15:58,560 Et donc, c'est pour cela, que le Conseil d'État dans l'arrêt Ville de Lisieux,  224 00:15:58,560 --> 00:16:04,880 a estimé, que notamment,  évidemment, l'agent public,  225 00:16:04,880 --> 00:16:07,700 mais des personnes qui n'auraient pas été recrutées,  226 00:16:07,740 --> 00:16:10,740 peuvent exercer un recours pour excès de pouvoir 227 00:16:10,740 --> 00:16:15,720 contre les contrats de recrutement d'agents dans le secteur public, 228 00:16:15,720 --> 00:16:16,840 dans la fonction publique. 229 00:16:16,900 --> 00:16:18,200 Voilà quelques exceptions,  230 00:16:18,475 --> 00:16:21,025 mais qui aujourd'hui sont donc bien moins nombreuses qu'auparavant, 231 00:16:21,100 --> 00:16:22,540 parce que fondamentalement,  232 00:16:22,720 --> 00:16:27,460 au stade du recours en contestation de la validité d'un contrat administratif, 233 00:16:27,800 --> 00:16:31,760 eh bien, que l'on soit partie contractante, ou qu'on soit tiers,  234 00:16:31,880 --> 00:16:37,900 il faut diriger son action et saisir le juge de plein contentieux, 235 00:16:37,960 --> 00:16:40,200 le juge administratif de pleine juridiction.